La majorité sortante de droite s'est imposée au soir du premier tour de ces élections départementales dans le Cher. Les candidats sortants ont été largement plébiscités, et la gauche veut encore croire au basculement du département. Le RN enregistre de son côté une très lourde défaite.
On attendait la droite, on a eu la droite. Ce dimanche 20 juin, les électeurs du Cher étaient appelés aux urnes pour renouveler leurs représentants de canton au conseil départemental. Un scrutin marqué par une abstention record : seuls 32,01% des Chériens et Chériennes inscrits se sont déplacés pour voter. Une abstention qui semble avoir pesé, au niveau national, sur les performances du RN, en large recul par rapport aux précédents scrutins régionaux et départementaux en 2015. Deuxième conséquence de cette abstention hors-normes : la prime au sortant. Dans 17 cantons sur les 19 du département, les binômes en tête comportent au moins un conseiller départemental sortant.
Départementales 2021 dans le Cher : prime au sortant, déroute du RN... ce qu'il faut retenir du 1er tour #electionsdepartementales2021 #Cher #CentreValdeLoire
— France 3 Centre-Val de Loire (@F3Centre) June 21, 2021
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Troisième conséquence, et la plus notable : avec un si faible nombre d'électeurs, aucune triangulaire n'aura lieu. Pour se qualifier au deuxième tour, un binôme doit en effet obtenir 10% des inscrits, ce qui n'est le cas pour aucun troisième du département. De même, pour qu'un candidat soit élu dès le premier tour, il doit obtenir 50% des suffrages exprimés, et 25% des inscrits. Si bien que, si des candidats obtiennent la majorité des votes dès ce dimanche 20 juin, seul un binôme a été élu car dépassant ce seuil de 25%.
Dans le Cher, que faut-il retenir de ce premier tour ?
1. La majorité sortante de droite est en confiance
L'union de la droite et du centre, à l'aune d'une désunion de la gauche, avait fait basculer le département dans leur giron lors des élections de 2015. Un mandat plus tard, toujours unies, les forces de la majorité sortante ont teinté de bleu la majorité du département hier soir. Seule formation politique à avoir pu présenter un binôme dans chacun des 19 cantons, la liste "Avenir pour le Cher" prend la tête sur 11 territoires.
Elle parvient même à faire élire un binôme dès le premier tour, en l'occurrence Anne Cassier et David Dallois sur le canton d'Aubigny-sur-Nère avec 73,38% des voix, face au rassemblement national. C'est le seul binôme déjà élu du Centre-Val de Loire, aucun autre n'ayant obtenu le seuil minimum de 25% des inscrits, malgré un grand nombre de scores supérieurs à 50%. Dans le Cher, cinq autres binômes de la droite et du centre ont dépassé ce seuil de 50% des voix dès le premier tour, et partent archi-favoris pour le deuxième tour de ce dimanche 27 juin.
Michel Autissier, président sortant, a décidé de ne pas se représenter. Jacques Fleury et Dominique Fenoll, respectivement chef de groupe et vice-présidente sortants, sont tous les deux dans les starting blocks pour prendre la présidence du département, et ont empoché en binôme 60,6% des voix à Bourges-4, seul canton berruyer où la gauche n'est pas en pole position. "Le moment n’est pas encore venu de choisir celui ou celle qui sera président ou présidente de la nouvelle majorité", a réagi Jacques Fleury au micro d'Antoine Wernert pour France 3. "On peut afficher le sourire de la satisfaction", s'est-il ensuite réjoui, soulignant les "très bons résultats" de l'union de la droite. Des résultats qui traduisent, selon lui, "la reconnaissance du travail accompli pendant six ans par tous mes collègues et moi-même".
Mais l'harmonie n'était pas partout de mise. Sur le canton de Chateaumeillant, la droite partait en ordre très dispersé. Marilyn Brossat et Daniel Fourré, les deux conseillers (DVD) sortants, sont candidats à leur réélection... dans deux binômes séparés. Au côté de Bernadette Perrot-Dubreil (LR), Daniel Fourré part avec l'étiquette officielle "Avenir pour le Cher". Il obtient 34% des voix, devançant son ancienne alliée, donnée à 26%. Ces deux binômes s'affronteront au second tour, laissant derrière eux un autre binôme DVD, un RN et un PCF, battus.
2. L'union de la gauche a (plus ou moins) fonctionné
Le Cher était annoncé comme le seul département du Centre-Val de Loire à pouvoir basculer à gauche à l'issue de ces élections. Et si la droite est en confiance, la gauche n'est pas encore K.O. En 2015, l'éparpillement des voix avait fait perdre à l'alliance socialiste et communiste sa majorité. En 2021, pas question de refaire les mêmes erreurs : les forces de gauche sont parties (à deux exceptions près) unies, sous la bannière du "Cher en commun". Un écho au rassemblement (qui incluait également LFI et EELV) ayant permis la conquête de la mairie de Bourges par Yann Galut après 25 ans de gouvernance de la droite.
Dans le conseil départemental sortant, la gauche contrôle sept cantons sur 19. Le "Cher en commun" a présenté un binôme dans 16 des 19 cantons du département, avec pour objectif de garder ses sept cantons, et peut-être même d'en faire basculer assez pour reprendre la présidence du département. Le premier objectif est en partie rempli : la gauche arrive en première place de huit cantons, à savoir les sept déjà acquis et le bonus de Saint-Germain-du-Puy. Dans quatre territoires, dont Bourges-1, 2 et 3, les candidats du "Cher en commun" recueillent plus de 50% des votes, notamment Yann Galut à Bourges-1 et Hugo Lefelle à Bourges-3.
Ce dernier, chef de file des forces de gauche pendant ces élections, s'est réjoui de ces résultats, les qualifiant de "vrai satisfécit". Il souhaite désormais "poursuivre la mobilisation toute la semaine pour amplifier la dynamique" et tenter une victoire à l'échelle du département au deuxième tour. "Tout est toujours possible. Vu le fort taux d’abstention, ça se joue sur un nombre de votants assez faible", a estimé de son côté Pierre Dedet, candidat dans le canton de Bourges-4, arrivé deuxième derrière le duo de droite Fleury-Fenoll. Il reconnaît malgré tout que le basculement du Cher sera "très serré".
Dans plusieurs cantons, les résultats interpellent. Dans les deux de Vierzon, le traditionnel Parti communiste, inclus au pacte du "Cher en commun", arrive largement en tête. A Vierzon-2, les sortants Jean-Pierre Charles et Delphine Piétu empochent 55,23% des suffrages, et affronteront le RN au deuxième tour. Même adversaire pour Mélanie Chauvet et Franck Michoux sur Vierzon-1, qui obtiennent 44,37% des voix malgré la présente d'une liste Europe Ecologie-Les Verts face à eux. Les écologistes avaient aussi décidé de partir de leur côté à Chârost, face à une liste de la majorité sortante et une d'union de la gauche. La droite sort en première place d'une minuscule majorité (50,12%), avec le "Cher en commun" qualifié en deuxième (28,95%). Les 20,93% recueillis par EELV sont suffisants pour faire planer l'incertitude quant au résultat du deuxième tour dans ce canton.
3. Le Rassemblement national s'effondre
Malgré des ambitions criées haut et fort, le Rassemblement national a enregistré un revers incontestable ce dimanche 20 juin. Au niveau national, le RN a emporté 19,3% des suffrages aux régionales, contre 27,73% en 2015. Une défaite aussi constatée dans le Cher : sur les 14 binômes présentés par le parti, 10 ont été battus dès ce premier tour, et les quatre autres n'arrivent qu'en deuxième place, en ballotage (très) défavorable en vue du second tour. C'est le cas à Vierzon-1 et 2, Bourges-3 et Dun-sur-Auron.
Jean-René Coueille, délégué départemental du Rassemblement national, s'était présenté sur le canton de Saint-Germain-du-Puy. En 2015, il y avait empoché un tiers des voix au deuxième tour, contre des scores tournant autour de 15% dans le département en 2010. La progression a été coupée net cette année : Jean-René Coueille et sa binôme Véronique Pfister ne sont crédités que de 20,18% des voix dans le canton, et sont éliminés dès le premier tour.
"Ce sont des résultats décevants", a-t-il concédé au micro de France 3 Centre-Val de Loire : "Je pense qu’une bonne partie de nos électeurs ne s’est pas déplacée pour voter, notamment les plus défavorisés. Je les exhorte à aller voter au deuxième tour pour nos candidats encore en lice sur les quatre cantons."
Par rapport au vote de 2017, les plus abstentionnistes sont ceux qui avaient voté pour Jean-Luc Mélenchon (75%) et Marine Le Pen (71%). pic.twitter.com/vO4S4YyMq0
— Ifop Opinion (@IfopOpinion) June 21, 2021
Dans certains des dix cantons où il a été éliminé, le RN pourrait en revanche prendre le rôle de faiseur de roi, notamment dans ceux où la gauche est arrivée en tête avec une avance limitée. Ainsi, à Saint-Germain-du-Puy et Avord, additionner les voix du RN à celles de la droite permettrait de larges victoires à la majorité sortante. A La Guerche-sur-l'Aubois, les débats seront serrés : le binôme de gauche Bernadette Courivaud-Serge Méchin mène la danse avec 44,43% des voix, le reste étant dispatchés entre droite et Rassemblement national. En somme, le demi-succès pourrait se transformer en lourde défaite pour la gauche.