Projet de stockage des déchets nucléaires à Belleville-sur-Loire : où en est t-on ?

Le 13 février dernier, Reporterre dévoilait sur son site que l'ASN et EDF envisageaient la construction d’une piscine géante de déchets nucléaires à Belleville-sur-Loire. Entre opacité sur le dossier, écologie et choix définitif du lieu, où en est-on en mai 2018 ?

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C'est un dossier qui reste très sensible. Depuis l'article publié en février dernier par le site spécialisée Reporterre, le projet de stockage des déchets nucléaires, qui pourrait être accueilli par Belleville-sur-Loire dans le Cher, ne cesse de faire l'objet de débats houleux entre les élus de la région Centre-Val de Loire et l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et EDF, qui sont à l'origine du projet.

Et pour cause, comme, nous vous le mentionnions dans notre article du 16 février,  l'enquête de Reporterre évoque une capacité de stockage allant jusqu'à 8000 tonnes de métal lourd irradié, "l'équivalent de 69 à 93 cœurs de réacteur nucléaire de combustibles brûlants et hautement radioactifs." Le site accueillerait principalement un mélange d'uranium et de plutonium, appelé Mox. Sa particularité est de dégager une chaleur intense, même plusieurs années après sa mise en stockage, et de n'être jamais retraité, faute de moyen.

Hier, s'est tenue une table ronde organisée par le Sénat sur la gestion et le stockage des déchets radioactifs pour étudier les "grandes caractéristiques de sûreté, d'un tel équipement.  Franck Chevet, le président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a affirmé "avoir beaucoup entendu parler de Belleville aussi" mais que "le lieu n'a pas encore été formellement choisi". A également été précisé que le projet de piscine d'entreposage serait de "l'ordre d'une vingtaine de milliers d'assemblages" et aurait "une capacité un peu plus petite que la Hague"


Besoin de transparence

Si le projet soulève des questions délicates sur le plan écologique, il agace également les élus de la région par son opacité. En effet, ces derniers reprochent à l'ASN et EDF d'être tenus à l'écart de certaines discussions et pas être au coeur des décisions.

Interrogé par notre rédaction en février dernier, Patrick Bagot, le maire de Belleville-sur-Loire et président de la commision locale d'information (CLI), affirmait ne pas être au courant. "En tant que maire, je n'ai pas eu l'information. Qu'une piscine soit construite pour assurer un stockage temporaire avant le cheminement des déchets vers des sites de stockage, oui, le projet a été évoqué aux voeux de l'ASN. Mais le nom de la commune n'a pas été évoqué. Un projet comme celui-ci, il faudrait tout de même un dépôt de permis de construire, puis une enquête publique... ", expliquait-il, rappelant la procédure qui avait été mise en place lors de la construction de la centrale.

Depuis, l'édile a obtenu quelques éclaircissements à ses questions, qui restaient jusque-là en suspens "L’ASN m’a répondu que, aujourd’hui [16 mai], il n’y avait pas de projet à Belleville-sur-Loire. Le lieu n’a pas été choisi, et, tant qu’EDF n’a pas déposé de dossier, ils ne peuvent pas m’apporter plus de réponses".

Courrier de questionnement de la CLI à l'ANCCLI publié par france3centre


EDF justement, selon Patrick Bagot, lui aurait "renvoyé un document de deux pages, qui explique un peu plus en détail". Ils disent qu’il y a effectivement un projet, et qu’à ce jour le lieu n’a pas été choisi. Belleville est un lieu possible, mais il n’est pas le seul, plusieurs sites d’implantation sont possibles. On me dit aussi que des critères logistiques, techniques et de sécurité sont encore à prendre en compte."

Des réponses qui ont semble-t-elles rassuré, voire adouci, le maire de la commune du Cher, qui a depuis mis de l'eau dans son vin. "Je voulais en savoir plus avant de donner mon avis, savoir si ça fonctionnait. Je ne veux pas avoir des déchets qui durent des centaines d’années, prendre cette décision alors que je suis élu pour six ans… Si tout est conforme à la sécurité, et que ça ne présente pas plus de danger que la piscine actuelle…", justifie-t-il. Avant de poursuivre prudemment "mais je demande à ce qu’on me fasse voir comment ça fonctionne, à ce qu’on m’explique, tant pour la sécurité de mes habitants en tant que maire de Belleville que pour la sécurité en général en tant que président de la CLI".

En somme, Patrick Bagot ne s'oppose pas fondamentalement au projet. Il souhaite juste que l'infrastructure ne représente pas de danger pour la population de la région. "Ces points feront l’objet d’une saisine de la Commission Nationale du débat public, prévu d’ici à 2019. On m’assure également à plusieurs reprises que l’installation sera conçue 'pour n’avoir aucun impact sanitaire sur la population', y compris en cas d’accident, et que le projet se base sur des 'retours d’expériences internationales' récentes", ajoute-t-il. Pour ensuite conclure "les gens s’opposeront toujours à ce que l’on mette ce genre de piscine près de chez eux, ils vont vouloir l’envoyer ailleurs. Mais enfin, il va bien falloir qu’elle soit quelque part", conclut-il.

Opposition ferme de la Région

La Région, à travers la voix de son président François Bonneau, expliquait en février que "la région Centre-Val de Loire n’a pas vocation à devenir la poubelle nucléaire de la France". Une opposition ferme à l'éventuelle construction d'une piscine de stockage de déchets nucléaires dans le Cher. Le Conseil régional, symbolisée par le vote d'une motion en défaveur du projet de piscine d'entreposage de déchets nucléaires.. 

Enfin, EDF, qui n'avait pas donné suite à nos appels il y a trois mois, nous a répondu : "en effet, de nouvelles capacités d’entreposage seront nécessaires autour de 2030, et ce, quel que soit le scénario industriel de production d’électricité qui sera défini dans le cadre de la Programmation Pluriannuelle de l’Energie à venir. Ces capacités permettront d’entreposer ces matières jusqu’à leur réutilisation dans de futurs réacteurs ou bien, si cette option industrielle n’était pas confirmée, jusqu’à leur stockage définitif à Cigéo. En réponse à ce besoin, EDF travaille actuellement sur la conception d’une piscine d’entreposage et a transmis pour avis à l’ASN le dossier d’options de sûreté de cette installation en avril 2017. Conformément au PNGMDR, EDF prévoit le dépôt d’une demande d’autorisation de création d’ici 2020. Plusieurs sites sont actuellement à l’étude pour l’implantation de ce projet, aucune décision n’est prise pour le moment."

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