250 enfants sans AVS en Alsace : "nos enfants ont droit à la scolarité comme les autres", s'insurgent des parents

Plus d'une semaine après la rentrée scolaire, 250 enfants n'ont toujours pas d'auxiliaire de vie scolaire, en Alsace. Une situation inacceptable pour le Collectif citoyen handicap, d'autant que beaucoup d'autres ne sont accompagnés que quelques heures. Les parents sont prêts à saisir la justice.

4 % des élèves handicapés n'ont pas d'auxiliaire de vie scolaire, des recrutements sont toujours en cours, voilà ce qu'a déclaré Sophie Cluzel, secrétaire d'État en charge des personnes handicapées, ce mercredi 11 septembre, sur Europe 1. Le Collectif citoyen handicap évalue à 8.000 le nombre d'enfants sans AVS en France, dont 250 en Alsace. 
 
"On a l'impression que c'est la même chose chaque année", juge Marie Lettler, mère d'un enfant autiste de 11 ans et militante au sein de ce Collectif citoyen handicap, qui déplore le manque d'anticipation au niveau des recrutements et une formation insuffisante des auxiliaires de vie scolaire.

"Chaque année, on se retrouve à compter les AVS à la rentrée. On a l'impression que le rectorat attend que les parents s'agitent début septembre pour préparer des recrutements, alors que les besoins sont connus dès le mois de mai. Sans compter que les AVS n'ont que 60 heures de formation initiale et 6 heures de formation continue. Résultat des courses, ils ne sont pas capables d'apprendre l'autonomie aux enfants, qui deviennent finalement dépendants des adultes."


Des AVS à partager...quand il y en a

Pour le collectif, la situation aurait même tendance à se dégrader cette année. Il pointe du doigt les Pial (Pôles inclusifs d'accompagnement localisé), déployés par l'académie de Strasbourg pour renforcer sa "politique d'inclusion" en cette rentrée. Selon les militants, ils auraient contribué à multiplier les AVS "mutualisés", c'est-à-dire rattachés à des groupements d'école et censés s'occuper de plusieurs enfants, entre trois et cinq en général, sur des établissements différents, au détriment d'AVS individualisés. 
 
"Cette histoire de mutualisation fait mentir les chiffres, peste Marie Leffler. Certains enfants ont un accompagnement mais de deux, trois, quatre heures à peine. La nouvelle mode, c'est de ne pas faire figurer le nombre d'heures sur la notification pour un AVS, ce qui ouvre la porte à toutes les possibilités. Le suivi se fait en fonction des moyens disponibles plutôt que des besoins, et un même AVS peut tout à fait intervenir en primaire pour un enfant autiste et au collège pour un handicap complètement différent."
 

Les parents obligés d'arrêter de travailler

Sevda Benyacoub est directement confrontée à ce problème. Son fils Mehdi, 8 ans, souffre de troubles autistiques et d'une épilepsie pharmaco-résistante. En CE1 dans une classe Ulis (unités localisées pour l'inclusion scolaire) à l'école Saint-Nicolas à Haguenau, il doit bénéficier d'un AVS, qu'il partagerait avec d'autres enfants, mais depuis la rentrée : personne. Or, dès que Mehdi doit travailler en autonomie pour permettre à la maîtresse - "superbe" - de s'occuper d'autres élèves, il décroche.

"Il a besoin d'un AVS individualisé, tous les professionnels qui l'entourent le disent, explique sa maman. Mehdi allait de temps en temps dans une école ordinaire mais on a dû arrêter l'inclusion : sans AVS, ce n'est pas possible. Il a juste besoin de quelqu'un pour le stimuler, l'aider à se concentrer dans le travail individuel. Dès le deuxième jour d'école, il ne voulait plus y aller. Régulièrement, il reste à la maison." 

Une situation difficile au quotidien, sans compter les sorties scolaires auxquelles le garçon n'a pas pu participer, faute d'accompagnant. A chaque fois, les parents doivent se débrouiller pour essayer de prendre congé. Sevda Benyacoub a fini par arrêter de travailler en janvier 2019, le bruit et la nécessité de se servir seul à la cantine étant trop lourds à surmonter pour son fils.

L'absence d'AVS pour épauler Mehdi est d'autant plus frustrante qu'en maternelle, lorsqu'un professionnel l'a suivi pendant trois ans, "il a très bien réussi. C'est un sentiment d'injustice, de rage, confie la mère de famille. Je comprends les parents qui montent sur des grues. Je le ferai aussi s'il le faut. Nos enfants ont droit à la scolarité, comme tous les autres."
 

Monter sur des grues, avant de saisir la justice

Mercredi 18 septembre, le Collectif citoyen handicap appelle les familles à se rassembler devant leur rectorat pour exiger des mesures immédiates et à monter sur des grues. A Strasbourg, Marie Leffler et l'une ou l'autre personne, elles, grimperont sur un échafaudage pour faire entendre leurs voix.

D'ores et déjà, des dizaines de parents alsaciens ont envoyé des lettres, mettant en demeure le rectorat de respecter les notifications de la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées). Ils se disent prêts à aller plus loin. Début septembre, Thomas Neumuller avait décidé de saisir le rectorat en justice, son fils Théo a finalement obtenu un AVS.

Marie Leffler se sert de l'exemple de son enfant Emilien, 11 ans, pour souligner que tout n'est finalement qu'une question de volonté. Il est scolarisé à Sand dans une classe ordinaire et les choses se passent bien, car le garçon est suivi par le même auxiliaire de vie depuis trois ans et son école s'est adaptée pour lui permettre de garder la même enseignante d'une année à l'autre. 
  
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