Législatives 2022 : le recours de Jean-Michel Blanquer sur la 4eme circonscription du Loiret pourrait avoir des chances d’aboutir

Après son élimination au premier tour sur la quatrième circonscription du Loiret, Jean-Michel Blanquer a annoncé son intention de déposer un recours. L’ancien ministre de l’éducation nationale accuse Bruno Nottin, le Candidat Nupes-PC, d’avoir "violé plusieurs règles électorales pendant la campagne."

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L'ancien ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer (LREM), éliminé dimanche dès le premier tour des élections législatives dans la 4e circonscription du Loiret, a annoncé lundi vouloir déposer un recours.

Arrivé en troisième position avec 18,89% des suffrages, derrière Bruno Nottin, candidat de la Nouvelle union populaire écologique et sociale (19,43%) et Thomas Ménagé, du Rassemblement national, qui arrive en tête avec 31,45%, seulement 189 voix séparent l'ancien ministre du candidat de la Nupes, le privant de l'accession au second tour.

"Le candidat Nupes dans ma circonscription se comporte de façon scandaleuse en permanence, sa violence verbale est extrême, il m'a attaqué à plusieurs reprises de manière inacceptable", a déclaré l'ancien ministre au micro de BFMTV. "Je ferai un recours juridique sur cette élection parce que le candidat qui est passé devant moi à 180 voix, c'est-à-dire très peu, a violé plusieurs règles électorales pendant la campagne."

Des pubs Facebook Sponsorisées

Parmi les irrégularités présumées, Jean-Michel Blanquer dénonce "des posts Facebook sponsorisés vers les électeurs", faisant référence à une publicité de soutien à Bruno Nottin dans laquelle on peut voir le candidat Nupes face à son adversaire LREM.

Si cette publicité fait monter au créneau Jean-Michel Blanquer, c’est parce que le code électoral stipule bien que "Pendant les six mois précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, l'utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle est interdite." Hors, comme nous avons pu le constater sur la bibliothèque publicitaire de Meta (Nouveau nom de Facebook), cette pub ciblée a été mise en ligne du 7 au 13 mai 2022, soit 5 jours avant le scrutin.

« Les posts sponsorisés sont aussi considérés comme de la publicité » précise Maître Louis Le Foyer du Costil, avocat spécialisé en droit électoral à Paris. "La question c’est: est-ce qu’ils ont influencé la sincérité du scrutin ?" Selon les données partagées par Facebook, la publication a touché entre 100 et 500 mille personnes et a été vue entre 1000 et 2000 fois, "et comme l’écart de voix est faible, 180 voix, ça peut se défendre", concède l’avocat en droit public.

Bruno Nottin a affirmé sur France info n’avoir "rien à voir avec cette sponsorisation", et même si, sous la publication, un lien renvoie sur la page du PCF du montargois où le candidat Nupes fait campagne, la publicité ne vient effectivement pas de la page du candidat. Elle a été postée par "Soutien à la Nupes", qui se présente comme un "compte non officiel de soutien et d'infos sur la Nouvelle Union Populaire Ecologique et Sociale". "Ca n’a pas d’importance", explique l’avocat. "Un recours n’est pas dirigé contre une personne mais contre une élection. S’il tombe 20 cm de neige le jour de l’élection et que personne ne peut aller voter, un recours peut être déposé. Ce n’est de la faute de personne, ou ça peut être de la faute d’une personne extérieure au scrutin et pourtant, cela peut entrainer l’annulation d’une élection."

La Venise du Gâtinais transformée en Ibiza

Autre grief soulevé par Jean-Michel Blanquer : la venue à Montargis du "collectif Ibiza", un groupe militant EELV, fondé par Pauline Rapilly-Ferniot, conseillère municipale écologiste à Boulogne-Billancourt et candidate dans les Hauts-de-Seine. Le collectif est connu pour ses actions potaches menées par un sosie de Jean-Michel Blanquer qui n’est autre que Nour Durand-Raucher, élu EELV à Paris. L’élu écologiste se plait en effet à jouer régulièrement de sa ressemblance avec l’ancien ministre pour mieux critiquer son bilan politique.

Le 27 mai, il était effectivement à Montargis accompagné du collectif Ibiza et a dansé dans les rues au son de "Vamos à la playa" jusque devant la permanence du vrai Jean-Michel Blanquer. "C'est interdit (..) de faire venir des gens pour me parodier et éditer des tracts qui imitent mes tracts", s’est insurgé dans les médias l’ancien ministre de l’éducation nationale, en référence à un tract parodique distribué par son sosie au cours du happening.

Ce jour-là pourtant, Jean-Michel Blanquer affirmait sur France Inter ne pas s’offusquer de la venue de son sosi : "L’esprit satirique français c’est important. Quand j’ai défendu Charlie Hebdo c’est parce que je pense que la liberté d’expression passe aussi par la liberté de se moquer." Expliquait-il au micro de nos confrères. Si depuis, son discours semble avoir quelques peu évolué, "rien n’interdit de faire une parodie", explique maitre Le Foyer du Costil. "Cependant, s’il y a eu une manœuvre pour tromper les gens, c’est-à-dire leur faire croire que c’était le vrai Jean-Michel Blanquer et que ses propos étaient injurieux, cela peut être un argument pour un recours. Mais J’ai vu les vidéos et on voit bien que ce n’est pas lui. C’est fait de façon marrante et si le but est juste de convaincre que Jean-Michel Blanquer n’est pas un bon candidat, on a le droit."

"On voit bien que c’est humoristique"

Le conseil constitutionnel pourrait également estimer que le faux tract distribué par le sosie prête à confusion et a influencé le scrutin. Le document reprend effectivement les codes de la communication du groupe LREM (typographie, couleurs..) ainsi que le slogan du groupe "Ensemble !", mais ne comporte ni le logo LREM ni le nom de Jean-Michel Blanquer. A la place, une photo du sosie renommé pour l’occasion "Jean-Michel Planquer" et une liste parodique des mesures de l’ancien ministre de l’éducation nationale.

Les sages avaient déjà annulé une élection législative dans le territoire de Belfort en 2017 après la distribution de 10 000 faux tracts. Mais à Montargis, le document n’a été partagé que peu de temps, au cours du happening. "On voit bien que c’est humoristique", estime Maitre Le Foyer du Costil. "Et si ça a été fait juste pour l’action, que ça a été distribué à très peu d’exemplaires, ça fait plof ! Mais si ça été distribué de façon massive et que, quand on lit le tract, on ne comprend pas que c’est une blague, là il y a un problème."

Pour l’expert en droit électoral, seul l’argument des publicités sponsorisées pourrait donc faire invalider le scrutin: "Comme l’écart de voies est faible, si Jean-Michel Blanquer devait gagner son recours, ce serait là-dessus. Le reste par contre ne tient pas du tout à mon sens. Mais encore faut-il arriver à prouver que ces publicités lui ont fait perdre le nombre de voix nécessaires à sa qualification au second tour."

Comment se passe un recours devant le conseil constitutionnel ?

L'élection d'un député peut être contestée devant le Conseil constitutionnel par un candidat mais aussi par un tout électeur d’une circonscription. Le recours est ouvert jusqu'au dixième jour suivant la proclamation des résultats de l'élection, au plus tard à dix-huit heures. Le Conseil constitutionnel a la possibilité de rejeter immédiatement toute requête qui lui paraitrait irrecevable ou fondée sur des griefs manifestement sans influence sur le résultat de l'élection. Mais il peut aussi décider d’annuler l’élection (cela est déjà arrivé 70 fois depuis 1958) ou de modifier les résultats et de proclamer élu un autre candidat, mais jusqu’à ce jour, cela n’a jamais été fait pour une élection législative.

En cas d’annulation de l’élection, aucun recours n’est possible. Une élection législative partielle doit être organisée et rien ne garantit à la personne dépositaire que le nouveau scrutin lui sera plus favorable. En d’autres termes, même si le recours de Jean-Michel Blanquer réussit à provoquer une élection partielle sur la 4eme circonscription de Montargis, l’ancien ministre n’est pour autant pas certain de faire un meilleur score ni de l’emporter.

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