Les salariés de Clestra, en grève depuis quatre semaines, en appellent à l'aide de l'Etat

Nouvelle journée de manifestation des salariés de Clestra, en grève depuis près de quatre semaines. Après un rassemblement devant le tribunal de Strasbourg, ce 25 juillet, ils ont été reçus à la préfecture en milieu de matinée.

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L'usine de production de cloisons intérieures Clestra, basée à Illkirch-Graffenstaden, est quasiment à l'arrêt depuis le 3 juillet 2023. À l’origine de cette grève, un licenciement que le syndicat CGT de l'entreprise juge abusif. Mais pas seulement.

Les salariés dénoncent également des conditions de travail qui, selon eux, se sont dégradées, et craignent un plan social masqué. Le 17 juillet dernier, deux semaines après le début de la grève, ils s'étaient déjà rassemblés devant l'Inspection du travail de Strasbourg, et avaient interpellé le ministère de l'Industrie par le biais d'un courrier.

Pour cette nouvelle journée d'action, ce mardi 25 juillet, ils étaient près de 120 à manifester en début de matinée devant le tribunal de Strasbourg. Puis ils se sont rendus à la préfecture, où une petite délégation a été reçue après 11h par une collaboratrice de la préfète du Bas-Rhin et de la région Grand Est, Josiane Chevalier.

"Elle nous a écoutés et a compris notre message" estime Amar Ladraa, membre CGT du CSE (Comité social et économique) de Clestra et responsable CGT métallurgie du Grand Est. "Aujourd'hui, la situation est complètement bloquée (…) Nous souhaitons qu'il y ait rapidement une table ronde entre l'Etat, les salariés et les frères Jacot (gérants du groupe familial Jestia, qui a repris Clestra en octobre 2022), pour trouver une issue à ce conflit, et nous donner de la visibilité par rapport à leur projet industriel."

Une situation dégradée depuis 8 mois

L'entreprise Clestra avait été placée en redressement judiciaire le 1er août dernier, suite à des difficultés liées à une cyberattaque survenue le 30 avril 2022, ainsi qu'à la perte d'un contrat de 8 à 10 millions d'euros pour cause de guerre en Ukraine.

Le repreneur Jestia, spécialiste du mobilier de collectivités, avait été choisi en octobre par la chambre commerciale du tribunal de Strasbourg. La pérennité du site semblait alors assurée, et la majorité des emplois – 283 sur 369 - préservée.

Mais le CSE "y compris les cadres dirigeants, s'était prononcé pour l'autre repreneur" rappelle Amar Ladraa. "Et au bout de huit mois, on se rend compte qu'on n'avait pas tort, et que nos inquiétudes étaient fondées."

Selon le responsable CGT métallurgie du Grand Est, dans la branche administrative Clestra News, "parmi les cadres dirigeants, c'est l'hécatombe. À peu près 40 à 50 salariés sont partis, de gré ou de force." Et dans la branche de production, Clestra Métal, les conditions de travail se sont fortement dégradées au fil des mois. "Leur but, c'est d'essayer de dégoûter, d'écœurer les gens", dénonce Amar Ladraa. "Ils nous disent : si les salariés ne sont pas contents, qu'ils partent ! (…) Ils veulent absolument baisser la masse salariale."

Ces craintes que cette situation difficile cache un plan social sont renforcées par le déménagement de Clestra vers un nouveau site du port du Rhin, cinq fois plus petit.

"Ils ont commencé à déménager les premières machines dès le 1er juin", raconte Amar Ladraa. "Mais nous, on n'a aucune visibilité. On ne sait pas qui est concerné. Est-ce que ce sont tous les salariés, ou seulement une partie ? Il y a un problème de dialogue social, et au-delà de ça, on est très inquiets par rapport à leur projet industriel."

En effet, comme le groupe Jestia possède des filiales dont les activités sont proches de celles de Clestia, les salariés craignent que leurs nouveaux dirigeants projettent des regroupements. "On n'est pas aveugles", soupire le responsable CGT. "Ils transfèrent une partie de la production sur d'autres sites de leur groupe, notamment à Saint-Etienne. Les salariés voient partir une partie de la production du site d'Illkirch-Graffenstaden. C'est pourquoi on demande à avoir une visibilité sur le projet industriel exact."

La grève se poursuit

Et même si une fin de mois difficile s'annonce, les salariés sont déterminés à poursuivre leur grève. Depuis le 3 juillet, "il n'y a quasiment rien qui sort de la production" affirme Amar Ladraa. "Sur les 120 postes en production, on peut dire que seuls 8 travaillent : des responsables et des intérimaires."

Dans leur très grande majorité, les grévistes, "des salariés principalement issus des quartiers populaires de Strasbourg" comptent "une ancienneté de 30 à 40 ans." Et ils sont déterminés à poursuivre leur lutte, même si, à la fin de ce mois de juillet, ils ne toucheront pas de salaire.

Afin de les soutenir, la CGT a mis en place une caisse de grève en ligne. Fin 2023, l'entreprise Clestra doit célébrer ses 110 ans d'existence.

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