Plusieurs régions de France sont soumises depuis ce lundi 5 juin à des arrêtés de restriction d'eau. La Corse n'est à ce stade pas concernée. Pour faire en sorte de prolonger cette situation, les filières agricoles insulaires ont collectivement décidé de la mise en place de restrictions d'irrigation volontaires.
Du maïs, de l'orge, de la luzerne, des légumineuses... Ce matin, comme tous les jours, Ange-Noël Luigi surveille ses cultures, plantées sur les 63 hectares de sa parcelle en plaine orientale.
Des cultures qu’il faut évidemment arroser, mais pas n’importe comment : réunies il y a plusieurs semaines, les différentes filières agricoles de l’île ont décidé d’anticiper un potentiel manque d’eau en se fixant des restrictions dès le début du mois de juin : ainsi, chaque filière stoppera l’irrigation à raison de 24h par semaine.
"On n'arrosera pas à compter du mercredi 6h au jeudi 6h", précise ainsi Ange-Noël Luigi. L'objectif, poursuit celui qui est également président du groupement des fourragers de Corse : permettre que les réserves en eau des barrages "soient maintenues sur une plus longue durée."
Repousser de potentiels arrêtés de restriction d'eau
Plusieurs arrêtés préfectoraux de restriction d'eau ont déjà été pris dans diverses régions du territoire national. La Corse n'est pour l'heure pas concernée. Un bon point que les agriculteurs insulaires souhaitent voir se prolonger en se restreignant de leur propre initiative : "nous pouvons éventuellement imaginer que les niveaux d'alerte qui seraient pris à la préfecture soient décalés le plus tard possible", espère le céréalier.
Car cette restriction volontaire devrait permettre de faire de grosses économies d’eau : au total, elle concernerait 10.273 hectares agricoles sur l’île, toutes filières confondues.
Avec le fourrage et les céréales, la filière viticole de Corse est elle aussi particulièrement gourmande en eau. Sur sa parcelle de 22 hectares, située à Vescovato, qui compte plusieurs cépages, François Franceschi, vigneron et également vice-président de la filière viticole en Corse, a décidé d’anticiper lui aussi en installant une pompe d’irrigation.
Le dispositif reste pour l’instant à l’arrêt : "Dame nature a été généreuse avec nous la semaine dernière, puisqu'on a bénéficié de 65 à 70 mm d'eau sur la Casinca", sourit-il.
Pour François Franceschi, même s’il est important de rester prudent en stoppant l’irrigation 24h par semaine, la situation est pour autant cette année bien meilleure que celle de l’été dernier.
"Les stockages sont au point haut aujourd'hui. Tant mieux. Et si par bonheur nous avons une autre pluie courant juin, je pense que la viticulture arrosera très peu cet été. Comme on dit en corse : risparmià a nostra acqua", conclut-il.
L'été dernier, face à la récurrence d'épisodes de sécheresse, la préfecture de Corse avait placé l'île à un niveau d'alerte renforcé, et les agriculteurs avaient dans ce cadre été touchés par des restrictions d'irrigation plus importantes encore. Une situation qu'ils espèrent cette année éviter.
Retrouvez le reportage de Jean-André Marchiani, Typhaine Urtizverea, et Stéphan Regoli :