La municipalité de Tours a ouvert, vendredi 5 avril, un gymnase pour loger 15 adultes et 28 enfants qui n'avaient pas de solution de relogement depuis la fermeture d'un centre d'hébergement d'urgence temporaire. Entre-temps, le collectif "Pas d'enfant à la rue" occupait le Palais des Sports pour enjoindre la préfecture à prendre ses responsabilités.
Des lits de camps, des grandes tables et des petits barnums pour avoir un semblant d'intimité... Le matériel est sommaire, mais pour Flavie, "c'est comme le paradis quand on n'a plus le choix." Ivoirienne, cette jeune femme, fait partie des 15 adultes et 28 enfants qui sont accueillis dans le gymnase Racault à Tours. Pour elle, c'est un véritable soulagement d'avoir un toit sur la tête, même si ce n'est que pour un mois.
Comme elle, une quarantaine de femmes et enfants s'étaient retrouvés à la rue, le mardi 2 avril, après la fermeture du centre d'hébergement d'urgence ouvert par la préfecture en février pour accueillir 80 personnes. Après cette fermeture qui coïncide avec la fin de la trêve hivernale, aucune solution n'avait été proposée. C'est pourquoi un collectif composé de parents d'élèves, "Pas d'enfant à la rue", avait investi le dojo du Palais des Sports sans autorisation. Objectif : mettre à l'abri en urgence ces personnes.
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Depuis le début de la semaine, municipalité et préfecture communiquent sur les solutions à apporter. Si l'hébergement d'urgence est une compétence de l'État, et donc de la préfecture, c'est finalement la mairie de Tours qui est intervenue.
"On a été mis devant le fait accompli, relate Marie Quinton, élue chargée du logement et de la politique de la ville à la mairie de Tours. Les conditions au dojo ne garantissaient pas la sécurité et la dignité de ces personnes qui sont sans aucune solution de relogement. C'était un devoir d'humanité."
Une facture de 50 000 euros
L'utilisation du gymnase Racault pour loger ces familles se fait toutefois en dehors de tout cadre administratif, sans réquisition, mais également hors-budget. Car cette solidarité ne peut être gratuite : les services municipaux, la protection civile ainsi que l'association Entraide et solidarité (qui gère les repas) sont mobilisées. Et la facture est salée. Loger ces familles pendant un mois dans le gymnase coûtera 50 000 euros à la ville de Tours.
"On est en colère, car l’État est déficient sur le logement d’urgence, dénonce le maire de la Tours, Emmanuel Denis. On ne pouvait décemment pas laisser ces familles dehors, on parle de cinquantaine personnes. Mais budgétairement, cela va nous impacter lourdement."
Poursuivre l'État en justice ?
La municipalité envisage d'abord de déposer un recours gracieux pour que l'État prenne en charge les dépenses liées à ce relogement d'urgence qui vont incomber à la mairie, mais qui n'est pas de son ressort. Dans un second temps, Emmanuel Denis entend "faire les additions" et peut-être déposer un recours contentieux contre l'État, comme l'ont déjà fait cinq autres grandes villes françaises en février. Elles veulent ainsi dénoncer les carences du système d'hébergement d'urgence.
Le collectif "Pas d’enfant à la rue" n'a pas souhaité s'exprimer sur ce relogement des personnes dont ils laissent la gestion et l'accompagnement aux responsables politiques. Mais pour eux, il s'agit bel et bien d'une première victoire.