Opération "parachutage de camembert" à l'Assemblée nationale ! Non, ce n'est pas un coup des gilets jaunes, mais une opération du député du Loiret Richard Ramos et de l'association Fromages de Terroir pour protester contre la mise en danger d'un savoir-faire français
Le camembert au lait cru est-il un emblème de la France et de la République ? Pour Richard Ramos, député MoDem du Loiret, ça ne fait aucun doute. Pour protester contre la nouvelle Appellation d'origine contrôlée (AOP) du camembert de Normandie, qui doit entrer en vigueur en 2021, l'élu s'est associé à Véronique Richez-Lerouge, présidente et fondatrice de l'association Fromages de Terroirs pour une opération "parachutage de camembert".
La nouvelle bataille de Normandie
Ce mercredi matin, des camemberts sont distribués aux élus de l'Assemblée nationale. Le but de ce petit-déj' odorant ? Attirer l'attention sur l'élargissement de l'AOP Camembert de Normandie, prévu pour 2021 et dont l'élu et la militante estiment qu'il met en danger les petits producteurs au profit du géant Lactalis. Pour eux pas de doute, "au prétexte de régler un problème juridique", cette nouvelle appellation ouvrira "la porte à 60 000 tonnes de camemberts industriels".Camembert de Normandie, brie de Meaux, bleu d'Auvergne... Peut-on encore faire confiance aux fromages AOP ?https://t.co/6CEd7GHWDJ pic.twitter.com/n1eP1RxOih
— franceinfo plus (@franceinfoplus) 23 août 2018
En effet, l'accord négocié entre la multinationale et les producteurs laitiers devait mettre fin à une véritable "guerre du camembert" entre le fromage traditionnel et sa déclinaison industrielle, produite en masse par Lactalis. La nouvelle AOP mettra en place deux variétés de camembert censées mettre tout le monde d'accord : un "coeur de gamme", composé d'au moins 30% de lait issu de vaches normandes, et un camembert haut de gamme aux normes plus strictes et l'obligation d'utiliser du lait cru. Un élargissement qui fait craindre à Richard Ramos et Véronique Richez-Lerouge l'arrivée d'un "océan de fromages plâtreux" à bas prix, entre deux et trois euros, face auxquels le véritable camembert au lait cru ne trouvera plus sa place que chez les fromagers pour un coût bien plus élevé.
Camembert, croûte que croûte
"En théorie, la France défend ses AOP, mais dans les faits, elle ne fait que les enterrer" clament dans un communiqué les deux organisateurs. Même si le happening pourrait relever de la blague franchouillarde pour des yeux non avertis, l'enjeu n'est rien moins que "la destruction de l'emploi manuel", la "dégradation d'un symbole de la gastronomie" et le risque d'un glissement vers l'industrialisation d'autres AOP. Une situation paradoxale, où des fromages typiquement français se rapprocheraient de plus en plus des pâtes génériques et pasteurisées fabriquées Outre-Atlantique.Autre enjeu de taille, la construction, avec ce système de double gamme, d'un "mode de consommation à deux vitesse", entre un marché de luxe à base de produits authentique et un marché low cost, industriel. Symbole d'égalité républicaine, le camembert ? Peut-être bien, finalement.