Après deux suicides à la sortie de l’unité psychiatrique de l’hôpital de Romorantin, des familles s'unissent pour porter une action en justice

Entre mars 2022 et avril 2024, deux personnes, R. D., et Liliane Létoille, se suicident après avoir quitté l’unité psychiatrique du Centre Hospitalier de Romorantin “trop rapidement” selon leur famille respective. Tous deux avaient été internés à la suite de pensées et envies suicidaires avant d’être libérés peu de temps après leur internement.

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Le 2 avril dernier, Liliane Létoille, 84 ans, s’ôte la vie chez elle, dans le village du Controis-en-Sologne, dans le Loir-et-Cher. Six jours plus tôt, le 27 mars, son mari mourrait brutalement en laissant derrière lui sa femme et leurs souvenirs de 67 ans de mariage. Le jour-même du décès de son époux, l'octogénaire manifeste des envies suicidaires et est amenée aux urgences du Centre Hospitalier de Romorantin.  

Seulement, après 48h, la mesure de soins psychiatriques pour péril imminent, c’est-à-dire une hospitalisation sans consentement, n’est plus à l’ordre du jour. Liliane revient donc chez elle et retrouve son chien. Mais quatre jours plus tard, elle passe définitivement à l’acte. 

Un geste dramatique qui hante désormais les esprits de ses deux enfants. “Ils se remettent difficilement. Leur mère était en parfaite santé… Ils sont dans l’incompréhension et la colère” affirme Me Corentin Delobel, avocat des enfants de Liliane Létoille. 

Idées noires, séjour éclair au Centre Hospitalier de Romorantin, suicide dans la foulée… Ce scénario fait écho à celui qu’a vécu Corinne Barret, habitante de Bourré dans le Loir-et-Cher, deux ans plus tôt avec son fils, R.D. 

L'histoire similaire d'un homme qui s'est suicidé à 32 ans

Début mai 2022, R. D., 32 ans, père de famille, se sépare et verbalise une fois de plus l’idée d’en finir. Quelques jours plus tôt, le trentenaire avait déjà tenté de mettre fin à ses jours, sauvé in extremis par les gendarmes. Sur demande du procureur de la République de Blois, il est alors interné à l’hôpital de Romorantin le 3 mai 2022. 

Seulement, dès le lendemain, l’hôpital libère l’homme suite à un imbroglio administratif, mais le réinterne rapidement après plusieurs messages suicidaires envoyés par R. D. à ses proches. 

L’histoire se répète. Un peu plus de 48h plus tard, l’hôpital rappelle sa mère. “Votre fils sort demain”, se souvient encore surprise Corinne Barret. 

Contacté, un infirmier syndiqué du Centre Hospitalier nous affirme que l’admission comme la sortie de patients vulnérables sont soumises à une procédure stricte : mesure de la stabilité psychique, évaluation du risque suicidaire, prise en compte de la sphère sociale. Les feux sont au vert, R. D. est donc de nouveau libéré avec, cette fois-ci, une ordonnance de Tercian, un anxiolytique puissant souvent prescrit lors de lourdes dépressions. 

Mais le 11 mai, soit 8 jours après son premier internement, le père de famille ingurgite en nombre les médicaments prescrits et décède d’une overdose dans sa voiture. “J’ai jamais eu un appel de l’hôpital. Rien, rien!” déplore encore aujourd’hui Corinne Barret. 

“L’année 2022 a été très très dure. Je remonte la pente que maintenant” confie Corinne Barret. 

Une action judiciaire commune aux deux drames lancée

Dans ces deux drames, une plainte est déposée. Corinne Barret n’a pas de nouvelles de la sienne. Celle de Me Corentin Delobel, avocat des enfants de Liliane Létoille, a été classée sans suite par le parquet de Blois une semaine après son dépôt. “Je suis très surpris que le procureur soit aussi rapide à classer une telle affaire” s’étonne Me Delobel. Dans son avis de classement, le parquet stipule que "les faits dénoncés (...) ne sont pas punis par un texte pénal".

“Le parquet décide si oui ou non il y a des faits qui supposent une poursuite. Visiblement, il estime que non. Mais nous, on estime que oui, explique Me Delobel. 

Il y a des négligences, des infractions pénales qui peuvent être retenues, notamment la non-assistance à personne en danger. C’est pourquoi, nous allons nous constituer partie civile auprès du doyen des juges d’instructions pour qu’une information judiciaire soit lancée”

Maître Delobel, avocat des enfants de Liliane Létoille

Une nouvelle action judiciaire à laquelle Corinne Barret va se joindre. “Je crois que plus on sera nombreux, mieux c’est” espère Corinne Barret. “Ça ne les fera pas revenir, mais faut que ça s’arrête ce genre de chose. À un moment donné : STOP !”.

En parallèle, Me Delobel intente pour les héritiers de Liliane Létoille une procédure civile contre l’établissement hospitalier au regard du préjudice subi. 

Contactée, la direction de l’hôpital de Romorantin n'a pas donné suite à nos sollicitations par mail comme par téléphone. 

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