Invitée de notre rédaction, la directrice de l'Agence Régionale de Santé de Corse Marie-Hélène Lecenne recommande d'appeler le Samu en cas de problème de santé avant de se déplacer aux urgences. En pleine grève des médecins libéraux, l'objectif est d'éviter d'engorger les hôpitaux insulaires.
En grève entre le 25 et le 29 décembre, le collectif des médecins libéraux parle d'un risque d'effondrement du système de soins en Corse. Partagez-vous cette crainte ?
Je partage un certain nombre de constats, en termes de densité de médecins généralistes et de spécialistes. Aujourd'hui, pour les généralistes, on est dans une situation favorable, tandis que pour les spécialistes, beaucoup moins. Mais nous nous attendons effectivement à un certain nombre de départs en retraite dans les 5 années qui viennent, et c'est un enjeu véritable. En même temps, on a un vieillissement de la population. Donc on comprend les revendications et les attentes des médecins. Depuis le 15 novembre, une négociation nationale est ouverte avec la Cnam et c'est dans ce cadre que les travaux sont conduits pour tenir compte de cette situation qu’on connaît dans la France entière et plus particulièrement en Corse, d'une densité médicale qui diminue et en même temps d'un vieillissement de la population qui requiert davantage de soins.
Le collectif en Corse est composé de 300 médecins libéraux sur les 550 que compte l'île. Cela devrait mécaniquement augmenter la fréquentation des services d'urgence. Des mesures particulières ont-elles été prises pour absorber un éventuel afflux de patients aux urgences ?
Ce qui va être difficile, c'est effectivement de prendre contact avec son médecin traitant s'il est gréviste. Néanmoins, nous avons nos dispositifs de soins non programmés qui fonctionnent à Ajaccio et Bastia. Mais pour ne pas mettre en difficulté les services d'urgence, je crois que chacun d'entre nous doit être responsable : on fait le 15, on a d'abord une évaluation de notre demande en soin, puisque la régulation est au complet. Il vaut mieux éviter de se rendre aux urgences pour leur laisser la possibilité de faire leur métier, c’est-à-dire de traiter les urgences.
Ces personnels sont fortement sollicités et déplorent un manque de moyens. Que pouvez-vous leur répondre ?
Il n'y a pas de limitation en termes d'embauche, la difficulté pour les services hospitaliers corses, c'est plutôt de trouver des praticiens qui veulent s'investir sur la durée. Donc on a une question d'attractivité, cela touche aussi aux organisations et donc on travaille avec les centres hospitaliers pour améliorer cette attractivité. Aujourd'hui, on a une baisse d'activité constatée dans tous les services d'urgence sur l'île, sauf sur Bastia. C'est Bastia qui nous préoccupe le plus et il y a eu une organisation adaptée pour ces vacances de fin d'année où on sait qu'on a un afflux de populations supplémentaires. Néanmoins la tension n'est absolument pas négligeable et il faut vraiment faire le 15 avant de se déplacer aux urgences. C'est le message que je préconise.
Retrouvez l'intégralité de l'entretien mené par Frédéric Danesi :