Interpellé vendredi dernier en possession d'une arme et de produits stupéfiants, Gillian Raucourt devait être jugé en comparution immédiate ce mardi 5 mars à Ajaccio. L'audience a été renvoyée à la fin du mois. Incarcéré depuis son arrestation, le prévenu a été maintenu en détention provisoire.
Mardi 5 mars, le tribunal correctionnel d'Ajaccio devait juger Gillian Raucourt en comparution immédiate pour "transport et détention d'arme et de produits stupéfiants".
Interpellé vendredi 1er mars à Ajaccio - à la suite d'un contrôle routier relatif à une infraction -, puis placé sous mandat de dépôt, l'homme âgé de 32 ans comparaissait derrière la vitre du box, entouré de quatre policiers. Il encourt jusqu'à sept ans de prison.
Son avocate, Me Anne-Marie Leandri, a demandé le renvoi de l'audience afin de mieux préparer la défense de son client.
"Cette demande de délai est un droit dans la comparution immédiate", précise d'emblée le procureur, tout en "sollicitant le placement en détention provisoire" du prévenu.
Le représentant du ministère public argumente en s'appuyant sur plusieurs critères, notamment "le risque de renouvellement de l'infraction", ainsi que le "maintien à disposition de la justice", rappelant que Gillian Raucourt avait "été condamné pour des faits d'assassinat". Référence ici à sa condamnation à 12 ans de réclusion en 2015, en appel, par les assises de Haute-Corse pour l'assassinat de Damien Gheraldi. Des faits qui s'étaient déroulés en juin 2009 à Afa.
"Nécessité vitale"
Face à la présidente du tribunal, qui précise que le prévenu est "en récidive légale", Maître Anne-Marie Leandri a rappelé que son client "avait purgé sa peine". "Depuis, ajoute-t-elle, il n'a plus fait parler de lui."
Au sujet de son interpellation, vendredi dernier sur la rocade d'Ajaccio, en possession d'un pistolet semi-automatique contenant 13 cartouches et d'un poing américain, l'avocate développe :
"Il n'a pas mesuré le fait qu'il était en récidive. S'il a une arme, c'est parce qu'il se sent menacé depuis cette affaire (relative à sa condamnation aux assises, ndlr). On a tiré sur lui. Il a porté plainte à trois reprises. La maison de ses parents a été surveillée. On s'en est pris à son frère. Des enquêtes ont été faites. Un juge d'instruction a été saisi. Mais on n'a jamais pu déterminer quels étaient les auteurs de ces menaces et de ces faits qui sont quand même très préoccupants pour quelqu'un qui se dit en danger. Certes, cela n'est pas une excuse sur le plan de la loi de porter une arme, mais cela peut se comprendre sur le plan humain."
"Je tiens à rappeler que j'ai fait 25 mois de bracelet sans aucun souci."
Gillian Raucourt
Maître Leandri a demandé la remise en liberté de son client avec un placement sous bracelet électronique. "Il a reconnu les faits pour le transport d'arme. Quels sont les fondements d'un maintien en détention ?", interroge l'avocate, soulignant le fait que lorsqu'on "est en prison, on n'est pas forcément à l'abri. Des événements récents nous ont démontré que des gens pouvaient s'en prendre à des codétenus."
Depuis son box vitré, Gillian Raucourt est invité par la présidente à prendre la parole :
"Je tiens à rappeler que j'ai fait 25 mois de bracelet (dans un autre dossier, ndlr) sans aucun souci, fait remarquer l'homme aux cheveux courts et à la carrure athlétique. Je rappelle également que j'ai été empoisonné en prison et que j'ai failli mourir."
"Plusieurs de ces éléments n'ont pas été portés à ma connaissance", répond la présidente.
"Le prévenu a donné comme explication, concernant l'arme chargée, qu'il se sentait menacé dans différentes affaires, expose le procureur. Si l'explication est la bonne, il a donc encore besoin de se protéger et de toujours détenir une arme." Et le représentant du parquet de déduire qu'il y "a donc une nécessité vitale et que l'infraction va se renouveler". Il requiert son maintien en détention.
Renvoi au 29 mars
Autre reproche du ministère public à l'encontre de Gillian Raucourt : celui de ne pas avoir "collaboré avec les autorités dans le cadre de sa garde à vue" concernant les 20 bombonnes de cocaïne et l'herbe de cannabis trouvées dans sa sacoche lors du contrôle de police. Le prévenu avait indiqué aux enquêteurs qu'il les "transportait pour « rendre service à un ami »", sans révéler le nom de celui-ci.
"Que je sache, réagit à notre micro Me Leandri, le droit français n'est pas le droit américain. On n'accorde pas une réduction de peine à une personne en contrepartie du fait qu'il "donne" quelqu'un. Ça ne se passe pas comme ça en France. Ici, quand il y a une infraction, vous la reconnaissez ou pas. Et à partir du moment où vous avez pris position, ce sont les tribunaux qui jugent au fond. On ne va pas vous donner une prime parce que vous dénoncez X ou Y. Ce n'est ni dans notre droit, ni dans notre mentalité, ni dans notre philosophie pénale."
Si le tribunal a accédé à la demande de renvoi de la défense, il a en revanche suivi la réquisition du procureur, maintenant le placement de Gillian Raucourt en détention provisoire jusqu'à son procès.
L'audience a été fixée au 29 mars prochain, à 10 heures 30, au palais de justice d'Ajaccio.
Le reportage de Lisa Gamonet et Mathias Landry :