Noé Brogly-Arme, 19 ans, vit près de Saint-Louis (Haut-Rhin), et se prépare depuis des mois à sa première compétition de culturisme naturel, sans stéroïdes anabolisants. Une passion qu’il assouvit au prix de nombreux sacrifices.
Regard pétillant derrière des lunettes, et chevelure bouclée, le visage juvénile de Noé Brogly-Arme affiche un petit air d’étudiant facétieux. Mais son corps a développé une musculature hors normes, gagnée à force d’entraînement et de privations.
Un choix de vie. "Tout tourne autour de ça" reconnaît le jeune homme. "Pour gérer la période de prise de masse musculaire, enlever le gras et l’eau" et obtenir "le physique le plus sec et le plus impressionnant possible en montant sur scène."
À tout juste 19 ans, il s’adonne depuis des mois à la préparation de sa première compétition de culturisme naturel, qui se déroulera le 18 mai 2024 près de Versailles. Une "performance sportive où tout est dans le physique", avec une chorégraphie permettant de faire ressortir les muscles. "Une compétition, mais poussée à l’extrême", à laquelle participeront d'autres jeunes, "de 16 à 23 ans".
Un entraînement mental et physique
Actuellement, tout son quotidien, toute son alimentation et toutes ses relations tournent autour de ce seul objectif. Noé Brogly-Arme a juste conservé un travail à temps partiel, car "ce serait compliqué à plein temps." Sa matinée commence par une séance d’entraînement cardio, à jeun. En journée, il doit "respecter le nombre de (ses) pas", et durant la nuit, respecter un nombre précis d’heures de sommeil.
Côté nourriture, "tout est contrôlé, pesé, on n’a pas droit à des écarts. Même pas un fruit de plus, c’est très draconien." Midi et soir, son menu reste invariable : "riz, poulet et légumes verts. Sauf parfois de la patate douce le soir, à la place du riz." Et des compléments alimentaires, protéines en poudre et magnésium marin, "pour éviter les carences."
Seul petit "plaisir de la journée" : plusieurs collations, faites d’une sorte de porridge de flocons d’avoine à l’eau - "le lait est banni" -, agrémenté d’amandes ou de beurre de cacahuètes, et de quelques myrtilles. Et en guise de boisson, de l'eau, énormément d’eau. "Actuellement 4 litres par jour, mais ça va encore augmenter."
Du culturisme sans dopage
Mais pas question pour lui d'ingurgiter des stéroïdes ou d’autres substances dopantes. Du moins pour l’instant. Noé Brogly-Arme est adepte du culturisme naturel, où les muscles se développent uniquement grâce à une alimentation adaptée et un entraînement structuré. A son âge, les "gens ‘matrixés’, qui se sentent obligés de passer directement par la case des produits dopants", très peu pour lui.
"L’avantage du point de vue de la santé est indéniable, explique-t-il. Même le bodybuilding naturel n’est pas sans risques, car on pousse le corps dans des retranchements extrêmes. Mais avec le fait de ne pas prendre de stéroïdes, c’est beaucoup de gagné."
Le culturisme naturel est aussi "une discipline à part, par rapport au bodybuilding classique. Les gabarits n’ont rien à voir. On a 30 à 40 kilos de moins. C’est moins impressionnant, mais on est dans un physique harmonieux, sec, avec des abdos saillants."
Dans un avenir plus lointain, il ne rejette pourtant pas l’idée de recourir un jour à la chimie. "J’ai tout le temps de voir le potentiel que j’ai naturellement, estime-t-il. Être un athlète professionnel, c’est mon objectif."
Une passion née dans l'enfance
Déjà tout petit, il aimait "cette image de l'homme viril et musclé. J’ai grandi avec les films des années 1980, même si ce n’était pas de ma génération, raconte-t-il. Rambo, Stallone, Schwarzenegger... Un physique sculpté, ça m’a toujours impressionné, comme gamin."
Après un début d’adolescence où il ne faisait "pas plus de sport que ça", à la période du lycée, il a commencé à s’entraîner "dans (son) coin, avec des élastiques, et des poids de corps." Puis, un jour, il a franchi le pas et est "allé en salle". Une révélation : "Là, j’ai découvert quelque chose à quoi je ne m’attendais pas. Que le culturisme, quand on le vit, c’est bien plus profond que ce que les gens pourraient penser. C’est un mode de vie, auquel on s’adapte (...) Un sport profond, où l’on apprend bien plus sur sa propre personne."
Des sacrifices au quotidien
Sa vie actuelle est une longue période de renoncements. "Quand on est invité au restaurant, on ne peut pas, quand il y a une fête avec des amis, on ne peut pas. C’est un peu se couper du monde, admet Noé Brogly-Arme. Les mois qui précèdent la compétition, on ne peut pas se permettre le moindre écart."
Mais ces sacrifices continuels ont aussi des vertus. Il constate qu'"à tout le temps se restreindre, le reste devient plus facile." Avec le sentiment de retrouver le sens de l’essentiel. "On apprend à apprécier les choses les plus simples. Quand je mange mon assiette de riz, je suis content. Et après la compétition, re-goûter un hamburger ou un donut, ce sera grandiose."
Il trouve du soutien de la part de nombreux jeunes, surtout "beaucoup de retours sur les réseaux sociaux." Mais doit aussi faire face à l’incompréhension, voire le refus, d’une partie de sa famille.
"Parfois on me demande : ‘Comment fais-tu pour ne pas craquer ?’" reconnaît le jeune homme. Mais sa réponse est simple : "J’aime ce que je fais. Et quand on aime, on peut. On a tellement envie de réussir qu’on va à fond dans le délire."