L'association Adelico a déposé un référé liberté contre l'arrêté pris par la préfecture de Loir-et-Cher, pour encadrer la venue d'Emmanuel Macron à Vendôme ce mardi 25 avril. Elle dénonce un détournement des dispositions de la loi anti-terroriste de 2017.
Les images ont fait le tour des réseaux sociaux la semaine dernière, le jeudi 21 avril lors de la visite d'Emmanuel Macron dans l'Hérault. Les manifestants se sont vu confisquer leurs casseroles par la gendarmerie. En cause, un arrêté préfectoral précisant une "interdiction des dispostifs sonores amplificateurs de son".
Emmanuel Macron continue ses visites dans l'Hexagone et sera ce mardi 25 avril à Vendôme, en Loir-et-Cher, sur le thème de la santé. En conséquence, le préfet a pris, la veille, un arrêté. Avec, à nouveau, un périmètre de sécurité instauré autour du président, qui permet de fouiller les sacs, d'y interdire les dispositifs sonores, et même les "cortèges, défilés et rassemblements revendicatifs". Le tout sous couvert "de prévention d'un acte de terrorisme".
"Empêcher les citoyens d'approcher le chef de l'État"
Une justification qui, comme dans l'Hérault, a fait bondir l'Association de défense des libertés constitutionnelles (Adelico). L'un de ses membres, Serge Slama, professeur de droit public à l'université de Grenoble-Alpes, dénonce un "détournement des périmètres de protection anti-terroristes" :
La loi SILT, du 30 octobre 2017, a prévu la possibilité de créer des périmètres de protection, en précisant que la finalité était de lutter contre le risque terroriste. Sauf que des rapports d'application de la loi ont constaté qu'il est assez fréquent que les préfets détournent les périmètres de protection pour adopter des mesures d'ordre public général.
Serge Slama, professeur de droit public
Pour Serge Slama, l'interdiction de manifestation ou des dispositifs sonores au sein du périmètre constitue "un détournement de la finalité de ces périmètres car cela ne représente aucun risque terroriste quand on manifeste ou qu'on amène un porte-voix".
Ces dispositions constituent simplement, selon lui, un moyen d'"empêcher les citoyens d'approcher le chef de l'État pour protester". Une dérive autoritaire ? "Oui, mais qui n'est pas inhérente à Emmanuel Macron, mais à une dérive des institutions de la Ve République", confie le juriste à France 3.
Atteinte grave à une liberté fondamentale
Les avocats de l'association ont par ailleurs déposé, à 23h ce lundi, quelques heures après la publication de l'arrêté, un référé liberté. Un tel texte peut être déposé "en cas d'urgence si une décision administrative porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale (liberté de réunion, liberté d'expression, droit de propriété, etc.)", selon la définition de servicepublic.fr.
Une audience est prévue au tribunal administratif d'Orléans ce mardi à 13h, juste à temps pour le début de la visite d'Emmanuel Macron... à 13h30.
Mise à jour 16h45 : L'avocate Marion Ogier, membre du conseil national de la Ligue des Droits de l'Homme, a annoncé sur Twitter que le tribunal administratif d'Orléans avait finalement suspendu l'arrêté pris par le préfet de Loir-et-Cher.
Le tribunal conclue "qu'un périmètre de protection ne peut être institué [...] qu’aux fins d’assurer la sécurité d’un lieu ou d’un événement exposé à un risque d’actes de terrorisme à raison de sa nature et de l’ampleur de sa fréquentation. En l’absence de circonstances particulières, un déplacement du président de la République ne saurait être regardé comme justifiant à lui seul, par sa nature, l’instauration d’un périmètre de sécurité".