Le match de ce soir, contre Dijon, lance le sprint final des Bleus, qui se sont relancés dans la course à la montée la semaine dernière face à Annecy. Cinquième du championnat, il n'a pas droit à l'erreur. Du côté des supporters, comme des anciens joueurs, on sait le Sporting taillé pour ce genre de combats.
Joseph s'est installé, dans son jardin, un roman policier écossais à la main, manière de patienter avant le coup d'envoi de Dijon-Bastia, ce soir à 19 heures, sur la pelouse du stade Gaston Gérard. Il est supporter depuis l'enfance. Il a tout connu, avec les Bleus. Des plus belles épopées aux désillusions les plus amères.
Il y a un côté irrationnel, avec le Sporting
Joseph
Et la flamme brûle encore. Joseph ne manquerait le match de ce soir pour rien au monde. Quand on lui demande s'il croit à la montée du SCB en L1, la réponse ne se fait pas attendre. "Il ne faut jamais dire jamais, quand Bastia est dans l'équation. Regardez cette saison. J'ai vu jouer Metz, samedi dernier, contre Bordeaux. Ils ont gagné 3 à 0. Ils ont une équipe globalement supérieure à nous, ils s'appuient sur un gros centre de formation, et nous, revenus de nulle part, on est à 4 points d'eux... C'est miraculeux, ce que fait le SCB".
Il le reconnaît, "Il y a un côté irrationnel, avec le Sporting. Alors, sans surprise, nous aussi, les supporters, on n'est plus rationnels ! On est plus proches des Napolitains que des Scandinaves, aucun doute", s'amuse celui que tout le monde appelle Jo. "Moi, même après Bordeaux, alors qu'on n'avait pas été flamboyants, j'y croyais. Et je n'avais pas tort. Face à Annecy, une semaine plus tard, on a remis les pendules à l'heure !"
Sur un malentendu...
Mathieu, lui, est plus jeune que Jo. Mais la passion n'est pas moins profonde. L'enseigne de sa pizzeria du quartier Saint-Joseph annonce la couleur : "L'accanitu". L'intérieur est un autel dédié au Sporting. Drapeaux, fanions, fresque, et un mur entier recouvert de photos retraçant l'histoire du club. Alors que l'on entame la discussion, Mathieu se veut néanmoins prudent. "Quand on regarde la situation à tête reposée, on se dit que ça va être compliqué. La fin du championnat approche, et on est encore à cinq points de la deuxième place, synonyme de montée..."
Rien que pour l'excitation, pour la passion que ça va provoquer...
Mathieu, supporter
Au fur et à mesure, le stintu turchinu reprend néanmoins le dessus : " Mais sur un malentendu, ça peut toujours passer !", s'emballe de jeune homme en souriant. "Au fond de nous, on y croit toujours".
On passe en revue le parcours du Sporting depuis l'été 2017, où ce dernier redémarrait péniblement des tréfonds du National 3, jusqu'à la bataille pour l'accession qui se profile.
Logiquement, on interroge Mathieu sur les dangers possibles d'un retour trop rapide du club parmi l'élite du football français. Un bémol qu'il balaie d'un revers de main : "au niveau de l'infrastructure, du budget et de l'expérience, on n'est peut-être pas prêts. Mais une montée en Ligue 1, ça ne se refuse pas. Et puis il y a les droits télé, qui nous permettraient de continuer de nous structurer. La Ligue 1, c'est un autre monde... Rien que pour l'excitation, pour la passion que ça va provoquer, évidemment que ce serait bien qu'on monte !"
Ferveur et solidarité
Pour François, abonné historique en tribune Sud, l'équipe de Brouard a tout ce qu'il faut pour se mêler à la bataille. "La trêve pour la Coupe du monde, à l'automne dernier, nous a fait un bien fou. Le groupe pris confiance en ses capacités. Depuis, la dynamique est de notre côté. C'est mieux dans le jeu, mais l'état d'esprit est également irréprochable. Il y a une belle solidarité, tout le monde semble concerné, les titulaires comme les remplaçants. A ce titre, la remobilisation après la défaite de Bordeaux en dit long..."
Ces clubs, pour beaucoup, joueront leur peau en L2 face à nous
François
Mais François tient à rappeler que les supporters auront un rôle majeur à jouer dans cette fin de saison. "Il faut que l'équipe sente que tout le monde est derrière elle. L'ambiance au stade est spectaculaire, le public est au rendez-vous. Et puis, il y a quelque chose qui ne trompe pas. La ferveur, on commence à la sentir partout, pas seulement dans les tribunes. Au bureau, sur les réseaux sociaux, on en parle de plus en plus, de cette fin de saison..."
Ce qui l'inquiète un peu, ce sont les prochains matches du Sporting, de prime abord les plus abordables... "Ces clubs, pour beaucoup, joueront leur peau en L2 face à nous, à l'image de Dijon, Amiens ou Laval. Il faudra faire le job contre ces équipes-là. Mais personne, parmi les supporters du Sporting, ne vous dira qu'il n'y croit pas !"
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Après la fougue des supporters, il nous semblait judicieux d'aller voir du côté des professionnels, pour parvenir à prendre le recul nécessaire.
Yannick Cahuzac est peut-être le joueur le plus emblématique du Sporting des ving dernières années. Durant 17 ans, dont une belle partie avec le brassard de capitaine, il a vécu l'histoire du SCB aux premières loges, les montées flamboyantes comme les relégations cruelles.
Il y a une vraie identité, j'y retrouve les valeurs qui caractérisent le club
Yannick Cahuzac
En mai 2012, il remportait le titre de champion de L2, dans une ambiance indescriptible.
Certes, treize ans plus tard, le scénario n'a pas grand chose à voir. A l'époque, le Sporting dominait son sujet, et n'avait pas connu les matches couperet qui attendent Christophe Vincent et ses hommes.
Mais sans surprise, Yannick Cahuzac n'est de toute façon pas homme à donner la moindre le leçon à ses successeurs. Même s'il suit une formation pour devenir coach, tout en étant en parallèle l'adjoint de Franck Haise à Lens, tout comme un autre ancien joueur bien connu des supporters bastiais, Lilian Nalis.
Une nouvelle activité qui ne l'empêche pas de suivre attentivement le parcours des Bleus.
"Depuis le jour où j'ai quitté le club, ça a toujours été comme ça. Et je prends vraiment beaucoup de plaisir à les voir évoluer cette saison. Dans le jeu c'est cohérent, il y a une vraie identité, j'y retrouve les valeurs qui caractérisent le club. Dès que je peux je regarde les matches".
C'est le moins qu'on puisse dire. En effet, Yannick Cahuzac connaît sur le bout des doigts la position des différents prétendants à la montée, et le calendrier des Bastiais dans les semaines à venir.
Quand on lui demande s'il pense que que le SCB a sa chance, il aborde tout de suite la question du goal average, "qui n'est pas favorable au Sporting, et ça peut avoir son importance. Mais je sais une chose. Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir. Et s'il y a un club capable de réussir cet exploit, c'est bien Bastia".
7 matches sur 7, ils peuvent le faire !
Yannick Cahuzac
Yannick Cahuzac a quitté le club, la mort dans l'âme, au moment de la descente aux enfers du Sporting, en 2017. A un moment difficile, alors que l'on s'interrogeait sur le futur des Bleus, et que certains se demandaient même s'il lui en restait un.
Cette renaissance bastiaise le remplit donc de joie. "C'est fantastique. Ca prouve une fois de plus que ce club est immortel. Je suis content, mais pas étonné. Je le connais par coeur, ce club. Quand tu portes ce maillot, tu es transcendé".
Et Yannick Cahuzac conclut notre entretien avec une modération qui prouve qu'il n'est pas que l'un de ses joueurs les plus marquants, mais qu'il reste aussi un vrai supporter du SCB : "Lors des prochains matches, il faut qu'ils jouent comme contre Annecy. Il reste 21 points à prendre, et le 7 sur 7, ils peuvent le faire !"