Biodiversité : on vous explique pourquoi les éoliennes sont accusées de tuer les chauve-souris

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Pourquoi les éoliennes sont accusées de tuer les chauves-souris ©C. Pierre / C. Durchon / France télévisions

Oiseaux, insectes, chauves-souris… Ils ne sont pas épargnés par les éoliennes. Si ces mastodontes à pales géantes ne sont pas les seules causes de décès pour ces animaux, les suivis de mortalité sur les parcs éoliens sont désormais obligatoires. Les mesures prises pour tenter de limiter les dégâts ne sont pas toujours suffisantes.

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Symbole de l’écologie, égérie de la transition verte, les éoliennes ont le vent en poupes dans le département du Cher. On en dénombre 182, installées ou en cours d’installation. Mais sont-elles vraiment écologiques ? Pour certains experts, c’est du côté de la biodiversité que le bât blesse. En 10 ans, les suivis de mortalité réalisés sur les parcs éoliennes du Cher ont permis de recenser 228 chauves-souris retrouvées mortes, dont 71 noctules, une espèce menacée de disparition.

Laurent Arthur, spécialiste des chauves-souris et membre de l’association Chauve qui peut, précise : "Pour une chauve-souris retrouvée morte au pied d’une éolienne, ce sont 10 chauves-souris qui ont été tuées par une éolienne et dont les restes se sont dégradés, ou qui ont été emportés par des prédateurs".

Ce n’est pas l’impact qui tue les chauves-souris, mais la pression exercée par les pales, qui atteint 300km/h et les tuent sur le coup. Une catastrophe, notamment pour les noctules en migration très présentes dans le Cher.

Des solutions pour limiter la mortalité

Première solution pour limiter la mortalité des chauves- souris, veiller à ce que la garde au sol, c’est-à-dire la distance entre le bas de la pale de l'éolienne et le sol, soit suffisante. "Il faut minimum 30 mètres de garde au sol pour préserver les chauves-souris", précise le spécialiste qui étudie ces petits mammifères volants depuis plus de 40 ans.

Pour sauver un maximum de chauve-souris, les parcs peuvent aussi être bridés. "En hiver elles dorment et elles ne volent pas le jour, ni en cas de fortes pluies. Cela permet de mettre en place des algorithmes pour arrêter les éoliennes au bon moment. Avec de très bons bridages, le risque est plus limité", expose Laurent Arthur.

Si le Cher est le département où il y a le plus de bridage en France (90% des parcs y sont bridés), la solution des algorithmes reste trop aléatoire. "Cette année nous avons eu un mois de septembre et octobre particulièrement doux, les chauves-souris sont entrés en hibernation plus tardivement. Mais les algorithmes se basent sur les années précédentes, donc les parcs n’ont pas été bridés en conséquence".

Autre problème, seul un inspecteur ICPE, qui contrôle les installations classées pour la protection de l’environnement peut vérifier si un parc est bridé et si la législation est bien respectée par le producteur d’énergie. "Dans le Cher, il n’y avait qu’un seul inspecteur. Maintenant il n’y en a plus du tout. Les bridages sont donc au bon vouloir des producteurs d’énergies", souligne Laurent Arthur qui est d’autant plus inquiet que le gouvernement a présenté en novembre 2022 un projet d’arrêté pour débrider les éoliennes en période de forte demande d’électricité, comme ceux qui nous avons connu l’hiver dernier. Un projet qui a été autorisé temporairement par la commission européenne.

La Dréal, Direction Régionale de l'Environnement, met à la disposition du public toutes les données de suivi de mortalité sur l’ensemble des parcs éolien du Cher. Les services précisent : « Les parcs éoliens ont désormais l’obligation de mettre en place des suivis un an après la mise en service du parc, puis tous les dix ans ».

Laurent Arthur, spécialiste des chauve-souris

Cartographier les zones à risques

Pour limiter l’impact des éoliennes sur les chauves- souris et plus particulièrement les noctules, le muséum d’Histoire Naturelle de Bourges a cartographié les zones d’implantations problématiques. "C’est toute la vallée du Cher et de l’Arnon qui pose problème. Le parc d’Ids Saint Roch par exemple est en plein bocage et a une incidence sur la mortalité des chauves-souris très forte. Sur le parc qui doit s’implanter à Charost, il y a de véritables enjeux car beaucoup de passages de noctules. Mais nous n’avons pas eu gain de cause. Le problème c’est que les arguments de biodiversité dans le choix d’implantation d’un parc passent toujours en dernier... Multiplier les éoliennes, c’est multiplier le risque pour les chauves-souris", alerte Laurent Arthur.

Avec ces chapelets d’éoliennes, l’association Chauve qui peut relève des chutes d’effectif de migration. A défaut d’être entendue sur des zones à risque sans implantation d’éolienne, l’association demande aux services préfectoraux de mettre en place des bridages plus sévères et mieux contrôlés.

Le Muséum d’histoire naturelle de Bourges qui recense l’ensemble des cadavres de chauves-souris retrouvés au pied des éoliennes appelle également à la vigilance. "Nous avons recensés les sites à enjeu fort, avec présence de noctules communes. L’idéal serait de ne pas implanter d’éoliennes à proximité des sites à enjeu fort", détaille Amélie Chrétien, coordonnatrice chauves-souris et biodiversité au Muséum d’histoire naturelle de Bourges.

Les futures générations de noctules sont en train de naître dans le Berry. Mais avec la multiplication des éoliennes, (15 000 d’ici 10 ans contre 9000 aujourd’hui en France), les noctules sont menacées de disparition.

Les oiseaux et les insectes également impactés

Une éolienne tue en moyenne 40kg d’insectes chaque année. Les oiseaux ne sont pas non plus épargnés. Si les lignes à haute tension sont la cause de bien plus de mort chez les volatiles, l’éolien reste à surveiller. Sébastien Brunet, chef de projet biodiversité pour l’association Nature 18  appuie : "C’est un facteur de plus qui vient s’ajouter à tous les autres. Il faut notamment éviter d’implanter des éoliennes dans les couloirs migratoires". Une éolienne tue en moyenne sept oiseaux par an mais certaines éoliennes sont plus meurtrières que d’autres avec 18 oiseaux tués par an au compteur.

Sébastien Brunet détaille : "Il y a des oiseaux menacés qui sont présents sur des zones où vont s’implanter des éoliennes comme le roitelet à triple bandeau ou le martinet noir. Malheureusement c’est compliqué de faire valoir cet impact sur la biodiversité. A Saint-Germain-des-Bois, un parc éolien doit être implanté en lisière de forêt en 2026. En commission départementale tous les acteurs étaient contre mais le Préfet a donné son feu vert au projet".

Pour l’heure, aucune étude n'existe sur l'impact de dérangement des éoliennes ou sur la destruction d’habitat naturel.

Retrouvez tous les soirs dans votre édition ICI 19/20 un épisode consacré à l'éolien du 13 au 16 novembre 2023

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