"On se bat pour notre survie" : des syndicalistes en grève à l'Opéra de Tours

Dénonçant un "dialogue social à l'arrêt", certains musiciens de l'orchestre symphonique de Tours menacent de faire grève tout le mois de décembre. Une mesure qu'ils ont appliqué ce samedi soir, puisque le concert programmé n'a pas eu lieu.

Coup de théâtre à l'Opéra de Tours (Indre-et-Loire). La musique de Beethoven, orchestrée par Vincenzo Milletarì et Jean-Baptiste Doulcet aurait dû résonner ce samedi 2 décembre au Grand Théâtre de Tours. À la place, un long silence et un public déçu.

"C'est extrêmement dur de prendre ce genre de décision... Ça nous brise le cœur." insiste Laura Perine, représentante du Syndicat tourangeau des artistes musiciens (STAM). Face à une salle comble, les 55 musiciens de l'ensemble ont laissé leur instrument au repos pour que certains d'entre eux réclament de meilleures conditions. Le silence, seule manière pour eux de se faire entendre.

"Hier le public était en colère, c'est un très mauvais signe qui est envoyé." déplore Christophe Dupin, adjoint à la mairie de Tours, délégué à la culture et aux droits culturels.

Hier soir, à 20h30 à l'Opéra, le public était confortablement installé en attendant son spectacle. Stef, un utilisateur de X ne cache pas son mécontentement sur les réseaux sociaux. "Ne venez pas chialer quand on fermera l'opéra !!!"

Les musiciens de l’orchestre symphonique ont donc mis à exécution leur appel à la grève, déposé pour le mois de décembre pour dénoncer la précarité grandissante de leur métier. Des mesures qu'ils revendiquaient déjà en juin 2023, où ils avaient également fait faux bond au théâtre de Tours. "On cherche à tout prix à éviter la grève, mais on en arrive à un stade où le collectif artistique pourrait disparaître." reconnaît la syndicaliste.

"On se bat pour notre survie."

"On est un peu écœuré et surpris." Christophe Dupin ne comprend pas ce retournement de situation, après avoir reçu le syndicat ce jeudi 30 novembre. Laura Perrine, répond que le préavis de grève avait bien été annoncé, et que leurs revendications n'ont pas été entendues.

Alors que la ville propose aux musiciens des CDI à temps partiel, la joueuse de hautbois, attend simplement qu'on leur demande leur avis. "On en est au point où on aimerait juste que l'employeur interroge les musiciens sur leur positionnement sur un CDI à temps complet. On craint de se voir imposer des temps partiels pour l'ensemble de l'équipe."

Pour l'instant, les musiciens sont en CDDU, des contrats à durée déterminée "d’usage", c'est-à-dire payés à la répétition et au concert, un statut qui ne suffit plus pour le syndicat. Laura Perrine explique que les conséquences d'un temps partiel engendreraient une paye en dessous du smic, et que la majorité de l'équipe devra refuser. "On en arrive à un stade où le collectif artistique pourrait disparaître si la mairie met en place ces temps partiels. On se bat pour notre survie." 

L'adjoint répond que l'embauche en contrat à durée indéterminée se fera étape par étape et que leur budget ne le permet pas actuellement. "Ça prend du temps, on n’a pas encore toutes les réponses. En janvier 2024, on s'engage à recevoir et rencontrer tous les musiciens pour examiner leur situation et leur faire des propositions." 

Cette grève n'apportera rien. Ça ne sert à rien. Il n'y aura aucune conséquence.

Christophe Dupin, adjoint à la mairie de Tours, délégué à la culture et aux droits culturels

Christophe Dupin ajoute qu'aujourd'hui, "la ville ne pourra rien apporter de plus", inquiet que la grève "casse la belle dynamique engagée auprès du public." 

Romain Brutinaud, élu de l'opposition de la ville de Tours a également fait part de ses regrets sur la plateforme X.

Une perte budgétaire

L'annulation d'une salle complète engendre une perte de 30 000€ de billetterie pour le théâtre. L'adjoint ajoute qu'il allait falloir "beaucoup de temps" pour rembourser. En ajoutant que cela impacte également le public. "Des gens prennent leur soirée, on essaie de faire venir des spectateurs d'autres villes de la région voire d'Île-de-France. Ils ont des frais de transport, certains prennent des nuits d'hôtel... C'est catastrophique pour l'image de l'orchestre." 

Hier soir, entre 6 et 13 concertistes étaient en grève sur les 55 musiciens présents. "Je leur ai demandé d'être patients, ils ne l'ont pas été et c'est extrêmement dommageable." La mairie avait pourtant promis, en avril 2023 examiner les statuts de chacun. "Une table ronde devait même être organisée fin novembre" ajoute Laura Perrine. Des mesures qui n'ont pas été respectées et qui expliquent ce mouvement de grève. Christophe Dupin maintient que "des dialogues sont ouverts dans la semaine qui arrive pour les grévistes et les musiciens qui le souhaiteraient." 

La cinquième de Beethoven doit de nouveau se jouer cette après-midi à 16h au Grand Théâtre de Tours. Reste à savoir si cette fois, la musique résonnera au sein de l'Opéra.

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