Le Premier ministre du Grand-Duché de Luxembourg dirigeait le gouvernement depuis 18 ans.
"Je constate qu'une majorité de la Chambre veut des élections anticipées, il n'y a pas d'autre choix que de présenter la démission du gouvernement. Je convoque un conseil de gouvernement à 10H00 (NDLR : jeudi 11 juillet 2013), et je présenterai la démission du gouvernement au Grand Duc". Jean-Claude Juncker.
Jean-Claude Juncker, Premier ministre du Luxembourg depuis 18 ans et doyen des dirigeants européens, a été contraint à la démission mercredi 10 juillet, après sept heures de débat et la défection de ses alliés socialistes suite à un scandale lié au service de renseignement.
Lâché par les socialistes
Mis en cause par une commission parlementaire pour sa "responsabilité politique" dans les dérives du service de renseignement (SREL), il avait accusé cette dernière d'avoir elle aussi failli dans le contrôle des activités de ce service. Admettant tout au plus quelques "erreurs", il s'était presque posé en victime : "je ne suis pas d'accord pour endosser la responsabilité, car si c'était le cas, chaque ministre devrait alors être responsable de la moindre erreur commise par un fonctionnaire".Les socialistes, ses alliés au gouvernement, l'avaient lâché dans l'après-midi en déposant une motion demandant la dissolution de la Chambre des députés et l'organisation d'élections anticipées dans les trois mois. Son parti chrétien social se retrouvait donc isolé avec 26 députés sur 60.
"Le Premier ministre doit prendre ses responsabilités, non pas parce qu'il est malhonnête ou incompétent mais parce qu'il a fait les mauvais choix. Sa responsabilité est engagée." Alex Bodry, président du parti socialiste luxembourgeois.
Juncker ne quitte pas la vie politique
Des élections vont être organisées, probablement en octobre et Jean-Claude Juncker a indiqué aussitôt qu'il pensait se représenter à un mandat politique dans son pays, sans préciser s'il entendait de nouveau briguer le poste de chef du gouvernement.
En cas de retrait de M. Juncker, la question de sa succession reste ouverte. Toujours très populaire, notamment auprès des jeunes, il pourrait tenter de se succéder à lui-même en étant en octobre tête de liste des chrétiens-sociaux, la première formation politique du pays.
Mais d'autres noms sont évoqués, en particulier celui de Viviane Reding, la granderivale de M. Juncker au sein de son parti, exilée depuis près de 15 ans à la Commission européenne à Bruxelles, où elle est actuellement chargée de la Justice.
Membre du gouvernement luxembourgeois sans discontinuer depuis plus de 30 ans, Jean-Claude Juncker est accusé par ses détracteurs d'avoir délaissé son petit pays au profit de l'Europe, son grand engagement, et de l'euro, pour lequel il s'est battu pendant huit ans à la tête de l'Eurogroupe.
Inamovible Premier ministre du Luxembourg depuis janvier 1995, Jean-Claude Juncker, était le dernier grand artisan de la construction européenne. A seulement 58 ans, il détenait le record de longévité à la tête d'un gouvernement européen, ayant rejoint le club des dirigeants de l'UE alors que François Mitterrand et Helmut Kohl étaient encore au pouvoir.
Juncker tombe pour une histoire d'espionnage
Le compte à rebours a commencé en décembre 2012, quand une commission d'enquête parlementaire a été créée après la révélation d'une écoute faite par l'ancien chef du service de renseignement lors d'un entretien dans le bureau même du Premier ministre. Le SREL, placée sous l'autorité hiérarchique du chef du gouvernement, est aussi accusé d'avoir fiché des milliers d'habitants, tenté de déstabiliser un magistrat, sans compter des malversations comme des reventes de voitures de luxe achetées à prix réduit dans les années 2004-2009.Le climat avait été alourdi par des accusations contre le ministre des Finances, Luc Frieden, soupçonné d'avoir tenté d'étouffer, lorsqu'il était à la Justice, l'enquête sur une série d'attentats à la bombe qui avait traumatisé le pays dans les années 80.