Alors que plus de la moitié des Français sont opposés à la chasse, certains passionnés veulent redorer le blason de cette activité, notamment en Sologne.
Animaux achevés par des veneurs dans des jardins, nuisances, intrusions, accidents de chasse dramatiques : les chasseurs, "premiers écologistes de France", comme ils se surnomment, n'ont plus vraiment la cote. En cause, une sensibilisation de plus en plus forte de la population aux questions du bien-être animal et une remise en question du caractère immuable de ce loisir.
Depuis quelques années, pourtant, le monde de la chasse essaie de redorer son blason. Outre les pressions politiques de la puissante Fédération nationale des chasseurs sur les candidats à l'élections présidentielle, l'enjeu est aussi de briser une image masculine et vieillotte et de rendre la chasse compatible avec les préoccupations contemporaines. Sur les réseaux sociaux, ce créneau a été pris d'assaut, notamment sur Instagram où les "influenceuses chasse" sont désormais bien installées et font la promo de leur passion, photos d'armes à feu et de dépouilles animales à l'appui.
Vers une chasse "responsable, passionnée, respectueuse"
"Rectifier le tir", c'est aussi le but que se sont donnés Montaine et Loup Vanier, les enfants du réalisateur Nicolas Vanier qui ont grandi en Sologne. Lancé au début de l'été, leur site Tuchassou vise à promouvoir une chasse "jeune, féminine, responsable, passionnée, respectueuse". Leur service de mise en relation entre chasseurs et territoires propose des chasses entre 20 et 250 euros la journées, en mettant l'accent sur le caractère "raisonné" et "authentique" de ces expériences de chasse. Loin de la "chasse engrillagée" qui gangrène le territoire solognot, et dont les tableaux impressionnants finissent souvent aux ordures, Loup Vanier avance l'importance de préserver "la bonne santé des milieu" et ne ne tuer (ou "prélever", dans le jargon), "seulement ce qu'on va manger".
"La chasse, ce n'est pas que le tir", explique Montaine Vanier, qui précise qu'elle-même n'est pas chasseresse, au sens où elle ne porte pas d'arme, mais partage cette "passion de la nature". "C'est aussi le fait d'observer, d'écouter, d'explorer, de manger ensemble. C'est aussi des moments d'adrénaline, quand on entend les chiens s'exciter ou qu'on sent que le gibier est proche. On a déjà passé des soirées entières au mirador, juste à observer les animaux." Loin de la "chasse commerciale" et de ses animaux nourris et élevés en enclos, Tuchassou met en avant son "éthique" et garantit la libre circulation du gibier sauvage ainsi que le sérieux de ses hôtes.
Entre chasseurs et population, une fracture à réduire
Pourtant, la fratrie Vanier a du pain sur la planche pour réparer les relations entre chasseurs et non-chasseurs. Selon un sondage Ipsos du 16 septembre dernier, seul un Français sur cinq est favorable à la chasse, un chiffre stable depuis 2018. Mais contrairement au cliché qui voudrait que les urbains, éloignés des réalités de la campagne, seraient les critique les plus virulents de la chasse, c'est en réalité parmi les ruraux que les arguments anti-chasse progressent le plus.
Qu'il ou elle possède des animaux domestique, ou apprécie simplement prendre l'air pendant la saison, près d'un rural sur deux (47%) est opposé à la chasse, un chiffre en hausse et qui se rapproche du résultat des urbains (52%). Enfin, 76% des Français habitant près d'une zone de chasse ont déjà renoncé à se promener en forêt par peur d'un accident. Parmi les personnes sondées, 4 se disent chasseurs, soit "un pourcentage inférieur à 1%" précise l'institut.
Face à cette défiance, Tuchassou a la réponse sous la forme d'une charte, qui demande à ses participants, chasseurs comme non-chasseurs, de respecter les autres usagers de la nature ainsi que le territoire sur lequel ils sont accueillis. "Notre vision, c'est que porter une arme impose plus de devoirs que de droits", insiste Montaine Vanier. "La nature est super grande, il y a de la place pour tout le monde." La charte précise également que "ne pas tirer est aussi un acte de chasse. Le prélèvement d’un animal et son trophée comptent moins que sa quête" et impose le respect de l'animal "prélevé", en évitant de le laisser souffrir inutilement et d'en poster les photos sur les réseaux sociaux.