Affaire Pierre Alessandri : la décision de la Cour de cassation "fera certainement jurisprudence" selon son avocat

Pour Maître Patrice Spinosi, la décision rendue ce mercredi par la Cour de cassation constitue "une véritable porte ouverte vers une possible libération" de Pierre Alessandri. Condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour l'assassinat du préfet Erignac, ce dernier est conditionnable depuis cinq ans. Son avocat nous a accordé un entretien.

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Après l'annulation par la Cour de cassation du refus d'aménagement de peine de Pierre Alessandri, son conseil, Patrice Spinosi, a qualifié cette décision "de grande victoire".

"On veut donc croire que cette décision est la dernière qui va permettre de définitivement valider ce droit à la libération conditionnelle que Pierre Alessandri fait valoir depuis maintenant plusieurs années", a réagi ce mercredi 26 octobre l'avocat du détenu condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour l'assassinat du préfet Erignac.

Incarcéré depuis mai 1999, Pierre Alessandri est conditionnable depuis mai 2017.

"Si tous les astres nous sont favorables, on pourrait espérer une libération conditionnelle dans le courant de l'année 2024, au plus tard 2025", a estimé Me Spinosi qui nous a accordé un entretien.

France 3 Corse : qu’est-ce que cette décision de la Cour de cassation va engendrer pour Pierre Alessandri ?              

Me Patrice Spinosi : Une nouvelle Chambre de l'instruction va désormais être saisie avec de nouveaux juges. Cela ne peut plus être jugé par ceux qui par trois fois ont refusé de faire droit à la demande de libération de Pierre Alessandri. Ces nouveaux juges vont devoir appliquer la grille de lecture qui a été imposée par la Cour de cassation. Cette grille est très claire. Elle dit au juge d'appel “vous ne pouvez pas statuer en considération des motifs d'ordre généraux”. Ce que disait la Chambre de l'instruction à chaque fois pour rejeter les demandes de Pierre Alessandri, c'était que l'assassinat du préfet Erignac était un crime extrêmement grave qui avait encore des répercussions dans la société française. Elle disait aussi qu'il y a toujours une menace terroriste en France. La Cour de cassation dit que cela n'est plus possible. Elle dit : "vous ne pouvez plus vous contenter d'affirmer des généralités, vous devez répondre en prenant en considération le parcours spécifique de réinsertion de Pierre Alessandri".

Au sujet du "trouble grave à l’ordre public" avancé par la Cour d'appel en octobre 2021, qu’est-ce qui a été cassé aujourd’hui par la plus haute juridiction judiciaire : l’argument en soi ou la non-justification de cet argument ?  

Ce qui a été cassé, c'est la généralité de l'argument de la de la Chambre d'instruction qui mêlait tout. Elle disait que le trouble à l'ordre public existe parce que il y a une menace terroriste en France. Elle mêlait le terrorisme corse, le terrorisme islamique en pointant l’effet que pourrait avoir la libération de terroristes. Or, tout cela, la Cour de cassation le condamne expressément. Elle dit  vous ne pouvez pas faire prendre en considération ces éléments généraux. En pratique, elle dit : si Pierre Alessandri sort demain, y a-t-il un trouble à l’ordre l’ordre public réel ? Or, il a déjà été répondu à cette question. Le juge de première instance a considéré que cette menace n'était pas suffisante pour différer une mesure de libération conditionnelle.

De la même manière, le comité de l’administration pénitentiaire qui a dû évaluer le risque de dangerosité de Pierre Alessandri a également conclu qu’il ne présentait pas de dangerosité. On voit donc mal quels arguments pourraient être encore avancés par la Chambre de l’instruction.

Eu égard aux procédures en cours, si toutes les décisions étaient favorables à la libération conditionnelle, à partir de quand celle-ci pourrait-elle être envisagée ?

Premièrement, ce qui est certain, c'est que cette décision de la Cour de cassation constitue une véritable porte ouverte vers une possible libération. Aujourd'hui, il n’y a plus d'obstacles juridiques à la libération conditionnelle de Pierre Alessandri. C'est la première chose.

La deuxième, c'est que la Cour d’appel devrait statuer d'ici 4 ou 5 mois, donc a priori avant le printemps 2023. Si elle venait à confirmer la décision de libération conditionnelle, il faudrait alors compter à peu près un an a priori, voire un an et demi pour que cette libération devienne effective. Donc, si tous les astres nous sont favorables, on pourrait espérer une libération dans le courant de l'année 2024, au plus tard 2025.

Concernant Alain Ferrandi - qui s'est lui aussi vu refuser ses différentes demandes de semi-liberté -, l'analyse de la justice pourrait-elle être la même  ?

Il y a aucune raison pour qu'il y ait un traitement différent entre Pierre Alessandri et Alain Ferrandi. Ils ont fait l'objet de demandes de libération conditionnelle. Globalement, au même moment, ils ont eu de la même manière des évaluations très favorables de la commission de l'administration pénitentiaire qui doit évaluer la dangerosité des détenus. Donc, sans vouloir préjuger de ce que pourraient être les décisions de justice, si Alain Ferrandi présente des demandes qui sont identiques à celles de Pierre Alessandri, il n'y a pas de raison qu’on ne fasse pas droit aux siennes si on a fait droit à celles de Pierre Alessandri.

"C’est une décision qui est d'importance. D’ailleurs, elle fera certainement jurisprudence, évidemment pour les autres personnes qui ont été condamnées pour l'assassinat du préfet Erignac."

Maître Patrice Spinosi

Avocat de Pierre Alessandri

En termes d'anti-terrorisme, avez-vous un exemple d'une décision semblable à celle rendue ce mercredi par la Cour de cassation ?

C’est une décision qui est d'importance. D’ailleurs, elle fera certainement jurisprudence, évidemment pour les autres personnes qui ont été condamnées pour l'assassinat du préfet Erignac. Mais d'une façon plus globale, c'est une décision importante puisqu’en termes de droit à l'aménagement d’une peine, la Cour de cassation rappelle les principes fondamentaux : le droit à la réinsertion, le fait qu’il faille prendre en considération le parcours personnel du condamné, qu’on ne peut pas prendre en considération la nature des faits pour lesquels il a été condamné. Cela constitue le rappel des principes qui devraient guider normalement systématiquement le juge pénal. Et c'est assez heureux que la Cour de cassation juge du droit et rappelle à l'ensemble des juridictions pénales françaises.

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