La préfecture et le tribunal d'Orléans bientôt vendus ? Afin d'alerter sur les dangers auxquels font face les départements en vue des économies demandés par le gouvernement, Marc Gaudet, le président du Loiret, a mis en vente des bâtiments publics pour 13 millions d'euros.
"Je suis vraiment remonté !" Marc Gaudet, le président (UDI) du département du Loiret, ne mâche pas ses mots. Pourtant, face aux difficultés dont fait preuve son département, forcé de se serrer la ceinture par le gouvernement, le président du Loiret a décidé de réagir avec humour. Pour combler le manque à gagner pour son département allant de 13 à 20 millions d'euros, Marc Gaudet a décidé de mettre en vente la préfecture d'Orléans, les sous-préfectures de Montargis et de Pithiviers ainsi que le tribunal d'Orléans. Pour une mise à prix de… 13 millions d'euros ! Une proposition sur le ton de la blague pour alerter sur les difficultés auxquels font face les départements.
Un "clin d'œil" pour "alerter"
"Cela va finir par ne plus être une plaisanterie", déplore Marc Gaudet. Le président du Loiret avoue que son opération est un brin "provocatrice" et surtout pour "faire réagir". À l'image d'autres départements comme l'Indre-et-Loire, la situation budgétaire du Loiret est périlleuse. "Entre 13 et 20 millions d'économies supplémentaires à trouver, précise Marc Gaudet. L'État nous fait la leçon, nous demande des économies et n'écoute pas nos demandes."
🇫🇷 Ce matin, Marc Gaudet a ouvert la session départementale à Orléans, en présence de tous les conseillers départementaux. Inquiet de la dégradation des finances publiques, il a alerté sur les risques pour les collectivités et réaffirmé l’importance de l’action des Départements. pic.twitter.com/EOo1tAxnyu
— Le Loiret (@leloiret) October 17, 2024
Les bâtiments publics appartenant au département, comme la préfecture et le tribunal, ne sont pourtant pas en passe d'être vendu. "C'était surtout un clin d'œil adressé à la préfète à l'occasion de sa visite", assure Marc Gaudet. Mais le fond du problème est bien présent : les départements font face à des dépenses toujours plus grandes, mais des recettes qui diminuent. "Pour faire face à cela, on nous demande de réduire toutes les dépenses qui ne sont pas obligatoires comme les dotations pour la culture et le sport ou encore les aides aux collectivités territoriales", détaille le président du Loiret.
Avant lui, d'autres ont usé du même stratagème pour alarmer sur les coupes budgétaires forcées aux collectivités, comme en Haute-Marne, où le président du département a mis une annonce sur le site LeBonCoin pour vendre sa préfecture. "On en discute beaucoup entre les départements, car tout le monde est dans le même cas", assure Marc Gaudet. Des coups de communications qui surviennent alors que l'examen du projet de loi de finance 2025 début ce 21 octobre à l'Assemblée nationale. Le gouvernement prévoit une réduction du déficit de 60 milliards d'euros et demande 5 milliards d'euros d'économies aux collectivités dont 2,2 milliards d'euros aux départements.
La situation est pourtant déjà complexe. Depuis fin 2023, 14 départements sont suivis par le gouvernement du fait de leurs difficultés, ayant mené à l'activation de fonds de sauvegarde pour leur venir en aide. Mais selon l'association d'élus Départements de France, ce sont 30 à 40 départements français qui risquent la faillite et la cessation de paiement en 2024. "Avant, nous votions le budget en décembre, mais maintenant, on le fait en mars pour avoir plus de visibilité parce que la situation s'est dégradé", concède Marc Gaudet, le président du Loiret.
Les gendarmes ne paieront pas leur loyer
Pour cela, il est demandé de sabrer dans les dépenses "non obligatoires" comme les dotations aux associations ou les aides aux communes. "On nous demande de faire de l'austérité, qu'on ne subventionne plus le sport ou la culture", s'agace Marc Gaudet, relevant une certaine incohérence après que le sport ait été mis en avant pour les jeux olympiques.
En temps normal, quand un locataire fait cela, il est mis à la porte !
Marc Gaudet, président du département du Loiret
Mais plus encore, une nouvelle tombée ce 21 octobre pour le département du Loiret exaspère son président : le ministère de l'Intérieur ne paiera pas le loyer des casernes de gendarmerie détenues par le département jusqu'à la fin de l'année. "Nous avons appris ça ce matin, dévoile le président du Loiret, en colère. Le commandant de région de gendarmerie nous a envoyé un courrier pour nous dire qu'il ne paiera pas le loyer des casernes. En temps normal, quand un locataire fait ça, on le met dehors !" Il en va de même pour le bailleur social Logemloiret, possédant également des casernes de gendarmerie. Si le département est toujours en train de chiffrer la perte à venir, le bailleur social perdrait, lui 300 000 euros, selon les dires de Marc Gaudet.
À l'image de ses homologues, le président du département du Loiret demande un relèvement des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), ressource principale des départements qui a baissé de 23 % par rapport à l'an dernier. Il espère également le relèvement de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance que touchent les départements et les reversent aux Services départementaux et territoriaux d’incendie et de secours (SDIS). "On ne peut pas couper nos financements à l'Aide Sociale à l'Enfance, aux personnes âgées ou encore aux personnes en situation de handicap, donc il va falloir que le dialogue soit renoué", appuie Marc Gaudet. À l'occasion des débats sur le budget 2025, toutes les attentions sont portées vers les débats au Parlement.