Ce jeudi 14 novembre, le Secours catholique a publié son rapport annuel concernant l'état de la pauvreté en France. L’association alerte sur la dégradation du niveau de vie des plus pauvres et la difficulté à accéder à la protection sociale face à la dématérialisation des démarches administratives. Une réalité qui touche aussi la Corse.
Plus les années passent, plus la réalité devient difficile à lire. Cette année, plus d'un million de personnes ont été aidées par le Secours catholique. Parmi eux : 95 % vivent sous le seuil de la pauvreté, selon le rapport publié ce jeudi 14 novembre.
Cette étude est fondée sur les données collectées par l'association, en 2023, auprès de ses bénéficiaires. Sur le terrain, les bénévoles dressent un constat : les personnes dans le besoin, victimes de la pauvreté, sont majoritairement des femmes. "Elles représentent 57% des personnes rencontrées" et 24% d'entre elles élèvent seules leurs enfants.
Autre chiffre mis en avant et tout aussi alarmant : en 2023, 25 % des personnes accueillies étaient sans ressource : "un chiffre record qui témoigne de l’aggravation des conditions de vie", précise le communiqué. Le niveau de vie médian des ménages rencontrés pour réaliser cette étude s’établit à 555 euros par mois, soit 19 euros de moins que l'année précédente.
3.000 familles aidées en Corse
La Corse n'est pas épargnée par cette triste réalité. Les équipes du Secours catholique insulaire sont mobilisées au quotidien pour faire reculer la pauvreté. La délégation comprend 200 bénévoles et 4 salariés afin d'aider ceux dans le besoin.
Chaque année, ce sont près de 3000 familles ou personnes isolées, en difficulté ou à la rue, qui sont accueillies, aidées et accompagnées par le Secours Catholique en Corse. Un soutien, plus qu'essentiel, lorsque l'on sait que selon la récente étude de l'Insee, la Corse est la région la plus pauvre de France métropolitaine avec 18,3% de sa population qui vit sous le seuil de la pauvreté.
Les jeunes, de plus en plus pauvres
Sur notre île, les plus touchés sont les retraités, qui constituent 43% des ménages pauvres. Mais à en croire les données du Secours catholique, les jeunes sont aussi aujourd'hui frappés par la pauvreté. "35% des personnes accueillies ont moins de 15 ans", se désole le Secours catholique.
La pauvreté est aussi marquée dans les territoires ruraux isolés, où se trouvent une part importante de résidents retraités ou des actifs de l'agriculture, dont les salaires sont faibles. Par exemple, la communauté de communes de l'Oriente est ainsi celle qui recense le plus de personnes en situation de pauvreté, 26,7 %, devant la communauté de communes de la Castagniccia-Casinca (23,8 %), et celle de Pasquale Paoli (22,5 %).
Pour leur venir en aide, l'association du Secours catholique de Corse a plusieurs équipes locales sur le terrain, afin d'être au plus près de la population. Il y a huit antennes sur l'île : à Ajaccio, Bastia, Bonifacio, Ghisonaccia / Aleria, Lucciana, Porto-Vecchio, Propriano et Sartène.
"Un parcours du combattant"
Mais cette proximité a ses limites, et parfois elle ne suffit plus, comme en témoignent ces observations à l'échelle nationale. Dans son rapport, il est noté que "la solidarité nationale telle qu'elle s'exprime à travers les prestations sociales au fil des années, s'étiole et s'éloigne", alors que 60% des ménages évoquent des "accidents de la vie", comme une séparation, un déménagement, une maladie ou encore une perte d'emploi.
Le Secours catholique pointe du doigt le "durcissement" des critères d'éligibilité concernant le minimum vieillesse, les allocations chômage et le RSA. "La réforme de l’assurance chômage a fait basculer une partie des chômeurs vers l’inactivité, comme les jeunes actifs", peut-on lire dans le communiqué.
Un éloignement de l'administration
Un durcissement mais aussi un parcours du combattant concernant l'accès aux demandes de prestations. Grâce aux témoignages de leurs bénéficiaires, l'association observe que toutes les procédures sont semées d'embûches : "sans ordinateur, il est parfois impossible de consulter ses droits et de vérifier son éligibilité (...), les personnes font état de la froideur des liens avec les administrations avec une impossibilité de dialoguer (...),s’ajoutent des discours publics accusateurs envers les allocataires".
D'ailleurs, un chiffre parle de lui-même : un tiers des personnes éligibles au RSA ne le perçoivent pas.