À l'appel du collectif antiraciste Avà Basta, environ 80 personnes se sont rassemblées devant le monument aux morts de Cargèse. C'est au pied de la statue qu'a été mortellement blessé Salah Klaï, jardinier de 68 ans, le 31 janvier dernier.
Plus d'un mois après l'assassinat de Salah Klaï, l'incompréhension est toujours la même à Cargèse. Ce samedi 6 mars, à l'appel du collectif antiraciste Avà Basta, un rassemblement est organisé au pied du monument aux morts, où le jardinier de 68 ans d'origine tunisienne a été grièvement blessé par balles le 31 janvier dernier. L'homme est décédé des suites de ses blessures quatre jours plus tard au centre hospitalier d'Ajaccio.
À l'écart de la manifestation, quelques habitantes se regroupent. Elles viennent rendre hommage à celui qu'elles croisaient quotidiennement dans les rues du village. "On est sidéré, on ne lui connaissait pas d'histoire, et on savait très peu de choses de sa vie. Je savais juste qu'il avait quatre enfants", explique l'une d'entre elles qui n'arrive toujours pas à trouver d'explication à son assassinat.
Équipe : Florence Antomarhi ; Enzo Giuliano ; Mattea Luccioni
"Insurgeons-nous contre ce monumental silence"
Le président du collectif, Joseph Maestracci, prend la parole. Il ne qualifie pas cet assassinat de raciste, et insiste sur le fait que Salah Klaï "était Cargésien". "Il a vécu plus de temps à Cargèse qu'en Tunisie et il y a fait fleurir tous les jardins", raconte-t-il.
Adossée à une voiture, Lucienne hoche de la tête. "Il a travaillé dans le nôtre durant 25 ans. En ce moment, on le voyait un peu moins, mais il devait venir chez moi le dimanche où il a été tué. Je ne comprends pas pourquoi cet homme a été tué. Il travaillait honnêtement", livre-t-elle.
Joseph Maestracci dénonce "l'indifférence" suscitée par cette affaire. "Je suis étonné de l'absence d'associations, de syndicats et de leaders politiques aujourd'hui. […] Insurgeons-nous contre ce monumental silence", lance-t-il à la foule. Le président du collectif Avà Basta réclame justice, "trop de crimes se passent sans qu'ils soient élucidés."
Dans la foule, Jean-Toussaint Plasenzotti, oncle de Massimu Susini, jeune Cargésien assassiné en septembre 2019, et fondateur du collectif antimafia éponyme. "Salah Klai a le destin qu'ont beaucoup de morts en Corse, notamment ceux morts violemment. À savoir qu'on en parle le premier jour et on les oublie. L'initiative d'Avà Basta est intéressante, car elle ne veut pas que cette mort soit une mort anonyme. La responsabilité des gens, c'est de venir dire non, c'est le minimum qu'on puisse faire. On ne va pas arrêter les assassins, mais on peut donner du courage à ceux qui sont chargés de les arrêter", estime-t-il.
Un acte prémédité ?
Le 31 janvier dernier, vers 10 h 45, Salah Klai se rend au tabac à 40 mètres de chez lui. Il traverse le carrefour central et reçoit trois balles de fusil dans le dos, le bras et le genou.
La victime, est inconnue des services de police. Il a été jardinier, employé de service, il a travaillé dans des jardins particuliers et saisonniers durant presque 15 ans à l'UCPA, mais aussi cantonnier du village pendant deux étés.
Équipe : Florence Antomarchi ; Morgan Plouchart ; Vanessa Culioli.
Logeant au rez-de-chaussée d'une toute petite maison et touchait 500 euros par mois, une pension inférieure au minimum vieillesse. Le profil éloigne tout de suite l'enquête de la piste de la criminalité organisée.
L'enquête préliminaire ne retient pas d'altercation précédant le crime, mais un acte prémédité. L'auteur du crime tire et prend la fuite à pied. Pour Salah Klai, la piste de la méprise est considérée comme peu probable, toutes les autres restent envisagées.