Les étudiants en sciences de l'éducation ont manifesté ce vendredi 30 septembre contre le projet de déménagement, décidé par l'université d'Orléans, après la panne de leur chaudière. Dénonçant des conditions d'études intenables, ils ont obtenu un semblant de sursis de la direction.
Entre sobriété énergétique et confort d'études, la bataille fait rage. Ce jeudi 29 septembre, les étudiants, personnels administratifs et enseignants de l'Inspé (centre de formation des futurs professeurs) du Centre-Val de Loire ont reçu un courrier du président de l'université d'Orléans, Éric Blond. Leur annonçant des "solutions drastiques" décidées en réunion deux jours plus tôt : en l'occurrence, "la fermeture définitive des locaux de l'Inspé Saint-Jean", situés dans le centre-ville d'Orléans.
Car les étudiants sont actuellement répartis sur deux sites : l'un rue du Faubourg de Bourgogne, l'autre faubourg Saint-Jean. Au sein du deuxième, un récent dégât des eaux est venu à bout des chaudières, irrécupérables sans de profonds travaux de réfection. La direction de l'université avait donc acté pour une évacuation dans les trois semaines du site Saint-Jean, envoyant tous ses étudiants du côté de Bourgogne.
"Il n'y a pas de place pour nous"
Une nouvelle qui passait mal du côté des principaux concernés, qui appelaient à manifester devant le siège de l'université, au château de La Source, ce vendredi 30 septembre au matin. La direction de l'Inspé a même déposé sa démission collective. "À Bourgogne, il n'y a pas de place pour nous, il y a déjà très peu de place pour ceux qui y sont", explique Estelle Boheas, étudiante en master 2 de sciences de l'éducation, venue manifester. Selon elle, c'est pas moins de 200 étudiants qui viendront gonfler les effectifs du site Bourgogne.
Sa camarade Chloé Boulanger, en master 1, explique que "les étudiants ont besoin de stabilité, les M2 doivent étudier et préparer le concours en même temps". Ce qu'un déménagement en urgence empêcherait : "Nombreux sont ceux qui ont loué des appartements chez des particuliers à des loyers importants car il nous avait été certifié en début d'année que nos cours se feraient sur le site Saint-Jean", est-il écrit dans une tribune écrite par le collectif des étudiants et étudiantes du centre de formation d'Orléans. En transports en commun, les deux sites sont séparés de 25 à 30 minutes.
N'ayant "pas été conviés" à la réunion de la direction avec les enseignants et des personnels administratifs, mais étant "venus quand même", les étudiants estiment ne pas avoir été "du tout entendus", assure Estelle Boheas.
Le collectif assure pourtant avoir mis sur la table une solution alternative. "Nous avons fait des devis qui montrent que nous pouvons obtenir une chaudière temporaire, entre 30 et 50 000 euros", détaille Sylvie Quittelier, formatrice en sciences de l'éducation à Orléans depuis 17 ans, venue manifester "en soutien de nos étudiants" face à ce "déménagement forcé". Selon elle, "il n'y a plus de lieu de restauration depuis des années" sur le site Bourgogne, "le seul endroit où les étudiants peuvent faire réchauffer leur gamelle, c'est à l'ancien restaurant, mais ils veulent y mettre la bibliothèque universitaire", raille-t-elle. Une bibliothèque qui ne peut pas être déménagée en deux temps trois mouvements, tout en étant absolument nécessaire à la préparation des concours par les M2. "Et puis on ne sait pas où on pourra loger les personnels administratifs."
Solution provisoire avant la migration
Face à cette énumération de problèmes, la direction a ouvert ses portes aux manifestants, rassemblés devant le château de La Source. En l'absence d'Éric Blond, c'est la vice-présidente Paule Quilichini qui les a reçus. Une réunion à l'issue de laquelle "nous avons le sentiment d'avoir été entendus sur la solution du chauffage provisoire", lance Sylvie Quittelier quelques minutes plus tard. Même si la présidente explique, de son côté, que "la décision ne peut pas être prise pour l'instant", puisqu'il faut attendre un avis de la commission de sécurité sur l'installation d'une chaudière en extérieur pour chauffer un lieu public. Paule Quilichini espère des réponses "d'ici mardi" de la part du prestataire de l'université, sur la faisabilité de l'opération. Reste que l'option déménagement manu militari reste envisageable "si en dernière minute on n'a pas le feu vert de la commission sécurité".
Reste que cette solution de la chaudière externe restera provisoire, étudiants et direction s'étant entendus pour un déménagement vers Bourgogne quoiqu'il arrive pour la rentrée 2023. À terme, l'université prévoit de relocaliser l'entièreté de l'Inspé dans l'actuel bâtiment Droit, économie et gestion, situé à La Source. En attendant, le site Saint-Jean sera de toute façon "rendu", et le site Bourgogne profondément remanié pour accueillir le surplus d'étudiants.
Un projet que la direction semble avoir voulu accélérer après la mise hors d'état des chaudières du site Saint-Jean. Une question, aussi, de sobriété énergétique. "Nous allons avoir un surcoût d'entre 6 et 8 millions d'euros par rapport à la facture actuelle", prédit Paule Quilichini, à cause de la hausse spectaculaire des coûts de l'énergie. L'université réfléchit donc à "rationnaliser" l'occupation des bâtiments pour chauffer le moins de surface possible. Dans le cas de l'Inspé, la direction semble en avoir demandé un peu trop.
Propos recueillis par Amélie Rigodanzo et Yves Le Bloa.