Témoignages. Méconnu, le syndrome des ovaires polykystiques ou SOPK, touche pourtant 1 femme sur 10

Publié le Écrit par Amélie Rigodanzo

Moins connu que l’endométriose, le syndrome des ovaires polykystiques ou SOPK, est un trouble hormonal qui impacte les femmes en âge de procréer. Il est aussi la première cause d'infertilité au monde.

Cindy souffre de SOPK, un trouble hormonal qui chez elle s'est manifesté très tôt par des cycles irréguliers voir parfois l'absence totale de menstruations. Cette Orléanaise, kinésithérapeute de profession, n'a pourtant été diagnostiquée que récemment, à l'âge de 32 ans.

"Quand j'avais 21 ans, on a supposé que j'avais un cancer du pancréas et aux échographies, on a vu que j'avais des ovaires polykystiques. Donc, on soupçonnait déjà un SOPK et mon gynécologue me traitait ainsi. Mais comme à l'époque, on se souciait peu des autres symptômes, on ne s'est pas davantage posé la question". Ce n'est que cette année, parce qu'elle souhaite avoir un troisième enfant et qu'elle rencontre des difficultés pour tomber enceinte, que le diagnostic a pu être enfin posé.

Le SOPK, c'est quoi ?

Contrairement à ce que laisse penser son nom, attribué à tort par les premiers chercheurs qui l’ont exploré, le SOPK ne provoque pas de kystes ovariens. Il s’agit en fait d’une multitude de petits follicules à la croissance inachevée et qui ne libèrent donc pas d’ovules.

Les femmes qui en sont atteintes présentent des troubles de l'ovulation qui se manifestent par des cycles menstruels irréguliers et peuvent même se traduire par une absence totale de règles (aménorrhée). Si le syndrome ne provoque pas de stérilité, il soumet en revanche à un risque important d'infertilité. Celles qui en sont atteintes peuvent, par conséquent, rencontrer des difficultés à avoir des enfants.

Cindy est tombée enceinte à deux reprises avant d'être confrontée au problème : "J'ai aussi fait deux fausses couches avant mon aîné et j'ai perdu le jumeau de mon deuxième. Avec le recul, j'ai forcément fait le lien avec le SOPK, mais on ne l'a pas cherché à ce moment-là. Mais maintenant, cela fait un an et demi que l'on essaie d'avoir un troisième enfant..."

De multiples symptômes

L'autre caractéristique majeure du SOPK est l'hyperandrogénie, soit une production excessive et anormale de testostérone, qui entraîne dans 70% des cas une hyperpilosité (hirsutisme), la chute des cheveux (alopécie) et de l'acné persistante même après l'adolescence.

À moyen et long terme, l'hyperandrogénie expose à un risque d'insulinorésistance pouvant conduire à un diabète de type 2 et à un risque accru d'hypertension et de maladies cardiaques. D'autant que les femmes atteintes de SOPK peuvent également être sujettes à une importante prise de poids ou à des difficultés à perdre du poids.

C'est d'ailleurs un excès de poids depuis l'enfance qui a conduit Caroline jusqu'au diagnostic. À la puberté, cette Nantaise de 31 ans grossissait plus rapidement que ses camarades et sa mère a commencé à s'interroger. Elle a dû voir plusieurs endocrinologues avant de trouver celle qui posera le diagnostic "assez tôt, j'ai eu de la chance", consent-elle.

À 17 ans, elle souhaitait devenir médecin dans l'armée et devait pour cela passer une batterie d'examens médicaux. "Le médecin de l'armée m’a dit qu'il soupçonnait un SOPK. J'avais beaucoup de poils, de l’acné, il a tout de suite vu et interprété les symptômes. J’ai donc revu mon endocrinologue et elle a tout de suite posé le diagnostic. Elle m'a fait passer une échographie et a vu les follicules en surnombre."

On ne guérit pas du SOPK

Il n'existe malheureusement aucun remède pour guérir le SOPK. Les traitements consistent généralement à réduire les symptômes et prévenir les complications à long terme. Cela peut inclure des médicaments comme la pilule contraceptive pour réguler les menstruations et atténuer l'acné et la pilosité ; des médicaments pour la fertilité et des antiandrogènes afin de réduire le taux de testostérone.

Les femmes atteintes de SOPK sont également encouragées à modifier leur mode de vie, notamment en changeant leur régime alimentaire et en faisant de l'exercice pour mieux contrôler leur poids et réduire l'insulinorésistance.

Caroline est sous traitement hormonal contre l'hyperandrogénie, et ce traitement lui convient : "ça marche comme une pilule donc je n'ai plus de cycle", explique-t-elle. Mais au fil des ans, son syndrome a évolué et la jeune femme a développé une insulinorésistance. "Je mange des aliments à indice glycémique bas pour éviter ce dérèglement au niveau du sucre, j'ai une activité physique régulière, j'évite les plastiques dans les contenants par exemple pour ne pas être exposée à des perturbateurs endocriniens. C’est un peu les montagnes russes dans les émotions, mais j’essaie de tout mettre en place pour que ça aille mieux."

Beaucoup de femmes atteintes de SOPK se tournent vers la naturopathie pour soulager leurs symptômes. Et même s'il n'a pas encore été prouvé que cette discipline non conventionnelle ait des effets caractérisés, les patientes, elles, disent ressentir un réel changement. Cindy, l'Orléanaise, a recours à des compléments alimentaires "à la fois pour aider le projet bébé à aboutir, mais aussi pour traiter les symptômes du SOPK explique-t-elle. "Mais il faut dire aussi que si la naturopathie s'est développée auprès des patientes, c'est aussi faute de prise en charge médicale adéquate."

Reconnaître, diagnostiquer et prendre en charge

Le diagnostic du SOPK repose sur des critères bien précis comme le détaille l'Assurance maladie sur son site. Il nécessite la présence d'au moins deux des trois critères suivants : une hyperandrogénie clinique (hirsutisme, acné, alopécie androgénique) ou biologique ; une ovulation rare ou absente ; une augmentation du volume des ovaires et leur aspect "polykystique" à l'échographie.

Toute une série d'examens physiques, sanguins, d'imagerie médicale ainsi que la recherche d'antécédents familiaux sont donc nécessaires et relèvent parfois du parcours du combattant. En outre, la variété des symptômes peut rendre difficile le diagnostic.

"Ce n'est finalement pas très compliqué, mais pour pouvoir l'affirmer, il faut connaître ces symptômes et il faut avoir éliminé toutes les autres causes qui peuvent aussi les provoquer", explique le Dr Maeliss Peigne, gynécologue et médecin en reproduction à l'APHP.

La praticienne et spécialiste reconnaît aussi une méconnaissance liée à un manque de formation des médecins. "Dans la réforme des études médicales, il y a désormais un item spécifique pour l'endométriose, mais il n'y en a pas pour le SOPK. Donc on apprend ce syndrome, mais pas dans sa globalité. On l'aborde seulement lorsqu'on étudie les différentes pathologies auxquelles il est lié comme l'hirsutisme ou l'acné", regrette-t-elle.

Il y a aussi une banalisation des troubles du cycle. On dit souvent aux femmes : "ce n'est pas grave prenez la pilule et vous aurez des règles et on verra quand vous voudrez être enceintes". Mais il faut se poser la question : pourquoi on a des troubles du cycle ? Ce qui n'est pas forcément toujours recherché.

Dr Maeliss Peigne - Gynécologue et médecin de la reproduction

Une fois le diagnostic établi se pose un nouveau problème : celui du suivi médical. "Après le diagnostic, j’ai vraiment été laissée seule. J’étais un peu perdue", regrette Caroline. Cindy elle souhaiterait "qu'on fasse une prise en charge plus globale, pour ne pas devoir se rendre chez un spécialiste pour chaque symptôme", d'autant que l'Orléanaise vit dans un désert médical qui rend l'accès aux praticiens extrêmement compliqué.

"Ce qu'il faudrait, c'est essayer d'améliorer les réseaux de soins parce que la patiente peut souffrir de différentes choses et nécessite une prise en charge adaptée avec l'intervention d'un gynéco, d'un endocrino, d'un psychologue…", énumère le Dr Peigne, qui travaille actuellement à la création d'un tel réseau au sein de l'hôpital de Bondy où elle travaille. "Pour l'instant ça n'existe pas et les patientes ont du mal à s'orienter."

Des associations pour se soutenir et s'entraider

Pourtant, l'espoir est là. Une autre affection pourrait bien aider le SOPK à sortir de sa clandestinité. L'endométriose, elle aussi restée longtemps méconnue, bénéficie désormais de recommandations de prise en charge par la Haute Autorité de Santé (HAS) et certaines formes invalidantes peuvent ouvrir une reconnaissance en affection longue durée (ALD).

Afin de soutenir et d'informer les femmes SOPK mais aussi de sensibiliser les pouvoirs publics, Caroline, en collaboration avec une amie elle aussi touchée par le syndrome, a créé une association : Asso'SOPK. "On espère que grâce à ce qu’il s’est passé pour l’endométriose, le SOPK ne mettra pas autant de temps à être mis en lumière. On voudrait que le gouvernement s’alarme aussi pour nous". Cindy elle, se concentre sur son "projet de bébé". Son couple se laisse environ un an avant d'envisager une PMA mais en attendant, elle ne manque pas d'aborder le SOPK sur les réseaux sociaux. "Militer, c'est quelque chose qui viendra, parce qu'on laisse beaucoup de femmes seules face à elles-mêmes, voir on ne les croit pas."

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