Emmanuel Macron a été chahuté ce samedi 24 février pour l'ouverture du Salon de l'agriculture 2024. Le président a tenté de répondre à la colère des agriculteurs et a notamment annoncé l’instauration de prix planchers pour mieux rémunérer les producteurs. Pas de quoi faire retomber le mécontentement de certains exploitants.
Au lendemain de la première journée mouvementée du Salon de l'agriculture 2024, Eric Delorme, céréalier et légumier de Chaussy dans le Loiret, en a presque perdu sa voix. Après avoir hué et sifflé Emmanuel Macron aux côtés d'une vingtaine d'agriculteurs du département, le céréalier est revenu sur les annonces du président.
- Que pensez-vous du prix plancher indexé sur le coût de production pour chaque filière annoncé par le Président de la République ce samedi 24 février ?
C'est agréable à entendre et peut-être porteur. Mais dans la réalité des faits, je ne vois pas comment on peut inclure un prix plancher. Chaque exploitation est différente, selon zones géographiques, selon les terroirs... Je ne vois pas comment on peut le faire concrètement. Pour certaines filières, le prix est fixé au niveau mondial, pas au niveau français.
- Le prix plancher peut-il changer votre situation personnelle ?
Je ne pense pas que le prix plancher puisse changer ma situation personnelle. Je vois plus les choses avec une répartition de la valeur entre la GMS (Grande et moyenne surface), l'industriel et l'agriculteur. Il faut quand même qu'il y ait une part importante qui revienne à l'agriculteur parce que ce n'est plus tenable.
Comment expliquer à un industriel un prix plancher alors qu'il va pouvoir se fournir de matières premières extérieures moins chères ? Quelle solution va-t-il prendre ? Il ne va pas prendre la solution française, plus chère. Il va regarder ses coûts de productions et sa marge, donc il va importer. Au lendemain de ces annonces, ça me semble inefficace.
- Qu'auriez-vous souhaité entendre de la part d'Emmanuel Macron ?
Quand on discute d'un match de foot, les règles du jeu sont les mêmes pour tout le monde. Aujourd'hui, elles ne le sont clairement pas. On met des boulets à l'agriculture française et on nous demande de courir un 100 mètres, ce n'est pas possible. On peut être les meilleurs agriculteurs du monde, les plus performants, travailler plus que les autres... Mais si au final, on n'a pas les mêmes moyens de production que les autres, comment voulez-vous faire ?
- Quelle serait la première mesure à appliquer ?
On nous a enlevé des moyens de production. Et bien qu'on les enlève aussi aux autres pays que l'on importe chez nous. Par exemple, sur la filière betterave, on nous a enlevé les néonicotinoïdes, soi-disant que c'était dangereux. Et en même temps, on importe du sucre ukrainien qui est OGM, néonicotinoïde... Si c'est dangereux pour la santé humaine, pourquoi l'importer ?
- Pourquoi doit-il y avoir une harmonisation entre les normes françaises et européennes ?
C'est du bon sens. Je pense que nous devons tous avoir les mêmes règles à l'intérieur de l'Union Européenne. En tant que producteur français, on pouvait se sentir mis de côté, alors que nos voisins pouvaient produire avec plus de facilité... Si on a les mêmes règles pour tous, c'est déjà mieux.
- Une harmonisation au niveau européen vous permettrait-il de mieux écouler votre production ?
Les agriculteurs devraient être mieux considérés et compris. Je ne sais pas si on vendra plus facilement mais au moins, je ne serai pas en concurrence avec des voisins italiens, allemands ou belges qui ne respectent pas les mêmes normes que nous.
Avec Alexis Delacour