Transports : le Parlement européen bloque la libéralisation du rail

Les députés européens réunis en plénière à Strasbourg ont bloqué mercredi une tentative de la Commission européenne de briser les monopoles des grands opérateurs dans le transport des passagers par le rail pour assurer l'ouverture de ce secteur à la concurrence.

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Les Eurodéputés ont adopté un projet de réforme qui comprend trois domaines d'actions : une norme unique pour la certification des matériels ferroviaires, des dispositions pour ouvrir le transport des voyageurs à la concurrence et une disposition séparant les activités d'opérateur et de gestionnaire de réseau.

Deux amendements approuvés par 439 voix contre 207 et 16 abstentions ont toutefois affaibli la séparation entre la gestion des infrastructures et l'activité de transporteur, qui est combattue par la SNCF en France et la Deutsche Bahn en Allemagne.

Ils permettent en effet la poursuite des flux entre l'opérateur ferroviaire et le gestionnaire des infrastructures.

Le commissaire aux Transports Siim Kallas n'a pas caché sa déception. "Ce vote est très décevant car ces amendements vont limiter la concurrence", a-t-il soutenu. L'objectif de la séparation est "d'éviter que les flux financiers tirés des infrastructures ne soient utilisés par les opérateurs pour en tirer un avantage sur d'autres marchés", plaide encore Siim Kallas. 

L'eurodéputé socialiste français Gilles Pargneaux s'est félicité au contraire de ce vote qui "fait dérailler la libéralisation ferroviaire". "La Commission européenne ne jure que par la libéralisation avec, comme moyen pour y parvenir, le dégroupage total et la séparation entre gestionnaires de l'infrastructure et opérateurs ferroviaires. C'est pour moi inacceptable", a-t-il affirmé. "J'ai défendu la liberté, pour les autorités organisatrices, de décider si elles ouvrent leurs contrats de services publics à la concurrence ou non, c'est-à-dire de décider si elles passent par une procédure d'appel d'offre ou pas. Cette éventuelle ouverture du marché doit, dès le départ, s'accompagner de mesures empêchant le dumping social", a-t-il déclaré dans un communiqué.

Plusieurs milliers de cheminots européens avaient dénoncé les projets de la Commission au cours d'un rassemblement mardi devant le siège du Parlement européen à Strasbourg. Les gouvernements européens doivent maintenant se prononcer sur ce paquet de mesures et sur la base de leur décision, engager des négociations avec le Parlement européen.

Un modèle français ? 

"Le vote aujourd'hui en plénière est une nouvelle démonstration de la ténacité des intérêts nationaux qui se sont révélés plus convaincants pour les députés que les compromis équilibrés et bien motivés", a accusé Siim Kallas. Le commissaire a annoncé dans un communiqué qu'il pourrait modifier ses propositions, voire les retirer.

 "Notre réforme ferroviaire, non seulement elle est euro-compatible, mais en plus elle a impulsé une démarche", s'est réjoui mercredi soir le ministre français des Transports Frédéric Cuvillier, lors d'une conférence de presse à Paris sur la filière ferroviaire. "Là où nous disons que nous existons, que nous souhaitons exister, et que nous souhaitons entraîner une certaine vision de l'Europe, nous sommes écoutés, nous faisons bouger les lignes", a-t-il commenté. Selon lui, Siim Kallas "veut qu'il y ait un modèle d'organisation qui s'impose dans les pays qui ont une tradition ferroviaire".

La réforme ferroviaire française, dont la première lecture aura lieu le 16 juin à l'Assemblée nationale, doit être mise en place au 1er janvier 2015.
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