181 binômes, soit 362 candidats ont déposé leur candidature pour les élections départementales qui se tiendront en même temps que les régionales les 20 et 27 juin prochains en Alsace. A l'issue du scrutin, ils seront 80 conseillers à siéger au sein de la Collectivité européenne d'Alsace.
Les électeurs alsaciens sont appelés à désigner les conseillers de la nouvelle Collectivité européenne d'Alsace, le "super département", née de la fusion des collectivités du Haut-Rhin et du Bas-Rhin et qui a vu le jour le 1er janvier 2021. Les élections départementales se dérouleront dans 40 cantons, 23 dans le Bas-Rhin et 17 dans le Haut-Rhin. La préfecture de Colmar a publié, ce mecredi 5 mai, la liste définitive des 181 binômes (une femme et un homme) ayant déposé leur candidature.
Qui se présente?
Sans grande surprise, la majorité des conseillers sortants rempilent pour un nouveau mandat. "C'est une élection hors norme, décrit Philippe Breton, politologue, 181 binômes soit 362 candidats, il faut les trouver! Beaucoup viennent de la société civile. Il a fallu convaincre de potentiels candidats alors que la collectivité elle-même et ses compétences restent dans beaucoup d'esprits un peu floues".
A noter notamment:
- L'actuel président de la CEA, Frédéric Bierry se présente aux côtés de Monique Houlne à Mutzig.
- À Sélestat, Marcel Bauer, le maire de la commune, laisse sa place à Charles Sitzenstuhl, qui fait équipe avec Catherine Greigert.
- Dans le canton de Strasbourg-1, le sortant Mathieu Cahn est en binôme avec Nadia Anneb.
- A Colmar-2 la ministre Brigitte Klinkert et le maire de la commune Eric Straumann se représentent pour un nouveau mandat départemental
- À Cernay, le député Raphaël Schellenberger se lance au côté d’Annick Lutenbacher
- À Mulhouse-2, Bruno Fuchs, député MoDem, fait équipe avec Fatima Jenn
Alsace, terre de droite?
Historiquement, l'Alsace est de droite. Actuellement, Les Républicains, les divers droite et les élus de l'UDI détiennent 73 sièges sur 80 au sein de la nouvelle collectivité. Selon Philippe Breton, "il n'y a pas de raison que cela change en juin 2021". Il y a 6 ans, seuls les cantons Strasbourg 1, 2, 3, 5 ont élu des candidats socialistes et Wittenheim, un binôme divers gauche. Depuis les 2 élus "de gauche" haut-rhinois ont rejoint la majorité et le socialiste Olivier Bitz, élu dans le canton de Strasbourg 5, a été remplacé par Nicolas Matt ex-PS passé ensuite à LREM et soutien de Frédéric Bierry.
En juin 2021, à défaut de rouge pour les socialistes, le vert pourrait parsemer la nouvelle assemblée de la CEA. Les écologistes qui ont pris la ville de Strasbourg et Schiltigheim lors des municipales pourraient créer la surprise. Fort de ces victoires, ils se lancent dans les cantons strasbourgeois avec l'alliance des communistes. Dans le Haut-Rhin en revanche, les écologistes ont passé un pacte avec les forces de gauche pour des candidatures communes (PCF, LFI, PS). Un pacte appelé le Printemps alsacien. "Les écologistes proposent des candidats dans de nombreux cantons ; pour autant leur électorat se concentre dans les zones urbaines. Ils sont en capacité d'obtenir quelques sièges".
Le RN veut transformer l'essai
"La dynamique politique nationale pour le RN est pour l'instant constante sinon plus forte qu'en 2015" explique Philippe Breton. Parmi les 181 binômes inscrits, le Rassemblement national présente 21 binômes (sur les 23 cantons) dans le Bas-Rhin. 17 (sur 17) pour le Haut-Rhin. En 2015, malgré un score non négligeable, 35% des voix dans le 68 et 29% dans le 67, le RN n'a obtenu aucun siège. Aujourd'hui, avec un RN fort dans les sondages au niveau national, les fédérations locales espèrent transformer l'essai. Cependant, leur position sur la CEA, "les dirigeants restants hostiles à une revendication identitaire alsacienne, pourrait être mal percue par les électeurs alsaciens".
Quelle(s) voix pour les autonomistes ?
"La CEA n'est qu'un point départ" déclare Unser Land, le parti autonomiste alsacien dans un communiqué. Il présente des candidats dans 21 cantons (sur 40). Et de poursuivre "ce dont nous avons besoin c'est d'une véritable autonomie". Unser Land qui ne se satisfait pas d'une simple "grand département". Mais la radicalité du discours pourrait ne plus trouver écho au sein de l'électorat alsacien. "Les plus modérés ont été confortés avec la création de la nouvelle collectivité", souligne Philippe Breton
"L'absentéisme risque d'affaiblir la représentativité de l'assemblée"
Et la bataille sera rude, comme souvent dans les cantons les plus urbains, Strasbourg -1, 2 et 3 où près de 8 binômes respectivemement vont s'affronter. 7 pour Mulhouse-2. A Lingolsheim, seuls deux binômes se présentent. Pour autant, même si les candidats sont nombreux, l'élection n'attire pas les foules. En 2015, lors des précédentes élections départementales 4 électeurs sur 10 s'étaient rendus aux urnes. Une "abstention catastrophique" pour le politologue, qui affaiblira la représentativité des élus".
Une abstention qui pourrait battre des records une fois de plus. La crise sanitaire, les weekends du mois de juin mais aussi "le désintéressement des électeurs. La nouvelle collectivité n'a pas une image très nette dans l'esprit de l'électorat alsacien qui a bien du mal à la situer dans le mille-feuille habituel Mairie/région/Etat/Europe." La campagne pour les départementales ne se jouera pas uniquement sur les programmes. Mais avec ceux qui seront en capacité d'aller chercher l'électeur.