Loi immigration : "nécessaire" ou "faillite morale", les députés du Centre-Val de Loire plus divisés que jamais

L'adoption de la loi immigration révèle l'immense fracture au sein des parlementaires de la région. Si certains jugent la loi "nécessaire pour protéger les Français", d'autres y voient "une capitulation en rase campagne" face à l'extrême droite.

"Ce vote m'oblige", la formule en forme de promesse prononcée par Emmanuel Macron au lendemain de sa réélection pour faire "barrage" au Rassemblement national vient-elle d'être sacrifiée sur l'autel du projet de loi immigration ? 

Ce 19 décembre, le texte a été adopté à l'Assemblée nationale après une semaine de confusion et au prix d'importantes concessions avec les propositions des Républicains et du RN.

Au lendemain du vote, la Chambre est plus divisée que jamais. Le Rassemblement national parle de "victoire idéologique" tandis qu'à gauche, La France insoumise dénonce une loi "raciste, xénophobe et inhumaine".

Au sein de la majorité présidentielle, plus encline à voter favorablement les textes du gouvernement pour ne pas l'affaiblir, la division règne aussi. Près d'un quart des députés a voté contre le projet de loi ou s'est abstenu, un fait inédit depuis la première élection d'Emmanuel Macron en 2017.

Plusieurs ministres ont également menacé de démissionner si le texte de loi était adopté. Ce 20 décembre, le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, est passé à l'acte et a quitté le gouvernement.

"Une faillite morale d'Emmanuel Macron"

À l'image de cette fragmentation du champ politique, le vote des députés de la région Centre-Val de Loire est un parfait miroir des divisions nationales : à droite et à l'extrême droite, les parlementaires ont choisi le "pour" et à gauche, le "contre". 20 % des parlementaires du centre et de la majorité ont voté contre, ou se sont abstenus.

Parmi eux, Caroline Janvier, la députée Renaissance du Loiret, qui a voté contre : "Ce texte, tel qu'il a été adopté, est très éloigné de la version proposée par le gouvernement. Les concessions sont trop importantes", fustige-t-elle.

Parmi ces renoncements, la députée cite le durcissement de l'obtention des aides au logement qui "ouvre la porte à une vision d'extrême droite" ou encore "le durcissement de l'obtention du visa pour les étudiants étrangers".

Des concessions auxquels peuvent être ajoutés la réforme de l'aide médicale d'État, le rétablissement du délit de séjour irrégulier, le durcissement du regroupement familial ou encore la mise en place de prestations sociales différenciées. Des mesures qui mettent au goût du jour "une préférence nationale déguisée", selon l'économiste Antoine Math, un thème historiquement cher à Jean-Marie Le Pen et à sa fille Marine.

"Un moment de bascule"

"C'est une faillite morale d'Emmanuel Macron", attaque Charles Fournier, le député EELV d'Indre-et-Loire. "Le président ne supporte pas de perdre. Alors, plutôt que de retirer le texte, il a été prêt à tout pour le faire passer", analyse-t-il.

C'est la fin de la macronie, car elle n'a pas su résister aux thèses racistes du Rassemblement national. C'est une tache indélébile.

Nicolas Sansu, député PCF de la 2e circonscription du Cher

Les critiques sont tout aussi vigoureuses du côté de son homologue communiste, Nicolas Sansu. Le député du Cher voit dans l'adoption de cette loi, "un moment de bascule, une capitulation en rase campagne contre tous les humanistes". Selon lui, "la répression ne règle rienil est nécessaire d'améliorer la politique d'accueil pour mieux intégrer les étrangers" en France.

"Un texte attendu par les Français"

Du côté du vote "pour", le discours est sensiblement différent. "J'assume d'avoir voté ce texte qui était attendu par les Français et qui est important pour la France", explique François Cormier-Bouligeon, le député Renaissance du Cher. Qu'importe si les différents sondages de ces dernières années placent l'immigration en sixième position des priorités des Français. "C'est un texte mesuré, à la fois répressif et humaniste", défend-il.

Nous allons régulariser des milliers de travailleurs clandestins dans des métiers en tension. Nous l'inscrivons dans la loi et c'est une première. Avant, cela se faisait avec des circulaires.

François Cormier-Bouligeon, député Renaissance du Cher

Du côté du député RN du Loiret, Thomas Ménagé, on reconnaît une loi "qui va dans le bon sens" tout en justifiant un texte "clairement insuffisant". Les députés du parti de Marine Le Pen avaient pourtant juré ne pas voter une loi permettant de régulariser des clandestins. "C'est vrai ! Mais, quand on fait de la politique, on regarde le coût "risque avantage". La mesure a été améliorée par rapport au texte initial, ce n'est plus un blanc-seing."

Des mesures anticonstitutionnelles ? 

Désormais, les yeux sont rivés vers le Conseil constitutionnel qui pourrait censurer un certain nombre de dispositifs, comme l'a confirmé Élisabeth Borne. Ce 20 décembre, sur France Inter, la Première ministre a fait part de ses "doutes" et n'exclut pas de devoir "revenir" sur certaines mesures. Les sages ont désormais un mois pour rendre leur décision. Nul doute qu'elle sera particulièrement attendue.

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