Marcel Guillot, 93 ans, le détenu le plus âgé de France, doit répondre à partir d'aujourd'hui devant les assises de la Marne, à Reims, du meurtre en 2011 d'une femme de 82 ans pour laquelle il avait "un béguin" mais qui lui avait fermé sa porte.
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"C'est un homme sans histoire, serviable, jamais violent, qu'on appelle communément Papy Marcel. Il avait nourri une relation passionnelle avec la victime qui l'a froidement congédié", explique Jean-François Delmas l'avocat de l'accusé, est aujourd'hui le détenu le plus vieux de France. "Elle la grande bourgeoise, lui le prolétaire. Même s'ils se connaissaient depuis longtemps, cet amour-là était impossible, pour elle tout du moins", souligne-t-il.
Selon l'avocat, c'est un vieil homme diminué par "quelques absences et des problèmes d'audition" qui comparaîtra mercredi devant les jurés des assises, accusé de "meurtre sur personne vulnérable", un crime passible de la réclusion criminelle à perpétuité. "Un garçon remarquablement ordinaire", né entre les deux guerres dans une famille aimante. Sans le certificat d'étude, Marcel Guillot devient peintre à douze ans, puis bûcheron dans les Vosges avant de se cacher pour échapper au STO. Après guerre, on le retrouve vitrier aux Chemins de Fer puis jusqu'à sa retraite, agent d'entretien dans une clinique de la région parisienne.
Veuf depuis 2004, il est le père de deux enfants dont l'un est en dépression sévère depuis la révélation des faits. "Son épouse était une amie d'enfance de la victime, Nicole El Dib qui avait fait un riche mariage. Les deux couples se fréquentaient régulièrement et partaient de temps en temps en voyage", a indiqué l'avocat. "Les débats risquent d'être compliqués, hormis sa surdité, ce qu'il a fait lui fait horreur et il cherche à l'occulter pour pouvoir mourir tranquillement même si cela est impossible", a-t-il précisé.
Le 7 décembre 2011, le corps de Mme El Dib, 82 ans, qui présentait de nombreuses traces de coups violents et de strangulation, avait été retrouvé par le gardien dans le ruisseau qui traverse sa propriété, un vaste corps de ferme juché au milieu d'un grand parc en bordure du village de Saint-Gilles, au sud de Fismes (Marne).
"Un crime d'orgueil"
Après 5 mois d'enquête et plus d'une centaine d'auditions dont celle de Marcel Guillot, les gendarmes de Reims avaient interpellé l'accusé dans un camping de l'Ile d'Oléron où il passait habituellement ses vacances. Confondu par l'analyse ADN de traces de sang retrouvées sur sa montre abandonnée sur la scène de crime, le vieil homme avait reconnu une partie des faits expliquant qu'il avait été humilié par la victime et qu'il s'était rendu chez elle de nuit pour lui infliger une correction, une "rompée" avait-il précisé aux enquêteurs.Quelques mois avant les faits, l'octogénaire s'était retrouvée seule dans sa propriété à la suite de l'hospitalisation de son mari, atteint de la maladie de Parkinson,décédé depuis. La victime avait alors convié Marcel Guillot dans la propriété le temps d'engager un gardien. Après un séjour d'environ trois semaines durant l'été 2001, Mme El Dib l'aurait alors congédié sans ménagement avant de lui confirmer ultérieurement sa décision de ne plus jamais le recevoir.
L'accusé, qui a reconnu lors de sa garde à vue "un certain béguin" pour la victime, avait alors "ruminé une sorte de vengeance au regard de l'humiliation qu'il a ressentie après avoir été repoussé", avait-on indiqué au parquet. "Ce n'est pas un crime d'amour mais un crime d'orgueil commis par un homme frustre lui a fait subir à cette femme pleine de vie un véritable calvaire", affirme Jean-Marie Job, l'avocat des parties civiles en rappelant que Marcel Guillot était présent lors des obsèques de Nicole El Dib et "a cyniquement présenté ses condoléances à la famille".
Le verdict est attendu vendredi en fin de journée.