Avec les confinements, le télétravail, un hiver très long l'an dernier et la hausse du prix des énergies fossiles, la demande de bois de chauffage a augmenté jusqu'à 20% en 2021. Producteurs et vendeurs de bois se réjouissent de la hausse de leur chiffre d'affaires mais alertent sur les délais de livraison, rallongés d'un à deux mois.
"C'est simple, en 22 ans de carrière, je n'ai jamais enregistré une telle demande en bois de chauffage", annonce d'emblée Christophe Glad, président du groupement syndical des négociants en bois de chauffage d'Alsace. En 2021, la demande de bois sec a explosé. L'entreprise Glad tente de suivre le rythme. Les livraisons s'enchaînent. Et parmi les clients, certains viennent s'ajouter à la liste des habitués. A quelques centaines de mètres de son entreprise, à Wissembourg, Christophe Glad livre Franck Loesch. "La maison vient d'être achetée. On va utiliser le poêle situé dans la cave pour chauffer toute la maison en laissant la porte ouverte", explique le client. "On s'est décidés pour le chauffage au bois au vu de la hausse du prix du gaz. Ainsi, on espère réaliser des économies. Car entre les énergies fossiles et le bois, il n'y a pas photo", témoigne Franck Loesch.
Cette hausse du prix est justement un facteur de développement de l'utilisation du bois comme chauffage, car le prix du stère est stable depuis plusieurs années. "Beaucoup de mes clients se chauffaient déjà au bois, mais partiellement, et là, ils essayent de se chauffer davantage de cette manière en raison du prix", confirme Christophe Glad. Cette demande croissante demande une nouvelle organisation de la part des professionnels. "Je livre ceux qui ont besoin de beaucoup de bois en plusieurs fois : une première fois en octobre-novembre, et à nouveau en janvier-février". Cela lui permet d'essayer de satisfaire au mieux ses clients, compte tenu du peu de stocks. "Le but est bien sûr que tout le monde puisse se chauffer comme il le souhaite. Malheureusement, j'ai dû refuser certains clients, qui ont dû se renseigner auprès d'autres fournisseurs", poursuit Christophe Glad.
Une situation inédite pour les professionnels. En Alsace, 800.000 tonnes de bois bûches ont été consommées en 2018. Christophe Glad estime que ce taux a augmenté de 10 à 20% selon les négociants en bois. En plus de la hausse du prix des énergies fossiles, cette croissance s'explique par les confinements et le télétravail, ainsi que par le long hiver que l'on a connu l'année dernière. "On a dû chauffer jusqu'en mai 2021", rappelle Christophe Glad. Cette situation est positive pour les professionnels, qui enregistrent tous une hausse de leur chiffre d'affaires. Chez Glad, "elle s'élève à 20%".
A 15 km de Wissembourg, Alain Heinrich produit son bois lui-même. Il dirige l'entreprise Heinrich depuis 1996, à Rittershoffen. "Le bois que je coupe en moment pourra être utilisé comme bois de chauffage uniquement dans un an et demi voire deux ans", explique-t-il. En effet, sans séchoir, c'est le temps que le bois met pour passer de vert à sec. Or l'entreprise n'a plus de bois sec à proposer. "Ce que je peux conseiller aux gens, c'est d'acheter du bois vert - ce qui leur revient moins cher, en plus - et le stocker chez eux. Ainsi, ils sont sûrs d'avoir leur bois de chauffage pour les prochains hivers" poursuit Alain Heinrich.
Sylviane Iffland, sa compagne et co-gérante, complète : "nous nous fournissons aussi auprès de producteurs des régions limitrophes, si nos stocks deviennent trop faibles. Mais même eux n'avaient plus de bois sec à vendre". Le couple ne peut que constater cette incroyable demande : "certaines années, on ne vend pas tout. En 2021, on était à sec dès mi-novembre. Il ne nous reste quelques tous petits paquets de bois sec pour dépanner, c'est tout !" s'exclame Sylviane Iffland. Comme Glad, l'entreprise Heinrich vend 2.000 stères par an.
Pour autant, cette situation ne devrait pas amener à la flambée du prix du bois. En 2022, "le prix du stère augmentera maximum de 5%", assure Christophe Glad. Et il n'y pas de pénurie à craindre. En revanche, les professionnels alertent sur les délais de livraison, rallongés d'un à deux mois. "N'attendez pas de mettre vos dernières bûches dans la cheminée pour commander du bois, faites-le bien en amont", conseille Christophe Glad.