Après un mois de tractations, un projet d'achat de terres par une association évangélique tzigane est tombé à l'eau. Les 262 hectares concernés resteront des terres agricoles.
Le feuilleton aura tenu la Brenne en haleine tout le mois d'avril. Le 30 mars, la Nouvelle République dévoilait le projet d'achat par l'association Vie et Lumière d'un terrain de 260 hectares dans l'Indre, entre les communes de Ruffec, Belâbre et le Blanc.
L'idée venait des autorités : en effet la Mission évangélique organise chaque été depuis une soixantaine d'années sa convention mondiale, qui attire jusqu'à 30 000 personnes et 6000 caravanes sur des terrains prêtés par l'État pour deux semaines de prières et de communions. Devant l'affluence croissante de pélerins, les autorités ont donc incité l'association à faire l'aquisition d'un site permanent.
Recherche grand terrain pour 6000 caravanes
Problème : le terrain est utilisé par des exploitants agricoles. Et, tout comme les élus locaux, ils voient d'un mauvais oeil la tenue de la convention de Vie et Lumière. D'autant plus que tous semblent découvrir le projet d'achat, fin mars. "On n'a pas du tout été informés", déplore Edith Vauchard, maire de Ruffec. Manque d'infrastructures, problèmes de sécurité, l'ampleur de l'événement inquiète. "Est-ce qu'on a pensé aux conséquences que pouvait avoir le fait d'accueillir 30 000 personnes sur ce terrain ?"Du côté des agriculteurs, on grince des dents devant la perte de ces terres louées par plusieurs exploitants. "Notre rôle, c'est de s'opposer aux projets qui consomment du terrain agricole sans apporter de développement par ailleurs", explique Robert Chaze, président de la Chambre d'agriculture de l'Indre. Agriculteurs, riverains, élus : tous se défendent de la moindre hostilité envers l'association tzigane. Seulement voilà : hors de question de laisser partir ces terres trop rares.
En 2018, la convention avait réuni 30 000 personnes à Chaumont, en Haute-Marne
Une contre-proposition solide
Devant la levée de boucliers, le propriétaire danois du terrain, l'investisseur Jens Denisen, a accordé quinze jours aux agriculteurs pour s'aligner sur l'offre de 1,7 million d'euros pour la totalité du terrain de quelque 262 hectares, soit près de 6500 euros par hectare. "On n'a pas perdu de temps, d'autant qu'il fallait monter un projet agricole viable", note Robert Chaze. De fait, la contre-proposition prévoit le rachat des terres par plusieurs agriculteurs ainsi que la communauté de communes du Blanc, et l'installation d'un jeune exploitant.De son côté, Vie et Lumière a jeté l'éponge fin avril. Invoquant "l'opposition" soulevée par le projet, l'association a notifié par mail le propriétaire du terrain de l'abandon du projet. "Nous sommes des chrétiens évangéliques et nous ne voulons pas nous imposer de force sur un département qui nous refuse", a expliqué l'association, qui renonce à s'implanter dans la Brenne.
De leur côté, les acheteurs et leurs partenaires vont devoir aligner les fonds nécessaire à l'acquisition du terrain, qui semble en bonne voie. Véritable gagnant de l'affaire : le propriétaire, qui va vendre son exploitation bien au-dessus du prix du marché.