Ce lundi 7 février 2022, Johan Clarey est devenu, à 41 ans, le skieur le plus âgé à monter sur un podium olympique en reportant l'argent sur la descente des JO de Pékin. Derrière cette médaille, toute une équipe dont Sébastien Auer. Originaire de la vallée de Thann, le voici désormais technicien d'un vice-champion olympique.
L'Alsacien Sébastien Auer est depuis douze ans le technicien du skieur Johan Clarey. Ce 7 février 2022, le descendeur de 41 ans s'est offert une médaille d'argent, pour le plus grand bonheur de son staff.
Il est 21h30 à Pékin, 14h30 en France. Huit heures plus tôt, le Tignard Johan Clarey remportait une médaille d'argent surprise en descente, derrière le Suisse Beat Feuz. Mais son technicien, Sébastien Auer, est encore sur un petit nuage, seul dans sa chambre d'hôtel en raison du protocole sanitaire : "C'est très difficile à décrire comme sensation. Je n'arrive pas à réaliser ce qu'il s'est passé."
Depuis douze ans, le Thannois prépare les skis du champion français. Une relation de longue date, qui lui permet de connaître le descendeur par cœur : "Depuis notre arrivée à Pékin, je le trouvais vraiment bien. Johan était serein, tranquille, positif". Et il avait de quoi : le 21 janvier, le haut-savoyard avait terminé deuxième de la descente de Kitzbühel, en Autriche.
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Si Johan Clarey était plutôt serein, il a dû faire sans son technicien pendant 48h. Car l'organisation des Jeux ne rigole pas avec le Covid-19, et Sébastien Auer a pu le constater, lui qui a été testé positif en arrivant sur place : "J'étais négatif au moment de partir pour Pékin, c'est étrange. J'ai dû passer deux jour isolé, et comme je suis considéré comme cas contact, je ne peux que me déplacer de l'hôtel à la piste, pas plus. C'est assez lourd à vivre, mais on s'adapte."
Le Haut-rhinois était tout de même présent pour les entraînements de Johan Clarey, et a pu constater que la neige de Pékin était assez compliquée à gérer : "Sur le haut de la piste, c'est bien glacé. Et avec le froid et le vent, ça rend la neige très agressive. On s'est dit que ce serait pareil qu'en Corée il y a quatre ans. À l'époque, on n'avait pas réussi à s'adapter, je m'en rappelle très bien. C'était donc un nouveau challenge."
On est comme un vieux couple. Il me dit de remettre un petit coup de gommes, je le fais. C'est lui qui est sur les skis et qui ressent la piste.
Sébastien AuerTechnicien de Johan Clarey
Mais l'expérience a parlé. Les deux hommes se connaissent depuis si longtemps qu'une confiance s'est installée entre eux : "À l'entraînement, on essayé de skier avec des carres (arête en métal qui permet aux skis d'accrocher dans la neige, ndlr.) plus fin, comme à Kitzbühel. Mais Johan m'a dit que c'était 'inskiable', et a fini 29e. Alors on a pris des carres bien plus épais. Certains athlètes voulaient des skis qui allaient bien plus vite, il faut croire qu'ils se sont trompés", sourit le technicien de 36 ans.
La médaille de Johan Clarey est le fruit d'une infinité de paramètres, mais l'Alsacien a pu faire la différence grâce à sa relation très forte avec le champion : "On se parle très peu en haut de la piste. Mais on se comprend très vite après tant d'années, on est comme un vieux couple. Il me dit de remettre un petit coup de gommes, je le fais. C'est lui qui est sur les skis et qui ressent la piste."
Résultat, Sébastien Auer a pu vivre la course la plus forte en émotion de sa carrière depuis le haut de la piste : "Quand je l'ai vu allumer du vert tout le temps, mon cœur s'est emballé. C'est merveilleux. On vit des choses incroyables dans ce métier. Ce n'est même pas un métier, c'est une passion, on a une vie incroyable", avoue-t-il, ému.
Et d'ajouter : "Je n'ai pas l'impression de travailler. Me lever à cinq heures pour aller sur la piste, ce n'est pas un problème. Le seul manque, c'est d'être loin de ma femme et de mes enfants. Ça, c'est pas facile. Mais ici, on est entouré d'une super équipe de France. Tout le monde est pro, personne n'est chiant. L'entraîneur fait son taff, le kiné fait le sien, je fais le mien. C'est comme une famille, on est tous très soudé."
Dans tout ce bonheur, l'Alsacien garde une pensée pour son autre coureur Adrien Théaux, victime d'une lourde chute en novembre et absent des JO. Il pense maintenant à profiter tant bien que mal : "Avec le Covid, ce n'est pas la folie... Je suis seul dans ma chambre avec deux, trois bières. Mais je n'ai jamais reçu autant de messages, je ne sais pas si je vais pouvoir répondre à tous !"
Le binôme Clarey-Auer rentrera en France le 10 février, le skieur se s'alignant pas sur le Super-G : "Il a eu sa médaille, il ne va pas forcer à son âge !", s'amuse le technicien. Une dernière étape de coupe du monde les attend en Norvège, avant les finales à Courchevel et Méribel (Savoie), du 16 au 20 mars.