"C'est beaucoup plus facile d'ouvrir un Airbnb qu'un hôtel" : le secteur de l'hôtellerie en colère porte plainte

Ils sont 26 hôteliers à s’opposer à Airbnb. Ils viennent d'un peu partout en France et sont soutenus par l'UMIH, pour assigner en justice le leader mondial de l'hébergement touristique.

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Dans un communiqué, l'organisation du secteur de l'hôtellerie-restauration reproche à Airbnb "de ne pas respecter les réglementations en vigueur, de détourner illicitement une partie de la clientèle des hôteliers et de créer une rupture d'égalité concernant la collecte de la taxe de séjour, au détriment des collectivités locales". Dans la région Centre-Val de Loire, aucun hôtelier ne participe, mais les délégations régionales soutiennent totalement l'action nationale.

Une procédure commencée en 2018

"On est complètement solidaire avec l'action judiciaire nationale et le collectif qui s'est réuni pour mener cette action. C'est de la concurrence déloyale. Le problème, c'est la réglementation. On est surnommé", lance Jerry Gras, le président de l'UMIH du Loiret. Sont notamment visées les normes d'accessibilité et d'incendie. "Nous avons l'impression que c'est beaucoup plus facile d'ouvrir un Airbnb qu'un hôtel, car ils ne sont pas du tout soumis aux mêmes normes que nous", dénonce Pierre-Henry Delmas, le président de l'UMIH d'Indre-et-Loire.

Les hôteliers pointent spécifiquement les pratiques de certains particuliers, rachetant plusieurs appartements d'un même immeuble, pour créer une sorte de faux hôtel. Pour autant, cet impact et cette "concurrence déloyale" dénoncée par les hôteliers, restent difficiles à évaluer. "Airbnb ne reverse pas forcément l'intégralité des taxes de séjours, donc il est presque impossible de savoir le volume de nuitées", poursuit Pierre-Henry Delmas. Pour rappel, le propriétaire d'un logement est autorisé à louer son bien moins de 120 jours par an.

Une modification des modèles économiques des hôtels ?

Cette concurrence d'Airbnb pousse certains hôteliers à modifier leur modèle économique. La tendance du moment est de développer les offres à la panoplie de services personnalisés pour le client. "À partir du moment où on est dans le haut de gamme et dans le luxe, on n'est pas impactés (par Airbnb). On l'est vraiment sur tous les autres lieux d'hébergements traditionnels", précise le président de l'UMIH d'Indre-et-Loire. 

Une "concurrence déloyale" dénoncée par l'UMIH qui, selon eux, est largement visible par l'augmentation visible du nombre de boîtes à clés dans les halls d'immeubles des villes de la région, mais aussi dans certains territoires ruraux.

On réclame de la cohérence. Tout le monde doit être sur la même ligne de départ. Si on court un 100 mètres, vous mettez tout le monde sur la même ligne. Dans le business, il faut faire pareil, sinon ça ne marche pas.

Jerry Gras, président de l'UMIH du Loiret.

Le nombre de logements mis en location sur Airbnb tend aussi le marché du logement, déjà en difficulté. "C'est le problème de l'ubérisation de la société, on ne devrait même pas avoir à porter plainte. Les responsables politiques devraient voir et comprendre", assure Jerry Gras. La politique s'est pourtant emparée du sujet en avril 2023 avec une proposition de loi "visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l'échelle locale". Une loi plus couramment appelée "loi anti Airbnb" qui est toujours en cours d'examen et d'adoption. 

Cette proposition de loi transpartisane entend encadrer les meublés de tourisme type Airbnb pour favoriser le logement permanent : fiscalité moins favorable, DPE obligatoire, pouvoirs des maires renforcés... Il s'agit d'apporter une réponse à la crise du logement dans de nombreux territoires, de la Bretagne au Sud-Ouest, du littoral à la montagne.

Proposition de loi

Une proposition vue d'un bon œil par les professionnels du secteur. "C'est un début de solution", avoue amèrement Pierre-Henry Delmas. 

Des "tentatives infructueuses des lobbies hôteliers pour protéger leurs intérêts"

Contacté par courriel, Airbnb nie toute infraction. "Ce litige fait suite à une longue série de tentatives infructueuses des lobbies hôteliers pour protéger leurs intérêts, en s’attaquant aux Français souhaitant louer leur logement sur notre plateforme. Il existe une différence majeure entre les professionnels de l'hôtellerie et les hôtes, qui sont - pour l’immense majorité - des familles françaises qui partagent occasionnellement leur propre bien quelques jours par mois." Par cette communication, Airbnb avance même que les groupes hôteliers français se portent très bien avec une augmentation du chiffre d'affaires global. 

Selon Statista, le chiffre d'affaires du secteur a graduellement augmenté pour atteindre plus de 19,6 milliards d'euros en 2019 avant de diminuer de plus de 9 milliards d'euros en 2020, après la crise sanitaire. 

La covid est d'ailleurs une période marquante pour les hôteliers qui "a accéléré les choses", estime Jerry Gras. Les hôteliers, originaires de toute la France, réclament 9,2 millions d'euros de dédommagement à la plateforme américaine dont le siège européen est établi en Irlande.

En Europe, les locations via la plateforme Airbnb ont notamment été complètement interdites dans l'une des villes les plus touristiques du continent. En France, plusieurs communes ont décidé de limiter l'influence de cette plateforme. 

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