Le 18 Septembre, un jeune homme était tué par balles à Saran, situé au nord d'Orléans. Une semaine plus tard, deux personnes se trouvaient grièvement blessées par balle en plein centre-ville d'Orléans. Y-a-t-il un problème de sécurité dans la capitale régionale ? Le maire (DVD), Serge Grouard réagit.
Il était tard dans la nuit quand la police vient tambouriner à la porte de cette résidente de l'impasse du Cruficix-Saint-Aignan à Orléans. "Être réveillée par la police pour des choses aussi graves... Je ne pensais pas connaître ça ici ! Je suis encore sous le choc", raconte-t-elle au lendemain de la double tentative de meurtre qui a eu lieu, juste là, à deux pas de chez elle, en plein centre-ville.
Selon nos informations, deux hommes âgés entre 20 et 30 ans ont été grièvement blessés par balles vers 3h du matin, ce mardi 24 septembre. L'une des victimes a été atteinte de tirs dans la poitrine et a été retrouvée sur la voirie. L'autre aurait été blessée par balle à la tête, dans un appartement proche. Une altercation aurait débuté rue de Bourgogne plus tôt dans la soirée, avant de trouver son épilogue tragique, impasse du Crucifix-Saint-Aignan, à deux pas de la Loire.
Une semaine plus tôt, dans la soirée du 18 septembre, un jeune homme a été tué par balles à Saran, dans le nord de la métropole d'Orléans. Vers 22h, un véhicule s'arrête rue du Bois Salé pour faire feu sur la victime. Touché par deux impacts au crâne, il décède sur place, malgré plusieurs tentatives de réanimation.
Comment expliquer la récurrence des tentatives d'homicide ?
Un homicide et deux tentatives en deux semaines à Orléans, la multiplicité des faits a de quoi interloquer. Le maire et président de la métropole, Serge Grouard (DVD), assure ne pas constater "de dégradation dans les statistiques [de la délinquance à Orléans], qui valent ce qu'elles valent". En revanche, "sur le terrain, je sais bien qu'il y a un certain nombre de problèmes".
Il fustige ainsi les "paquets de gens qui viennent sur la ville, on ne sait pas trop d'où, on ne sait pas trop comment, et qui s'installent là". Une référence aux personnes sans domicile fixe, envoyées en Centre-Val de Loire depuis l'Île-de-France. En mai 2023, le gouvernement demandait ainsi aux préfets la création de "sas" dans plusieurs régions de France, dont le Centre-Val de Loire. Selon la préfecture du Loiret, 519 personnes ont été prises en charge dans ce cadre entre mai 2023 et mars 2024 sur l'entièreté de la région, et pas juste à Orléans.
Serge Grouard tire un trait de causalité directe entre hausse de l'insécurité et immigration, particulièrement l'immigration irrégulière. Il demande à l'État "que les étrangers en situation irrégulière soient renvoyés dans leur pays d'origine". De manière plus générale, il réclame à l'État plus de moyens, notamment en direction de la police nationale et des services de justice "qui font un travail formidable avec trois bouts de chandelle".
Et pas que. "On a un problème avec des SDF, dont un certain nombre a des problèmes psychiatriques évidents. Vous les faites prendre en charge comment ? Il n'y a plus de places !"
Hausse ou pas hausse ?
À noter cependant que les étrangers ne représentent que 17 à 18% des auteurs d'homicides et de tentatives d'homicides, à en croire les chiffres 2023 du Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMI). Dans les deux cas, le nombre de victimes est en hausse en 2023. Par rapport à 2016, le nombre d'homicides est en légère augmentation, et le nombre de tentatives bondit de près de 80%. Une hausse que le nombre d'étrangers identifiés parmi les mis en cause ne peut mathématiquement pas expliquer.
À Orléans, aucune statistique "ne vient corréler une hausse des interpellations d'étrangers en situation irrégulière", assure Thierry Guiguet-Doron, directeur départemental de la Sécurité publique (DDSP) dans le Loiret.
La SSMI demande, par ailleurs, de prendre toutes ces statistiques avec prudence, arguant que le surcroît de victimes "peut résulter non seulement de l'évolution du phénomène en lui-même, mais aussi de l'évolution de la propension à porter plainte et de la plus ou moins grande sensibilisation de la société à ce type d'atteinte, ou encore de l'évolution des pratiques d'enregistrement par les services de sécurité".
"Un épiphénomène"
Pour le cas particulier d'Orléans et du Loiret, les services "ne constatent pas une grosse hausse des homicides ces dernières années", assure Thierry Guiguet-Doron. Sur le début de l'année 2024, il observe même "une légère baisse de la délinquance" dans le département.
Selon le DDSP, la récurrence de plusieurs faits graves rapprochés est "une mauvaise période, et j'espère qu'elle est terminée" :
Il faut rassurer les gens : c'est un épiphénomène. Il y a une violence extrême dans le milieu des stups. Avant, ils se rataient. Les dernières affaires, ils ne se sont pas ratés. Mais ça se passe entre eux, seulement.
Thierry Guiguet-Doron, DDSP 45
De manière générale, "il n'y a pas une explosion de la violence". La voisine de l'impasse du Crucifix-Saint-Aignan dit savoir "faire la part des choses" :
Je pense qu'il y a un contexte à cette violence, ce n'est pas lié à Orléans ou à ce quartier. Je n'ai pas peur. J'aime ce quartier. C'est un drame unique, pas habituel. Je resterai dans mon quartier.
Une riveraine de l'impasse du Crucifix-Saint-Aignan
Même chose pour Léa, une habitante du centre-ville, qui sort régulièrement le soir rue de Bourgogne, où aurait donc débuté l'altercation ayant mené à la double tentative de meurtre. "C'est vachement lumineux, il y a beaucoup de passage... De manière générale, ça va", argue-t-elle sur la sécurité dans la rue. "Ça a beaucoup changé depuis une vingtaine d'années." Elle assure avoir plutôt peur quand s'éteint l'éclairage public, notamment dans sa rue. "Je marche très vite jusque chez moi, c'est un peu effrayant", concède-t-elle.
Thierry Guiguet-Doron, à l'instar de Serge Grouard, réclame tout de même plus de moyens pour la police. "Ça nous permettrait d'être plus présents dans les transports en commun, de monter plus d'opérations, d'être plus sur la voie publique, d'avoir du monde pour exploiter les caméras, faire les enquêtes... On augmenterait notre taux d'élucidation."
À en croire les statistiques municipales, la délinquance à Orléans a légèrement augmenté en 2023 par rapport à 2022, mais est en baisse de 18% depuis 2019 (sans que ne soient comptabilisées les données liées au trafic et à la consommation de drogue). Et si les homicides sont en légère hausse depuis dix ans en France, leur nombre a presque été divisé par deux depuis 1996.