La carte sécheresse, à laquelle seront conditionnées les aides de l'Etat aux agriculteurs de Haute-Corse, continue de faire polémique. En attendant de convaincre l'Etat de revoir la carte, une réunion, à la DDTM de Bastia, a permis de trouver une solution pour que toutes les demandes soient enregistrées.
À la sortie de la réunion du jeudi 7 mars, Joseph Colombani, le président de la chambre d'agriculture de Haute-Corse, semble soulagé.
Les discussions entre la directrice de la DDTM, les représentants de la Coordination rurale, les Jeunes agriculteurs, la FDSEA, et l'AOC Brocciu, n'avaient pas pour but, ce matin, de régler la question épineuse de la carte sécheresse en Haute-Corse, alors qu'une partie des communes du département sont exclues du dispositif, privant les agriculteurs y travaillant de bénéficier des aides.
L'objectif, c'était plutôt de trouver un moyen de limiter les dégâts, en attendant, tous les participants l'espèrent, que "l'Etat se raisonne, qu'il retrouve ses esprits, et qu'il rétablisse la justice". Et une solution s'est dégagée.
Compte à rebours
La date limite de dépôt des dossiers de demande d'aides est le 29 mars. Et pour l'heure, les agriculteurs qui résident sur des communes exclues de la carte sécheresse élaborée par l'Etat ne peuvent pas déposer de dossier par internet. Ou plutôt, ils le peuvent, mais lorsqu'ils renseignent leur commune, le dossier est automatiquement rejeté.
Alors il va falloir ruser, pour que leur demande soit malgré tout enregistrée.
"Nous allons lancer, avec la chambre d'agriculture, une grande opération, afin de dire aux agriculteurs concernés de déposer à la DDTM leur dossier grâce à des documents papier. Ainsi, la DDTM mettra son tampon et ils seront pris en compte".
Le problème, c'est que cela ne garantira pas qu'ils soient acceptés.
Mais ce n'est pas le plus important, pour l'heure. Ce qui est urgent, c'est de prendre date. Afin que, si l'Etat revient sur ses positions et revoit sa carte sécheresse après le 29 mars, aucun agriculteur ne soit oublié. "Le tout, c'est que les dossiers soient déposés", répète le président de la chambre.
Airbus contre Météo France
Reste désormais à convaincre Paris et ses représentants. Lundi matin, à la chambre d'agriculture de Haute-Corse, tous les syndicats se réuniront, "pour élaborer un argumentaire concret afin de démontrer que l'on est sur une aberration !", martèle Joseph Colombani.
Deux jours plus tard, mercredi 13 mars, une autre réunion se tiendra, cette fois-ci en présence du préfet de Corse et du préfet de Haute-Corse. Et c'est là qu'il faudra parvenir à convaincre l'Etat de prendre en compte la carte sécheresse de Météo France, et pas celle élaborée grâce au logiciel Airbus.
"Pour calculer les zones de sécheresse, Airbus utilise des implantations d'outils qui calculent la croissance de l'herbe. Figurez-vous qu'il y a quinze jours, dans une présentation de ces outils de croissance de l'herbe, il a été dit qu'il y avait deux régions en France qui ne disposaient pas pour l'instant de ces outils, PACA et la Corse !"
Le problème, à en croire Joseph Colombani, c'est que cela fausse tout : "je vous donne un exemple : à côté de chez moi, il y a une vigne qui est irriguée. Elle est donc verte. Avec une simple photo satellite, ils voient que la zone est verte. Donc ils en déduisent qu'elle ne souffre pas de sécheresse. Or si on avait eu cet outil de mesure de la croissance de l'herbe, on aurait vu que sur l'herbe spécifiquement, il y a un problème de sécheresse !"
Mercredi après-midi, les agriculteurs de Corse espèrent que l'Etat sera prêt à constater les manquements supposés de sa méthode. Mais, ça va être dur, lâche l'un des participants au moment de quitter la réunion, "Paris n'a pas l'argent pour payer, donc il ne veut pas payer. Et alors que les périodes de sécheresse sont de plus en plus fréquentes, si on cède sur ce dossier, ce sera toujours comme ça..."