Ça ressemble à du café, ça a la couleur du café, c'est torréfié comme du café, mais ce n'est pas du café. C'est avec de l'orge que deux associés installés depuis un an à Niedermodern, font le pari d'intéresser les consommateurs à une boisson alternative. Du "café" réellement en circuit court, du champ à la tasse.
Cela fait un an que Pierre Gaulmin et Alondra Barradas Vasquez ont installé leur unité de torréfaction artisanale à Niedermodern, dans le nord de l'Alsace. Lui a été barista, et elle, ingénieure agronome passée par une multinationale agro-industrielle. Autant dire que cette boisson, ils la connaissent. Et pourtant, lorsqu'ils décident de lancer leur propre activité, c'est un tout autre chemin qu'ils explorent.
Les grains qu'ils torréfient ne viennent pas du bout du monde, mais du champ d'à côté. C'est de l'orge, moissonné chez des agriculteurs bio, à six kilomètres de leur atelier. La récolte de cette année vient d'ailleurs d'arriver. "Ce fut un peu compliqué, à cause de la météo pluvieuse, mais on y arrive", souffle Pierre Gaulmin.
C'est avec cet orge qu'il va fabriquer son breuvage qu'il appelle aussi café. "C'est du café d'orge, précise-t-il. Ça existait déjà en Alsace au 19eme siècle, et jusqu'à la moitié du 20eme siècle". Ce "Maltzkaffe", réalisé à l'époque à partir de malt, c’est-à-dire d'orge germé, s’est dissous dans la mondialisation triomphante. Tout le monde voulait du café ramené des tropiques. Mais aujourd'hui, les mœurs évoluent. On pense circuit court. Et le café d'orge retrouve tout son intérêt.
Un "café" qui se boit à toute heure
Pierre Gaulmin ne voit que des avantages à ce café d'orge. Il présente un bilan carbone beaucoup moins important que le vrai café, et en plus, il est sans caféine. On peut donc le boire à toute heure. Son produit, dit-il, s'apparente à du café moulu, parfaitement utilisable dans les machines à expresso.
On y verrait donc que du feu ? " Les amateurs de café italiens pourraient avoir du mal à s'y retrouver explique-t-il. Le café d'orge a moins d'amertume, il est plus doux. Mais ceux qui apprécient un café médium peuvent être séduits" En tous les cas, il se prépare comme un café traditionnel, et certainement pas en version soluble comme la chicorée.
Reste à convaincre les consommateurs. Aujourd'hui, 2,25 milliards de tasses de café sont servies dans le monde. Lui, s'il avait une baguette magique, aimerait simplement faire connaître cette alternative. Peut-être en faisant appel à la mémoire des anciens "C'est vrai que les plus de 70 ans s'y retrouvent, rigole-t-il. Ça leur rappelle leur enfance". La mission de persuasion s'adresse donc à tous les autres. Mais cela semble en bonne voie. Les deux visites d'atelier prévues en août en partenariat avec l'office du tourisme de Haguenau affichent complet.