Ce lundi 14 février, associations et malades s'unissent pour mieux faire connaître cette affection, sujet de nombreux clichés au sein du grand public. Charlotte Silvert, référente Épilepsie-France dans le Cher, nous raconte son quotidien d'épileptique.
"Quand la maladie arrive, on te dit de ne pas t'inquiéter, que ça ne changera pas tes rapports avec les gens, mais c'est faux." Ce lundi 14 février, c'est la journée internationale de l'épilepsie, organisée tous les deuxièmes lundis de février depuis 2015. Une journée pour sensibiliser et ouvrir les yeux. Car persistent encore un certain nombre de clichés sur cette maladie neurologique, qui fait perdre le contrôle aux malades pendant des crises convulsives.
Depuis quelque temps, l'association Épilepsie-France a sa référente locale à Bourges, dans le Cher. Charlotte Silvert est elle-même épileptique, à l'instar de 650 000 personnes dans l'Hexagone. Une maladie arrivée "du jour au lendemain" quelques mois après un traumatisme crânien : "J'étais au restaurant pour fêter mes 29 ans, et j'ai eu ma première crise", raconte-t-elle. C'était il y a quatre ans. "Ça a été un choc, il a fallu une longue acceptation parce que toute la vie change, il y a un avant et un après."
Crise au volant
Presque toutes les facettes de sa vie ont été affectées par l'irruption soudaine de la maladie : son indépendance, sa vie sociale, son travail. Un jour, au volant de sa voiture, elle commence à avoir une crise. "Heureusement, on était dans le petit chemin qui arrive à la maison, mon conjoint a eu le temps d'attraper le volant et de mettre le frein à main", se souvient-elle. Depuis, plus question pour elle de conduire. "On n'en a pas le droit quand la maladie n'est pas stabilisée."
Car l'épilepsie, ça ne se guérit pas. Tout au plus, elle se traite, pour raréfier le plus possible les crises et leurs effets. Charlotte Silvert, elle, est pharmaco-résistante, c'est-à-dire que les trois médicaments qu'elle prend matin et soir n'affectent pas encore la maladie.
Alors forcément, "on se dit le matin qu'on va faire ça, ça et ça dans la journée, mais on ne sait jamais ce qui peut arriver", explique celle qui fait une grosse crise toutes les deux semaines environ. Salariée dans un grand groupe mutualiste, elle a déjà été victime d'une crise convulsive devant les clients. "Je me suis rendu compte que l'environnement bruyant du travail pouvait empirer les choses." Un jour, son employeur la convoque. "Il m'a dit que je faisais peur aux gens, que je devais rester chez moi et que je pourrai revenir quand ma maladie sera stabilisée." Reconnue invalide, Charlotte Silvert n'a toujours pas regagné son travail, mais reste une salariée de l'entreprise.
Épuisement chronique
Côté social, l'imprévisibilité et le côté impressionnant des crises ont "éloigné des gens", y compris son conjoint de l'époque : "Au début, il a été très présent, il a essayé, mais il est parti parce que c'est devenu trop dur, il était toujours dans l'assistanat."
De manière générale, Charlotte Silvert a dû apprendre à vivre avec le regard peu compréhensif des autres, y compris de certains de ses proches : "Des membres de ma famille ont dit que c'était parce que je ne mangeais pas assez, que je ne savais pas m'alimenter." Elle se souvient aussi de "jugements de gens qui pensent qu'une fois que la crise est passée, on va mieux, alors que je peux mettre plusieurs jours à m'en remettre". La berruyère évoque aussi les crises moins fortes, presque invisibles, mais qui lui font quand même perdre connaissance :
Quand je reviens à moi, on me dit : "Tu ne m'écoutes pas, tu es dans la Lune."
Charlotte Silvert, référente dans le Cher pour Épilepsie-France
Faire tomber les barrières
C'est pour lutter contre cette méconnaissance et ces clichés que Charlotte Silvert se bat au sein de l'association Épilepsie France, à travers des échanges avec le grand public, ou des interventions dans les écoles. En cette journée de l'épilepsie, l'objectif est de médiatiser au maximum ce combat. Car, par peur de ce jugement extérieur, "de nombreux épileptiques préfèrent le cacher à leur travail, même à leurs proches, parce que ça pourrait leur mettre des barrières". Et "on se rend compte que les gens qui n'en parlent pas sont mal dans leur peau". L'extériorisation est donc fondamentale pour un bon accompagnement par exemple. Ce n'est pas pour rien que le slogan de cette journée est : "Parlons-en".
Pour symboliser la mobilisation générale, une cinquantaine de mairies du Loiret, et une vingtaine en Indre-et-Loire, s'éclaireront en violet -couleur symbolisant l'épilepsie- ce 14 février à la tombée de la nuit. À Gien, un stand d'information ce tiendra à l'hôpital cet après-midi, tandis qu'une photo de soutien est prévue en présence de l'équipe municipale à 19h30 devant la mairie de Tours.
- Les bons gestes à adopter si vous êtes témoin d'une crise
Pour quelqu'un qui ne connaît pas, être témoin d'une crise d'épilepsie peut être très impressionnant, trop même pour avoir la meilleure réaction possible. Charlotte Silvert explique la bonne marche à suivre :
- Amortir la chute et mettre la personne en position latérale de sécurité
- Mettre un linge entre la tête et le sol, les convulsions pouvant "faire que la tête va frotter ou taper par terre"
- Laisser de l'espace à la personne en crise, "ne pas la serrer, ne pas la toucher"
- Ne surtout rien mettre dans la bouche de l'épileptique. "Mettre une cuillère dans la bouche, c'est un cliché", explique-t-elle. De même, "un épileptique en crise ne va pas avaler sa langue".
- Si le temps semble long, on que vous paniquez, autant appeler les secours, le 15, le 18 ou le 112 : "Ils diront quoi faire, ils guideront."
- "Quand on reprend connaissance, on peut mettre du temps à reconnaître les gens." Il est donc important de rassurer la personne en crise, y compris avant son retour à la conscience. Prendre une voix douce, et lui expliquer qui sont les gens autour d'elle et dans quel lieu elle se trouve.