Le 22 décembre dernier, le Premier ministre avait émis un premier avis de maintien du statut de DPS pour Pierre Alessandri et Alain Ferrandi. Une décision contestée par les détenus, mais confirmée le 12 janvier. Les deux hommes restent donc bien inscrits sur le repertoire DPS.
La décision est tombée le 12 janvier, confirmant un premier avis défavorable émis par le Premier ministre le 22 décembre dernier : Pierre Alessandri et Alain Ferrandi conservent leur statut détenus particulièrement signalés (DPS). Toute possibilité de rapprochement en Corse est de fait compromise, de même qu'une libération conditionnelle, à laquelle ils peuvent prétendre depuis 2017.
Les deux hommes, détenus sur le continent depuis 1999 pour l'assassinat du préfet Erignac, avaient contesté en fin décembre cette décision. Des audiences se sont tenues depuis le centre pénitentiaire de Fresnes (Val-de-Marne) le 31 décembre pour Pierre Alessandri, et le 4 janvier pour Alain Ferrandi.
Appel à la mobilisation
Un appel à la mobilisation "la plus ample possible" le 30 janvier devant la préfecture d'Ajaccio a été lancé, fin décembre, par la section corse de la Ligue des droits de l'Homme et l'Ora di u ritornu. Car pour les deux associations, les cas de Pierre Alessandri et Alain Ferrandi est une "question sociétale qui touche toutes les couches de la société".
"On souhaite que les parlementaires se saisissent également de ce dossier qui malgré tout, pose sur le plan de la jurisprudence un certain nombre de problèmes", glisse Thierry Casanova, porte-parole du collectif l'Ora di u ritornu.
Ce qu'a fait Jean-félix Acquaviva qui, dans l'hémicycle, a parlé ce jeudi 14 janvier d'"acharnement et de vengeance d'Etat".
Nous avons interpelé ce matin le Garde des sceaux au sujet du maintien arbitraire du statut de #DPS pour Pierre Alessandri et Alain Ferrandi. En démocratie, la vengeance d'Etat ne peut être tolérée. Ne pas le passer sous silence et se mobiliser @LOraDiURitornu #DirectAN pic.twitter.com/h4p7DJBeVa
— Jean-Félix Acquaviva (@JF_Acquaviva) January 14, 2021
Le ministre de la Justice écarté
Deux faits particuliers ont marqué ce rejet de demande de levée du statut de détenus particulièrement signalé : le premier, en mars 2020, la commission locale DPS avait donné un avis favorable à la radiation du répertoire de Pierre Alessandri et Alain Ferrandi. Si cet avis reste consultatif, il est, dans l'immense majorité des cas, suivi.
Second élément sortant de l'ordinaire, et évoqué par le député à l'assemblée Nationale : l'avis a été émis par le Premier ministre plutôt que par le garde des Sceaux, habilité à se prononcer.
Le 18 décembre 2020, Jean Castex avait interdit le ministre de la Justice tout regard sur "des actes de toute nature relevant des attributions du garde des Sceaux, ministre de la Justice, relatifs aux conditions d’exécution des peines et au régime pénitentiaire de personnes condamnées qui ont été, directement ou indirectement, impliquées dans les affaires dont il a eu à connaître en sa qualité d’avocat (…)".
Car Eric Dupond-Moretti connaît bien l'affaire et les deux détenus : en 2011, l'ex-pénaliste a assuré la défense d'Yvan Colonna, jugé aux côtés d'Alain Ferrandi et Pierre Alessandri pour l'assassinat du préfet Claude Erignac. Les trois hommes ont été condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité.
Sur les bancs de l'assemblée Nationale, il a répondu à Jean-Félix Acquaviva. Et le ton employé, comme les propos tenus, laissent peu de doutes sur sa position quant à cette affaire...
Maintien arbitraire du statut de DPS Ferrandi et Alessandri : la réponse du Garde des sceaux @E_DupondM pic.twitter.com/3W08yXi3Lv
— Jean-Félix Acquaviva (@JF_Acquaviva) January 14, 2021
En 2006, Eric Dupont-Moretti avait obtenu l'acquittement de Jean Castela, suspecté de faire partie de la "cellule du Nord" du commando Erignac.
Qu'est-ce-que les DPS ?
Le statut de DPS, ou détenu particulièrement signalisé, est invoqué dans le cadre de prisonniers particulièrement suivis, faisant l’objet d’une surveillance particulière et de conditions d’incarcérations spécifiques (déplacements limités, notamment). Ce statut peut être appliqué pour diverses raisons : la personnalité du détenu (risque d’évasion, fiché au grand banditisme…), ou son comportement en détention (pour des détenus particulièrement violents ou ayant pris part à des émeutes) mais également dans le cadre d’un prisonnier médiatique, d’une personnalité, ou encore un fonctionnaire de police, magistrat, ou surveillant de l’administration pénitentiaire.
Au 1er août 2018, on recensait 273 DPS en France. Selon l’administration pénitentiaire, la prison de Borgo n’est pas apte à recevoir des transferts de prisonniers inscrits au répertoire DPS.