Alors que la cour administrative d’appel de Marseille a confirmé l’interdiction de la langue corse dans les débats à l’Assemblée de Corse, plusieurs rassemblements ont eu lieu ce jeudi 28 novembre sur l'île. À Corte, à l'appel de deux syndicats, une quinzaine d'étudiants s'est réunie pour exprimer son mécontentement.
Dans la matinée de ce jeudi, une quinzaine d'étudiants s'est rassemblée devant le Palazzu Naziunale à Corte. Ce mouvement fait suite à la décision de la cour administrative d'appel (CAA) de Marseille il y a deux jours, confirmant le jugement prononcé en première instance par le Tribunal Administratif (TA) de Bastia en mars 2023, qui avait annulé les règlements intérieurs de l’Assemblée de Corse.
Ces derniers prévoyaient que les langues des débats et des travaux des deux organes de la Collectivité soient le corse et le français.
"Nous ne sommes pas surpris qu'il n'y ait aucune reconnaissance de la langue corse, car l'État français ne prône qu'une seule langue sur l'ensemble du territoire, la langue française", confie Batti Mariani, le secrétaire du syndicat Ghjuventù Paolina, à l'origine du mouvement. "Mais nous ne sommes pas d'accord avec cette décision, c'est pour cela que nous menons cette action aujourd'hui".
La mobilisation de Corte est à l'appel de deux syndicats étudiants : Ghjuventù Paolina (GP) et Ghjuventù Indipendentista (GI). Les étudiants appellent tous les Corses et le monde syndical à se rassembler ce dimanche 1er décembre à Corte pour exprimer leur colère face à cette décision.
Perturbations devant plusieurs lycées
Une mobilisation à Corte, mais aussi à Bastia et à Porto-Vecchio.
Devant la préfecture de Haute-Corse à Bastia, des lycéens de Giocante de Casabianca se sont rassemblés et ont accroché plusieurs banderoles. "Vous ne nous empêcherez jamais de parler notre langue", peut-on lire sur une d'entre elles. Les pompiers sont intervenus en début d'après-midi afin d'éteindre quelques feux de poubelles.
Les CRS étaient présents sur les lieux, mais il n'y a eu aucun affrontement.
Blocage en cours au lycée de portivechju. Lingua corsa lingua ufficiale ✊🏻 pic.twitter.com/BXc1Axv0AS
— kissing pigs (@kissingpigs) November 28, 2024
Plus tôt dans la matinée, une quarantaine des lycéens s'est aussi rassemblée devant le lycée professionnel Jean Nicoli, suite à cette décision de la cour.
Dans son arrêt du 19 novembre, la Cour administrative d'appel a estimé que les dispositions du règlement intérieur "ont pour objet et pour effet de conférer le droit aux membres de l’Assemblée de Corse de s’exprimer, en séance de cette assemblée, dans une langue autre que la langue française".
Cette décision de la cour administrative d'appel (CAA) de Marseille n'a pas manqué de faire réagir. En plus des étudiants et jeunes mobilisés ce jeudi, les élus politiques ont aussi réagi dans la foulée de cette décision.
Dans un communiqué publié ce 25 novembre, Gilles Simeoni, le Président du Conseil exécutif de Corse et Marie-Antoinette Maupertuis, la Présidente de l'Assemblée de Corse, ont annoncé vouloir proposer aux conseillers territoriaux que la Collectivité forme un pourvoi devant le Conseil d'Etat, afin de "contester cet argumentaire devant les juridictions européennes et internationales".
Selon la Collectivité, l'arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Marseille est "contraire aux textes européens et internationaux protégeant les droits fondamentaux au plan linguistique".
"Priver les élus de parler leur langue"
D'où la nécessité, selon le Président du Conseil exécutif de Corse d'obtenir "au plus vite une révision constitutionnelle conférant un statut d'officialité à la langue corse".
Le 9 mars 2023, le tribunal administratif de Bastia avait donné raison au préfet de Corse Pascal Lelarge, qui avait jugé irrecevable la modification du règlement intérieur de l’Assemblée de Corse.
Le TA de Bastia avait annulé les articles des règlements intérieurs de l’Assemblée de Corse qui disposaient que "les langues des débats sont le corse et le français". Il considérait que cette disposition enfreignait l’article 2 de la Constitution, selon lequel "la langue de la République est le français".