Dans la région de Mulhouse et du sud-Alsace, rares sont les parents qui ont décidé de garder leurs enfants à la maison ce jeudi et ce vendredi, malgré la tolérance accordée par le gouvernement. Ceux qui l'ont fait, jouent la prudence face au virus, à quelques jours de Noël. Témoignages.
A Ferrette, dans le Sundgau, les élèves et les enseignants de l'école Arcabas s'apprêtent à vivre deux journées presque normales. Les absences autorisées par le gouvernement pour ce jeudi 17 décembre et ce vendredi 18 décembre, à l'occasion des deux derniers jours de classe avant les vacances de Noël, n'ont pas rencontré beaucoup d'adeptes dans les familles."Sur 198 élèves au total, je totalise ce jeudi 25 absences, dont onze qui sont explicitement liées aux annonces du gouvernement", relève la directrice de l'établissement Delphine Fuetterer, ce qui représente 5% des effectifs.
L'annonce de cette tolérance accordée aux parents avait pourtant été faite ce mardi par Jean Castex lui-même. Suivant les recommandations du conseil scientifique, le Premier ministre avait assuré, comme l'indique Franceinfo dans ce tweet, "vouloir limiter les risques de contamination à Noël":
#Covid19 : Jean Castex a suggéré mardi que les enfants qui le peuvent n'aillent pas à l'école jeudi et vendredi afin de limiter les risques de contamination à Noël, reprenant à son compte une recommandation du Conseil scientifique #AFP pic.twitter.com/nPv71usRKo
— Vous et Nous (@VousetNous77) December 15, 2020
Un appel entendu par certains malgré tout. Leurs arguments semblent plein de bon sens et dictés avant tout par la peur de voir la covid-19 s'inviter à la table des fêtes. Marie-Claude Frick par exemple, qui tient un hôtel-restaurant dans le secteur, a décidé de garder ses trois enfants, deux collégiens et une écolière de CM2, à la maison.
Ma manière de contribuer à éviter une troisième vague
"C'est ma manière de contribuer à éviter une troisième vague. Il faut éviter au maximum le brassage avant les fêtes, explique-t-elle. Mon restaurant est fermé depuis la fin octobre, j'ai perdu 50% de mon chiffre d'affaires en 2020, on nous annonce un réouverture le 20 janvier, mais rien n'est moins sûr. C'est horrible et il faut que cette spirale s'arrête", ajoute-t-elle, un brin désespérée.
Éviter que le virus ne s'invite à la table des fêtes
Pour Jessica Lehr, qui vit à Mulhouse avec ses trois enfants, l'annonce de Jean Castex l'a confortée dans son choix. "De toutes façons, il seraient restés à la maison quoiqu'il arrive, confie cette mère au foyer, très marquée par la première vague de coronavirus qui a déferlé sur Mulhouse au printemps. Mes enfants ne vont pas dans les magasins et restent au maximum chez nous depuis le début de l'épidémie. On a une cour, on fait des jeux de société et je les aide dans leurs devoirs, ils sont même contents d'être ici", conclut-elle.
Etre casanier au maximum, c'est, selon ces deux mères de famille, le prix à payer pour passer des vacances, puis une rentrée, plus sereines, bien que Marie-Claude Frick reste dubitative. "Les gens sont autorisés à se voir, ce n'est pas interdit. Comme éviter les rencontres sauvages? Comment éviter que les familles se réunissent à 25 ou 30 personnes?", se demande-t-elle, elle qui craint déjà pour son activité de restauratrice, une nouvelle poussée épidémique en janvier.
Entre arguments sanitaires et motifs pratiques
Pour d'autres parents, comme Julie (son prénom a été modifiée à sa demande), ne pas mettre ses enfants de trois et cinq ans à l'école répond aussi à un aspect pratique, plus que sanitaire. "Quelque part, c'est une décision logique. C'est une période où sept jours avant les fêtes, c'est mieux d'éviter de croiser du monde. Mais pour moi qui suis infirmière en chef dans une résidence pour personnes âgées, c'est aussi l'occasion de me consacrer à 100% à mon travail ces derniers jours avant les fêtes. Je fais donc garder mes enfants par des proches, ce qui m'évite de m'adapter aux horaires de la classe."
Aux arguments sanitaires viennent donc s'ajouter parfois pour les familles des motifs pratiques. C'est précisément ce qui chiffonne Carmen Grandhaye, proviseur du lycée Mermoz à Saint-Louis où près de 2.300 élèves sont scolarisés. A ses yeux, l'école, même en ces temps de pandémie, n'est pas un service à la carte, d'autant que chaque absence doit être scrupuleusement justifiée. "Le personnel de la vie scolaire doit appeler chaque parent pour prendre le temps de vérifier que le motif invoqué est légitime. Ca prend du temps et ça fait beaucoup de travail, d'autant qu'il est difficile de juger si un élève est absent sur décision parentale".
Par ailleurs, au vue d'une année 2020 déjà très perturbée, chaque jour de classe compte. "Deux jours, ça paraît peu mais c'est précieux, indique Delphinbe Fuetterer, directrice à Ferrette. Et puis, en école primaire, il règne toujours une atmosphère particulière avant les vacances de Noël. On distribue aux enfants un petit livre, on fait quelques chants, ce sont des moments de convivialité et de partage qui sont importants, surtout en ce moment. Je respecte le choix de tous les parents, bien entendu. D'ailleurs, on s'attendait à avoir plus d'élèves absents."
Une minorité d'absents, un choix assumé, mais aussi parfois, l'absence de choix pour certains parents, faute de télétravail ou de pouvoir faire garder leurs enfants.