Conséquence de l’épidémie de coronavirus et du confinement, les producteurs de fromages de chèvre, comme toute la filière agricole, ne peuvent plus vendre leurs produits. Le Centre-Val de Loire est la troisième région caprine de France, fournissant 60 % de la production nationale en AOP.
Valençay, Selles-sur-Cher, Sainte-Maure-de-Touraine, Pouligny-Saint-Pierre, crottins de Chavignol : les ventes des cinq AOP (appellation d'origine protégée) du Centre-Val de Loire ont été touchées de plein fouet par la fermeture des marchés.
“Après l'annonce du Premier ministre, on s’est retrouvés avec 90 % de notre volume non-vendu sur les bras”. Thibaut Gourinel est producteur de fromage de chèvre depuis 10 ans à Marcilly-sur-Maulne, en Indre-et-Loire. Dans sa ferme, les capacités de stockage sont de plus en plus limitées.
Impossible d’arrêter la production
La difficulté principale pour les éleveurs de chèvres, c’est évidemment l’écoulement des stocks. Pour Thibaut Gourinel et ses deux associées, impossible d’arrêter la production : il faut bien traire les 140 chèvres tous les jours. À cette période de l’année, les chèvres viennent de mettre bas et leur production de lait est très élevée. Il est d’ailleurs interdit de jeter le lait pour éviter toute contamination du sol.Alors pour tenter de faire face, des alternatives se mettent en place. Thibaut Gourinel multiplie les livraisons à domicile, qui se font connaître par le bouche à oreille, mais aussi sur Facebook et par le réseau La Ruche qui dit Oui. Et en cette période de confinement, l’éleveur peut également compter sur la solidarité de la filière agricole. “On a des copains éleveurs de vaches qui proposent nos fromages de chèvre à toute leur clientèle, en plus de leur colis de viande”, se réjouit-il. “Il y a une véritable entraide. C’est en faisant bloc et en trouvant des solutions ensemble qu’on arrivera à avancer.” Ce système D, c’est ce qui permet à la ferme de maintenir son activité. Du moins, pour le moment.
Le fromage de chèvre et la grande distribution
En Centre-Val de Loire, la filière caprine représente 650 exploitations qui fournissent 60 % de la production nationale en AOP. Une filière qui est “l’une des plus touchées par les effets du confinement”, selon Franck Moreau, président du CRIEL (Centre Régional Interprofessionnel de l’Economie Laitière Caprin du Centre), pour qui l’interdiction des marchés a été le “dernier coup de massue”. Cet éleveur caprin à Saint-Hilaire-en-Lignières (Cher) estime que les marchés représentent 70 à 90 % de l’activité commerciale de la filière.
Dès le début de la crise sanitaire, la vente des fromages de chèvre dans la grande distribution (GMS) a souffert, avec la fermeture de nombreux rayons de fromages à la coupe. Mais, jusqu’à la levée de l’interdiction des marchés, les producteurs locaux sont face à une dépendance économique de la grande distribution. “On nous demande de filmer les fromages pour les présenter préemballés en rayon”, explique Franck Moreau. “Les habitudes de consommation changent et on doit s’y adapter !”
Heureusement, certaines enseignes privilégient le local. Elles choisissent de commercialiser les produits des petites exploitations, avec qui elles n'ont pas l'habitude de travailler. C’est le cas, par exemple, de l’Intermarché à Sainte-Maure de Touraine qui a organisé une opération de soutien aux petits producteurs locaux.
Autre coup de pouce aux petits producteurs plombés par la crise sanitaire, la Région Centre-Val-de-Loire a lancé une plateforme qui centralise producteurs, distributeurs et consommateurs.
Pour soutenir les producteurs lors de nos achats, Franck Moreau lance un appel à la solidarité : “C’est le consommateur qui a la clé pour nous aider ! Certes, nous sommes tous confinés, mais il n’est pas interdit de se faire plaisir avec un met festif qu’est le fromage de chèvre. Je peux vous l’assurer, c’est un produit que l’on peut consommer avec confiance.”