Guillaume Kasbarian, député d'Eure-et-Loir a été nommé ministre du logement par le Premier ministre Gabriel Attal, jeudi 8 février. Une annonce qui passe mal auprès des associations de lutte contre la précarité.
"Nous n'avons plus les mots pour exprimer notre dégoût" sur le réseau social X, l'association Utopia 56 ne cache pas son malaise. Une réaction à la nomination, jeudi 8 février 2024, de Guillaume Kasbarian, comme ministre du logement.
L’homme qui rêve de mettre en prison celles et ceux n’arrivant plus à payer leur loyer devient ministre du logement.
— Utopia 56 (@Utopia_56) February 8, 2024
Nous n’avons plus les mots pour exprimer notre dégoût.
Un ministre pour les propriétaires et contre les précaires ?
Au cœur des inquiétudes des associations de solidarité, la paternité de la loi anti-squat du nouveau ministre et député d'Eure-et-Loir. Votée fin 2022, elle vise à "accélérer les procédures" d'expulsion au bénéfice des propriétaires. Elle avait alors concentré la colère des associations de lutte contre la précarité. La Défenseure des droits, en pleine crise sociale, s'en était aussi inquiétée, craignant un "détournement de procédures".
Kasbarian la brute : sans logis, mal logés et locataires hlm et privés sacrifiés !!
— Droit Au Logement (@federationdal) February 8, 2024
Il était conseiller en stratégie chez Deloitte, avant d être député, et désormais Ministre du délogement et des spéculateurs ...https://t.co/A8KIODVv54
C'est une déclaration de guerre aux locataires.
Eddie Jacquemart, président de la Confédération nationale du logement
Cette nomination prend alors des allures de "provocation" aux yeux de Pascal Brice, président de la fédération des acteurs de la solidarité, qui s'exprimait sur Franceinfo peut avant son officialisation. Au point de ne plus savoir s'il s'agit de "mépris" ou d'"inconscience" de la part du gouvernement Attal.
🗣️"Guillaume Kasbarian s'est battu pour que des Français qui ne peuvent pas payer leur loyer fassent des peines de prison." Pour Pascal Brice, président de la fédération des acteurs de la solidarité, la nomination du nouveau ministre du logement est "une véritable provocation". pic.twitter.com/eEFOWHCgmX
— franceinfo (@franceinfo) February 8, 2024
Le délégué général de la Fondation Abbé Pierre, Christophe Robert, a de son côté confié à l'AFP "espérer que le nouveau ministre délégué au Logement sera plus attentif aux souffrances des mal logés et aux difficultés que connaissent nos concitoyens en matière de mal-logement qu'il ne l'a été au moment où il a porté une loi qui a fait beaucoup de dégâts".
Invité à agir rapidement "pour lutter contre la ségrégation spatiale"
Emmanuelle Cosse, présidente de l'Union sociale pour l'habitat, choisit de son côté un message incitatif en direction du nouveau ministre : "Le choix des hommes et des femmes est un élément qui compte, mais nous attendons avant tout du nouveau ministre du Logement qu'il aille vite dans la mise en œuvre des décisions de la loi de Finances pour 2024 et qu'il pèse dans les arbitrages à venir. Nous attendons également de lui une décision claire : il ne faut pas dégrader les efforts entrepris depuis des années pour lutter contre la ségrégation spatiale. Il ne faut pas abîmer la loi SRU."
Une crainte exprimée par l'Union sociale pour l'habitat qui tient son origine dans le discours de politique générale de Gabriel Attal, le 30 janvier. Il propose alors d’intégrer la construction de logements intermédiaires dans le quota de 25% initialement consacré aux logements sociaux dans le cadre de la loi SRU de 2000. Le Premier Ministre affirme par la même occasion sa volonté de donner à la main aux maires, quant au choix de l'attribution des "nouveaux logements sociaux construits sur leur commune".
Des annonces qui, selon les associations, mettent en danger le principe du logement social et son accessibilité aux plus précaires.
Construire plus pour loger plus ?
Le président de la Fédération nationale de l'immobilier, Loïc Cantin, juge quant à lui que Guillaume Kasbarian "a montré une volonté, une action et un investissement forts", lorsqu'il a travaillé sur la loi anti-squat. "Les premières annonces du gouvernement fin janvier ne sont pas à la hauteur et ne répondent pas aux enjeux actuels", a également affirmé dans un communiqué l'Alliance pour le logement, rassemblement des organisations professionnelles du secteur.
Il est temps de mettre tous les moyens pour relancer, partout en France, la construction neuve et dynamiser la rénovation de logements
Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l'immobilier
Le nombre de permis de construire délivrés en 2023 a chuté de 23,7% à 373.100, alors que selon plusieurs fédérations professionnelles, il en faudrait plutôt autour de 500.000 par an pour résorber les besoins.