Agriculteurs en colère : journée cruciale pour le mouvement de protestation agricole en France, des mesures attendues

Le Premier ministre, Gabriel Attal, doit annoncer ce vendredi de premières mesures à effet rapide pour répondre aux agriculteurs qui manifestent depuis une semaine et décideront s'ils continuent, ou non, à bloquer des routes.

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Confronté à sa première crise grave depuis sa nomination, Gabriel Attal doit se rendre vendredi auprès des agriculteurs pour faire "des propositions concrètes de mesures de simplification", en compagnie du ministre de l'Agriculture Marc Fesneau.
Selon le syndicat agricole majoritaire, la FNSEA, il ira en Haute-Garonne (sud-ouest), où commença le premier blocage d'autoroutes il y a une semaine.
Vendredi matin, l'autoroute A1, axe majeur reliant Paris au nord de l'Europe, était fermée à la circulation par des tracteurs et des bottes de paille en deux endroits, provoquant d'importantes difficultés.
"Aujourd'hui, on attend des réponses du Premier ministre et si on n'en a pas on continuera le mouvement", résume Jérémy Allard, syndicaliste agricole du nord de la France.
"Le mouvement s'inscrit dans la durée", avertit Olivier Lelièvre, producteur de betteraves et maïs, également mobilisé sur un barrage.
Plus de 55.000 personnes se sont mobilisées jeudi, selon un décompte de la FNSEA, organisation agricole majoritaire proche du pouvoir, qui tente depuis une semaine de canaliser ce mouvement.
Rencontrés dans de multiples lieux de France par l'AFP, les agriculteurs ont des revendications diverses, selon qu'ils sont éleveurs de volailles frappés par la grippe aviaire l'an dernier, viticulteurs dont les vins se vendent moins, cultivateurs bio aux légumes boudés par les Français, ou grands céréaliers, comme Thierry Cazemajou, qui cultive du maïs doux et des haricots verts pour une grande marque de conserves à Sigalens en Gironde.
Pour lui, "le GNR (gazole non routier) c'est vraiment une priorité, une baisse primordiale : il faudrait revenir à 80 centimes hors taxes alors que l'on l'achète à 1,20 euro, c'est urgent, ça nous plombe !"
D'autres veulent un prix minimum pour leurs produits, ou le versement d'aides ou d'indemnisations dues de longue date, voire un moratoire sur l'interdiction des pesticides, comme nouvellement demandé par la FNSEA. Une partie des 140 revendications portées par le syndicat majoritaire nécessitent une loi ou des négociations européennes.

Bloquer les grands axes 

Un peu partout dans le pays, les manifestants s'en sont pris jeudi à des symboles de l'État et des grandes surfaces, donnant l'image d'une colère se radicalisant.
Sans intervention des forces de l'ordre à ce stade, le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, estimant que les agriculteurs ne s'en prenaient pas aux policiers ni aux gendarmes, et ne mettaient pas le feu aux bâtiments publics.
À Agen (sud-ouest), des manifestants ont déversé des pneus, du plastique, des cagettes et du fumier devant la gare, pendant qu'une autre équipe bloquait les voies. Un sanglier a été pendu devant un bâtiment de l'Inspection du travail.
Pour Charles Demeyer, producteur d'endives dans le Nord, "en mettant la France à l'arrêt comme ça, peut-être qu'on aura des réponses".

En Centre-Val de Loire, plusieurs blocages d'axes routiers importants sont à nouveau prévus durant la journée.

Et l'écologie? 

Les ministres de l'Agriculture et de l'Économie mèneront vendredi, à 11H00, un comité de suivi des négociations commerciales entre la grande distribution et ses fournisseurs, censées sanctuariser le revenu des producteurs.
Les manifestations ont aussi ramené au premier plan les projets d'accords de libre-échange, notamment entre l'Union européenne et le Mercosur, qui regroupe des puissances commerciales d'Amérique du Sud, et auquel s'oppose une large part de la classe politique française.
En France, les importations d'aliments augmentent, parfois sans avoir les mêmes normes sur les pesticides par exemple.
Alors que les agriculteurs sont également mobilisés en Allemagne, en Belgique, en Pologne ou en Suisse, le mouvement est populaire en France, mais tous les syndicats ne plaident pas pour sabrer les normes environnementales.
La Confédération paysanne, 3e syndicat représentatif, classé à gauche, propose des solutions bien différentes de celles des syndicats FNSEA, Jeunes agriculteurs et Coordination rurale.
Les ONG écologistes s'alarment des appels à débrider les règles sur l'eau ou les pesticides.
"Ce n'est pas en réduisant les mesures environnementales que l'agriculture règlera sa crise, au contraire, ça ne fera qu'aggraver la situation", dit Sandrine Bélier, directrice de l'ONG "Humanité et Biodiversité".

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