La précarité menstruelle concerne de nombreuses femmes. A l'initiative du planning familial de Tours, 8000 protections périodiques seront distribuées, jusqu'en août 2022. Le secours catholique est l'une des structures impliquées.
Dans le fond d’une petite cour, au 21 rue de la Fuye, à Tours, elles sont une dizaine de femmes, assises autour des tables, où elles trouvent un peu de chaleur. Certaines sont accompagnées de leurs enfants, d’autres trient leur linge à laver.
Seule, dans un coin, Rebecca tourne le dos aux autres. Cette jeune femme guadeloupéenne de 30 ans tapote sur un ordinateur. Il lui est arrivé de dormir dehors, raconte-t-elle, mais elle sait qu’elle peut venir ici, au secours catholique.
Elle vit à Tours depuis un an, et cherche du travail et un logement : "C’est ma priorité, j’ai un fils de 14 ans. Le plus important, bien sûr, c’est de le nourrir. Ensuite, j’achète pour moi, souvent des serviettes de mauvaise qualité, les premiers prix."
Je n’ai pas les moyens d’acheter des tampons même si c’est ce que je voudrai.
Rebecca
Sylvie ajoute "qu'il faut prévoir les paquets de serviettes en avance, le 10, je touche l'argent du mois. Du coup, je dois anticiper. Comme j'ai peu de ressource, j'ai recours à des stratégies telles qu'alterner des couches de papier toilette sur la serviette hygiénique pour éviter d’en acheter de nouvelles."
La semaine dernière, Ruth a rencontré des femmes du planning familial. "J'étais contente de pouvoir parler avec elles, car dans ma culture, c'est tabou. En plus, elles m'ont donné une culotte lavable, c’est confortable."
C'est incroyable, j'ai appris qu'entre les protections, les médicaments pour éviter de souffrir, et les arrêts de travail, chaque femme dépense par an de 1700 à 3 000 euros.
Ruth
Règles douloureuses, voire hémorragiques, pour Anaëlle, chaque mois, c’est le même problème. La jeune femme de 38 ans explique "acheter des tampons, impossible même à un euro le paquet à la banque alimentaire, je ne peux pas."
Comme Rebecca, Ruth, ou Anaëlle, elles seraient 1,7 million en France, à subir la précarité menstruelle. Une jeune femme sur six, de 18 à 25 ans, renonce également à changer de protection aussi souvent que nécessaire.
Pour la Touraine, l'état a mis 22 000 euros à disposition pour sensibiliser sur ce problème. La coordinatrice du planning familial, Marielle Thomine précise "que lorsqu’on est vraiment précaire, le souci principal, est de trouver où laver, où faire sécher les protections. Pour nous, l’important, c’est d’être présentes avec plusieurs solutions. Les femmes rencontrées se posent beaucoup de questions."
Ces distributions sont parfois l’occasion de lever les interdits, d’informer sur les règles, et les moyens de contraception.
Marielle Thomine
Selon la déléguée aux droits des femmes d’Indre-et-Loire, Marie Roussel-Stadnicki, il y a une inégalité criante. Les hommes et les femmes reçoivent la même allocation chaque mois pour leur hygiène intime. Pourtant, le budget pour un homme est vraiment incomparable.
D’autres actions sont en cours de réalisation : le planning familial de Tours avec la nuitée, un refuge pour les femmes à la rue, les maraudes de la croix rouge ou encore le centre d'accueil de demandeurs d'asile de Joué-lès-Tours.
La prochaine sera le samedi 5 mars à la bibliothèque de Saint-Paterne-Racan dans le cadre du festival femmes en campagne. Des initiatives à saluer, encore bien loin, de ce qui se pratique en Écosse, seul pays du monde à avoir rendu les protections périodiques gratuites.