L’armée russe a attaqué ce lundi de nombreuses villes, dont Kiev et Dnipro, avec plus de soixante-dix missiles, tuant au moins 11 personnes et détruisant de nombreuses infrastructures civiles, notamment électriques. Médecin ukrainienne installée à Ajaccio, le Dr Nataliya Khobta témoigne.
Il est 7h15 ce lundi matin, le Dr Nataliya Khobta, médecin à Ajaccio, est au téléphone avec son oncle de 72 ans resté à Dnipro en Ukraine. Deux explosions retentissent. "Ce n’est rien, ils bombardent". "Ils", ce sont les forces armées russes. A midi, Vladimir Poutine prend la parole à la télévision, et confirme que Moscou a lancé une campagne "massive" de bombardements en réplique à l’attaque (attribuée à Kiev par le Kremlin), qui a détruit une partie du Pont de Crimée. Inquiète, Nataliya sent bien que son oncle "comme beaucoup d'ukrainiens restés au pays" la préserve en "minimisant la gravité de la situation".
Les frappes sont violentes, le président ukrainien Volodimyr Zelenzky annonce "75 missiles, dont 41 abattus par nos défenses aériennes".
Les civils directement ciblés
Depuis Ajaccio, Nataliya Khobta appelle ses proches et compatriotes ukrainiens. L’une de ses amies, pédiatre à l’hôpital de Kiev, s’est réfugiée dans le sous-sol du bâtiment avec 40 enfants. Très vite, les médias ukrainiens font part d’un premier bilan de 11 morts et plus de 60 blessés. Scotchée devant sa télévision, Natalya assiste au "cauchemar d’un bilan qui s’alourdit à mesure que les corps sont retrouvés dans les décombres."
Ils n’ont pas réussi à nous briser ni en 3 jours ni en 6 mois, alors maintenant ils essayent de nous terroriser.
Nataliya Khobta
D’autres proches de la médecin, comme cette Ukrainienne réfugiée à Porto-Vecchio au début de la guerre avant de repartir à Dnipro, ne donnent pas signe de vie.
Au fil des minutes, la panique du matin se mue en colère "les bombardements ont ciblé des civils, c’est horrible. A Dnipro, les russes ont bombardé un bus à l’heure où les gens vont au travail. Ce ne sont pas les casernes qui ont été frappées, mais les immeubles d’habitations où vivent des familles innocente", s’émeut Natalyia.
Pour elle, Moscou a changé d’objectif dans la guerre menée en Ukraine : "Ils n’ont pas réussi à nous briser ni en 3 jours ni en 6 mois, alors maintenant ils essayent de nous terroriser. De détruire aveuglément pour toucher le moral de la population."
Faire preuve de résilience
Le médecin, arrivée en Corse en 2009, s’inquiète des discours entendus à la télévision russe "encore plus cruels que ceux de Poutine" mais reste persuadée que tous les russes ne sont pas en accord avec les actions du Kremlin "Certains russes nous aident en restant discrets pour protéger leurs familles restées en Russie. Ils ne disent rien publiquement, mais résistent à leur manière." Celle qui est à l’origine de quatre convois humanitaires déjà envoyés en Ukraine note des changements inquiétants dans le matériel médical demandé par ses confrères ukrainiens "On nous demande des produits d’urgence, pour faire de la médecine de guerre. On sent que la situation devient de plus en plus terrible".
Le prochain convoi doit rejoindre l’Ukraine le 24 octobre prochain, son mari a prévu de faire le voyage "Je me demande si je dois le laisser partir, je veux que mon fils soit fier de ses parents mais je commence à avoir peur, on ne sait pas comment ça va se terminer."
Les Ukrainiens contactés par Nataliya font eux "preuve de résilience", et se montrent "combattifs pour faire face aux attaques immondes" de Moscou, assure-t-elle.
Le médecin attend désormais des nouvelles de ses proches, muets depuis ce matin. Elle formule un vœu à destination des gouvernements occidentaux : "Il faut aller plus loin que les discours de condamnation et passer aux actes forts pour sauver l’Ukraine."