Comme partout ailleurs, la Corse est confrontée à une pénurie de masques jetables. Pour y faire face, un groupe Facebook rassemble plusieurs centaines de petites mains qui confectionnent des masques en tissu à destination des populations en contact avec le public.
Une semaine. C’est le temps qu’il a fallu pour que l’initiative personnelle de Jonathan Curti prenne une ampleur régionale. Son idée : confectionner des masques en coton pour ralentir et limiter la propagation du Coronavirus au sein de la population.
Tout commence avec l’appel de détresse d’une amie infirmière. « Elle était à bout, n’avait pas de masques et venait d’apprendre que les infirmières libérales allaient être réquisitionnées pour prendre en charge les cas positifs maintenus à domicile », raconte l’éducateur sportif.
La solution : le masque en tissu. Il contacte deux amis et le mouvement voit le jour. « Dans les heures qui ont suivies tout s’est emballé. Mon amie n’était pas la seule à se plaindre et je n’étais pas le seul à m’inquiéter », livre Jonathan Curti.
Les machines à coudre ne refroidissent plus
Depuis un groupe Facebook a été créé : Les p’tites mains solidaires Corse. Il compte actuellement 772 membres, et le chiffre ne cesse d’augmenter. Maria Rodrigues, couturière à Ajaccio, en fait partie. « On est tous dans le même bateau. Lorsque j’ai vu le groupe, après quelques échanges, j’ai tout de suite adhéré », explique-t-elle. Depuis sa machine à coudre ne refroidit plus. Samedi, elle a confectionné 70 masques.
C’est avec autant d’entrain que Michelle Llobell entre dans l’aventure. « Avant le groupe, comme je suis couturière et que je vends du tissu, je voulais faire un appel sur Facebook pour proposer mes services, mais je suis timide et je n’ai jamais osé. Un jour, on m’a donné le numéro de Jonathan », raconte-t-elle. En moyenne, elle coud 15 masques par jour. « Mais j’ai une toute petite machine », tient-elle à préciser.
« Un retour en arrière »
Si les deux couturières utilisent leurs propres tissus, d’autres n’en n’ont pas à disposition. « Nos principaux fournisseurs sont les grandes surfaces comme Leclerc, Casino et Carrefour. Ils nous donnent leurs stocks de mercerie qui sont ensuite dispatchés parmi les membres », indique Jonathan Curti.
Il qualifie gentiment la fabrication de ces masques en tissus de « retour en arrière ». « Ça fait un moment que le personnel soignant crie alerte. Tout le monde était sceptique au début à cause des normes. Mais quand ils se sont rendu compte que faute de masques jetables, certains pouvaient les garder toute une journée, risquer l’infection et la contamination d’autres personnes, le masque en coton est devenu la solution », estime-t-il. Une fois portés quelques heures, ils sont ensuite lavés à haute température et désinfectés pour être utilisés une nouvelle fois.
Terminés, les masques sont livrés avec d’infinies précautions. « Il y a les infirmières, les femmes de ménage, les agents d’accueil et de sécurité, les caissières, les auxiliaires de vie, les personnes âgées », énumère Jonathan Curti. Sans oublier les pompiers et les membres de la police nationale qui, en apportant des t-shirts trop grands ou usés, ont des masques de la couleur de leurs uniformes.
86 millions de masques en France
Samedi, le ministre de la Santé, Olivier Véran, a annoncé que le « stock stratégique d’État » compte actuellement 86 millions de masques, dont 5 millions sont des FFP2. Dans une volonté de transparence, il a précisé que dès le début de l’épidémie de Coronavirus, l’État était conscient « qu’il allait être en difficulté ».
Dès le mois de janvier, le gouvernement a décidé de « recourir à l’importation de masques en provenance de tous les pays producteurs » et de travailler à l’augmentation de la production. Olivier Véran a soutenu qu’une commande de « 250 millions de masques » a été passée en janvier. Tous seront « progressivement livrés au cours des prochaines semaines », a-t-il assuré.
Selon les prévisions, 24 millions de masques vont être utilisés chaque semaine.