"C'est du foutage de gueule !" : pour les boulangers, les aides ne suffiront pas à surmonter la crise énergétique

Le ministre de l'économie Bruno Le Maire recevait ce mardi 3 janvier les représentants du secteur de la boulangerie, durement touché par la hausse des coûts de l'énergie. Mais pour les professionnels interrogés, les dispositifs d'aides ne permettront pas d'absorber l'augmentation des factures.

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C'est l'un des secteurs les plus durement touchés par la hausse des coûts de l'énergie. Ce mardi 3 janvier, le ministre de l'économie Bruno Le Maire rencontrait les professionnels de la boulangerie. L'occasion de rappeler les dispositifs déployés pour les aider à traverser cette crise.

Car si une partie des très petites entreprises (TPE, employant moins de 10 salariés) bénéficieront du bouclier tarifaire encore cette année, ce n'est pas le cas des petites ou moyennes entreprises (PME), qui subissent l'augmentation de plein fouet.

Aurélien et Betty Nicot, propriétaires d'une boulangerie à la Chapelle-Saint-Mesmin près d'Orléans, sont plutôt dubitatifs face au discours de Bercy. Alors que le ministre de l'économie a assuré que le cumul des aides accordées par l'Etat permettrait aux boulangers d'obtenir "jusqu'à 40% de remise sur la facture d'électricité", selon Betty Nicot, le compte n'y sera pas.

Une remise insuffisante 

Après calcul, leur commerce ne pourra prétendre qu'à 20% de remise, car celui-ci ne répond pas à toutes les conditions requises. "Il y a toujours des petits trucs, il faut que vous ayez un certain nombre de salariés...C'est comme un contrat d'assurance, il y a toujours des petits astérisques que vous n'avez pas lu", ironise Betty Nicot. Quoi qu'il en soit, les aides ne suffiront pas à absorber la hausse exponentielle des prix.

John Gollandeau, boulanger installé à Montrieux-en-Sologne dans le Loir-et-Cher, peut lui aussi en témoigner. "J'étais aux alentours de 900 euros par mois, et je passe à 4 700 euros. 40%, ce n'est pas assez, c'est du foutage de gueule", s'agace-t-il. Face à la flambée des factures, l'artisan espère une mobilisation de la profession.

"C'est vraiment une honte, il faudrait que tous les boulangers ferment et descendent dans la rue pour crier au secours"

John Gollandeau

France 3 Centre-Val de Loire

"Ça va mettre les gens dans un système de surendettement" 

Parmi les dispositifs mis en place, Bruno Le Maire a aussi rappelé la possibilité de reporter le paiement des cotisations sociales. "Ça va mettre les gens dans un système de surendettement. On l'a vu avec le covid, le report de paiement, ce que ça a fait", réagit Betty Nicot, en faisant allusion aux prêts garantis par l'État contractés par des professionnels pour faire face à la pandémie de covid-19.  

"On espère que les fournisseurs d'énergie prendront leur part, je pense que c'est important qu'ils fassent un effort. Pour nous, une facture multipliée par quatre, ça va être très compliqué. Surtout qu'on ne peut pas reporter cette charge sur nos clients. On sait que l'Etat ne peut pas tout, donc on compte aussi beaucoup sur les fournisseurs d'énergie"

Aurélien Nicot

France 3 Centre-Val de Loire

Plus tard dans la journée, Bruno Le Maire a justement annoncé une nouvelle mesure, négociée avec les fournisseurs, qui permettra aux artisans de résilier leur contrat sans frais en cas de "hausse insupportable". Les dossiers seront étudiés au cas par cas.

Interrogé ce mardi soir sur le plateau de France 3, Thierry Villard, président de la chambre patronale de la boulangerie du Loiret, estime que cet accord va "dans le bon sens", "mais ce n''est pas suffisant. Les boulangers ne pourront pas payer des factures multipliées par 3 ou 4.

L'annonce ne suffit pas à rassurer John Gollandeau, qui s'attend à ne pas y être éligible. "Ce sera sûrement possible pour les anciens contrats, pas les nouveaux. Moi, j'ai signé en octobre. Ce que je veux, c'est qu'on paye l'électricité au juste prix, tout simplement", martèle-t-il. 

Des clients prêts à payer plus cher

Bien conscients de la situation, certains clients se disent prêts à payer plus cher leur baguette. "J'entendrais qu'ils augmentent leurs tarifs de produit fini, en lien avec cette augmentation. Je pense que ça doit être très compliqué pour eux, avec en plus la hausse des matières premières", souligne une cliente de la boulangerie de Betty et Aurélien Nicot.

Pour elle, soutenir les artisans en difficulté est essentiel : "on a besoin des petits commerces." Mais pour certains professionnels, reporter la hausse des prix de l'énergie reviendrait à à vendre leur baguette de pain à 4 euros.

Selon Thierry Villard, plusieurs boulangers ont déjà dû mettre la clé sous la porte, et la situation "risque de s'aggraver" dans les semaines à venir. 

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