Les deux mouvements indépendantiste tenaient ce vendredi 8 avril deux conférences de presse distinctes devant les grilles de la Préfecture de Corse à Ajaccio. Pour eux, l'Etat français est responsable de l'abandon des négociations sur l'avenir institutionnel de la Corse.
Deux partis indépendantistes, un même lieu, et deux conférences de presse. Ce vendredi 8 avril devant les grilles de la Préfecture de Corse à Ajaccio, Corsica Libera et Core in Fronte ont appelé tour à tour au boycott de l'élection présidentielle, alors que les négociations sur l'avenir de la Corse qui devaient se tenir ce jour avec le gouvernement français ont été reportées.
A 11 heures, c'est Petru Antone Tomasi, qui prend la parole lors de la conférence de presse de son mouvement à Ajaccio : "Corsica Libera invite tous les corses qui se reconnaissent dans l'idée nationale à ne pas se rendre aux urnes ce dimanche pour le premier tour de l'élection présidentielle française", déclare-t-il.
"Pour nous cette position n'a rien d'une nouveauté, insiste le militant. Elle s'inscrit au contraire dans la constance de notre engagement indépendantiste. Mais au regard du contexte actuel, nous croyons que cette position gagne encore en cohérence. Face au mépris de Paris à l'égard du peuple corse et de la démocratie corse, il nous semble en effet contre-productif de cautionner l'apparence d'une démocratie française sur la terre de Corse.”
La conférence de presse avait trois objectifs : d’abord, dénoncer l'usage par les forces de l’ordre d’”engins faits pour blesser”, une utilisation que le mouvement juge “disproportionnée“. Ensuite, appeler “l'ensemble du mouvement national ainsi que les forces vives qui se reconnaissent sur la base de la plateforme revendicative du collectif de Corti à l'initiative de la jeunesse et de la communauté universitaire”. Et enfin, l’appel au boycott des urnes les 10 et 24 avril prochain, lors de l’élection présidentielle.
Boycott des urnes
Pour Corsica Libera, les “voies d’un projet commun avec Paris” ne pourront se dessiner qu’en n’acceptant “ni ligne rouge, ni préalable, en se situant à un juste niveau de revendication.”
La structure indépendantiste se range derrière les mots d’ordre du collectif de Corte : “vérité pour Yvan Colonna, libération des prisonniers politiques, reconnaissance du peuple Corse et de ses droits.”
Et précise, par la voix de Petru Antone Tomasi : “Il découle de la reconnaissance du peuple Corse un certain nombre de droits. À parler sa langue, qui est aujourd'hui menacée, à vivre sur sa terre et à y travailler à travers une citoyenneté corse. Ainsi que la co-officialité pour la langue Corse et la dévolution d'un pouvoir législatif pour pouvoir définir nous-mêmes notre propre modèle de société et répondre aux attentes quotidiennes des corses.”
Pour Corsica Libera, renoncer à ces attentes équivaudrait à renoncer à “un processus historique”, au profit d’une “réformette du statut particulier”.
A ce titre, le mouvement indépendantiste appelle à continuer la mobilisation. “ll y a une révolte populaire qui est légitime, ses causes sont politiques, il faut une réponse politique”, déclare Petru Antone Tomasi.
“Corsica Libera comme l'ensemble des Corses, aspire à la paix, à un peuple corse qui vive dans la sérénité. Nous l'avons démontré par le passé en soutenant sans ambiguïté la décision de sortie de la clandestinité du FLNC, en recherchant la voix d'une expression démocratique pour faire valoir les droits du peuple Corse. Nous restons dans cet état d'esprit, mais nous disons également que face à cette volonté, on ne peut pas avoir simplement le mépris de l'État français et le rejet de la démocratie corse”, conclut-il.
Core in Fronte appelle à nouveau au boycott
A 17 heures, un autre parti indépendantiste prend la parole au même endroit, en présence d’une quarantaine de militants et de quatre de ses six élus à l’Assemblée de Corse. Comme Corsica Libera, Core in Fronte considère que l’Etat est responsable du report des négociations sur l’avenir institutionnel de la Corse.
“Cette position est une posture et une échappatoire pour ce gouvernement qui, depuis 2017, n'a jamais tenu ses propres engagements, se figeant dans une attitude de repli et de déni”, lance Luc Bernardini, porte-parole du parti au micro de la conférence de presse.
Relayant de vive-voix un appel lancé sur les réseaux sociaux, le parti indépendantiste se prononce à nouveau pour un boycott de l’élection présidentielle : “La conjoncture actuelle analysée nous amène à renouveler pour ces élections présidentielles françaises, notre appel au boycott. Cet appel est conforme à nos principes et s'appuie sur le rôle et la place de la Corse dans les débats électoraux qui s'ensuivent. La dimension du problème Corse ne saurait être l'objet ni l'otage d'une énième promesse d'un quelconque programme sans lendemain. Elle exige que ce problème soit acté au plus haut niveau de l'État français, selon un canevas de développement qui transcende tout scrutin du calendrier français”, ajoute Luc Bernardini.
Pour les membres de Core in Fronte, eux aussi, la mobilisation doit continuer.
A ce jour, le PNC et Femu a Corsica n’ont pas donné de consigne pour le premier tour de l’élection présidentielle, le 11 avril prochain.