Bourges : par manque de personnel, il n'y aura pas de médecin au SMUR cette nuit

Les urgences mobiles du CH Jacques-Cœur de Bourges ont failli n'avoir aucun médecin à disposition ce vendredi 8 octobre. Finalement, un intérimaire a été trouvé en dernière minute jusqu'à 20h, payé au-dessus du plafond réglementaire. L'hôpital n'a toujours pas de solution pour cette nuit.

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

Bourges n'est pas passée loin d'être sans médecin urgentiste au SMUR pendant une journée entière. Hier soir, le compte Facebook du centre hospitalier Jacques-Cœur passait un appel de la dernière chance sur son compte Facebook : il manque un médecin entre 8h30 ce vendredi 8 octobre au matin, et 8h30 le lendemain. Une période pendant laquelle le service mobile d'urgence et de réanimation allait devoir être désactivé. 

Ce matin, bonne nouvelle de dernière minute : le SMUR est ouvert ce vendredi... mais pas toute la journée. "On a réussi à trouver un médecin intérimaire qui accepte de venir travailler entre 9h30 et 20h", explique l'hôpital. Ce qui permettra d'ouvrir le service des urgences primaires, soit les urgences vitales de type crise cardiaque ou AVC. En revanche, il n'y a toujours aucune solution pour le shift 20h-8h30. Les urgences sur place, elles, restent bien ouvertes.

La faute à un manque structurel de personnels médicaux au sein des urgences. Ainsi, sur les 24 (en équivalents temps plein de 42 heures) que compte normalement le service, la moitié des postes sont vacants. Et encore, sept médecins ont été recrutés ces derniers mois ou arriveront en novembre pour renforcer les effectifs. Il y a un an, seul un tiers des postes étaient pourvus.

"Le SMUR peut se déplacer mais arriver trop tard"

Ainsi, hasard du calendrier, le manque de médecins de ce vendredi intervient un an jour pour jour après l'arrêt d'activité, dans la nuit du 7 au 8 octobre 2020, du service des urgences, déjà parce qu'aucun médecin senior n'avait été trouvé. Deux internes s'étaient alors partagé la gestion de la bobologie, rien de plus que des cas sans gravité. La nuit du 28 au 29 janvier, rebelote : pas de médecin, les SMUR de Vierzon et Saint-Amand-Montrond devant alors prendre le relai. 

Une tentative de continuité des soins qui met, malgré tout, la population en danger : "Au vu du nombre de kilomètres en plus, s'il se passe quelque chose de grave, le SMUR peut se déplacer mais arriver trop tard", s'indigne Armelle Paris, infirmière et secrétaire CGT au CH de Bourges. 

"La loi du plus offrant"

En cause, selon elle : une "loi du plus offrant" entre les différents hôpitaux. Car le médecin, trouvé ce vendredi en urgence, a été recruté au-dessus du plafond réglementaire des 1 170 euros pour 24 heures. L'établissement en a-t-il le droit ? "On n'a pas le choix, esquive l'hôpital. On fait le maximum le reste du temps, mais on y est contraint dans l'intérêt des habitants." Une obligation quand "les intérims peuvent choisir où ils veulent aller", dans un contexte de "pénurie de médecins urgentistes partout en France". "On est déjà dans une région qui manque de médecins, et maintenant il faut payer pour en faire venir un, c'est honteux", tonne Armelle Paris.

Une situation que le ministre de la Santé Olivier Véran dénonce depuis plus d'un an maintenant. Sur Europe 1, il affirmait en juillet 2020 être favorable à un blocage par les comptables publics des rémunérations supérieures au plafond, ainsi qu'à des dénonciations par l'ARS de certains abus devant les tribunaux administratifs. La loi Rist d'avril 2021 prévoit ainsi un renforcement des contrôles du respect de ce plafond. Objectif : encourager les intérimaires à se positionner sur des postes fixes.

Cette disposition est approuvée par la Fédération hospitalière de France (FHF) dans une lettre adressée au ministre le 28 septembre dernier. Cependant, son président Frédéric Valletoux dit craindre que les hôpitaux concernés doivent "faire face à de nouvelles sanctions, sans disposer de nouveaux outils pour assurer la continuité de l’offre de soin, tout particulièrement dans les territoires les moins attractifs". Autrement dit, Jacques-Cœur n'aurait pas pu prendre un médecin au-delà du plafond, mais rien ne dit qu'un autre médecin au bon tarif aurait pu être déniché dans les temps.

Remonter la pente

De son côté, Armelle Paris s'interroge sur ce qui semble être le cas particulier de Bourges :

Nous sommes le centre hospitalier référent du groupement hospitalier des territoires du Cher, le plus grand hôpital du département, et nous on n'a pas de médecins alors qu'il y en a à Vierzon et Saint-Amand-Montrond. Je me pose des questions.

Armelle Paris, secrétaire CGT CH Jacques-Cœur de Bourges

L'hôpital, lui, se veut optimiste après les embauches de ces derniers mois. "Tous les établissements ne peuvent pas se targuer d'avoir pu recruter autant, ça montre qu'on peut attirer des médecins en poste fixe dans le Berry". L'établissement affirme que le recrutement est sa "priorité".

La CGT est plus méfiante. D'après Armelle Paris, le manque de médecins au SMUR est "un seul aspect du problème", auquel il faut ajouter "des fermetures de lits, des manques de personnels dans tous les services". "Je veux bien parler de continuité des soins, mais on ne peut plus l'assurer", regrette-t-elle. 

Une plainte déposée

Ce 8 octobre, les maires de Vierzon Nicolas Sansu (PCF), de Bourges Yann Galut (DVG), et de Saint-Amand-Montrond Emmanuel Riotte (LR) ont annoncé porter plainte contre X, dans une lettre adressée au procureur de Bourges Joël Garrigue. Les trois édiles y dénoncent "une perte de chance en cas d’urgence vitale pour tous les habitants du département du Cher" : 

Cette défaillance expose surtout directement les habitants du Département du Cher à un risque immédiat de mort ou de blessures en cas d’urgence absolue, alors qu’il incombe aux autorités de santé d’assurer à la population une obligation de sécurité et de santé à leur égard.

Nicolas Sansu, Yann Galut et Emmanuel Riotte

Les auteurs estiment ainsi que "la faute des autorités régionale et nationale de santé de ne pas tout mettre en oeuvre pour assurer normalement le service d’urgence dans le Département est constituée", que cette faute "soit intentionnelle ou non". Sur le seul semestre de juin à août 2021, les trois maires avancent que le secteur de Vierzon a été à découvert pendant 75 heures.

 

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Veuillez choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité
Je veux en savoir plus sur
le sujet
Veuillez choisir une région
en region
Veuillez choisir une région
sélectionner une région ou un sujet pour confirmer
Toute l'information