Pierre Laurent a connu les débuts des stations de ski dans le massif vosgien. Il a grandi au Bonhomme, un petit village proche des sommets du lac Blanc. Depuis les années soixante où il fallait porter les skis en bois sur le dos pour pouvoir descendre, la passion pour ce sport ne l'a jamais quitté.
Pierrot, c’est le nom qui est brodé sur sa combinaison rouge et blanche de l’école de ski française du Lac Blanc. Il est le doyen des moniteurs de la station. La plupart de ses collègues ont appris à skier avec lui, il fait partie des pionniers du ski alpin dans la vallée.
Dans les années soixante, il n’y avait pas de téléskis. Il fallait se débrouiller avec des skis en bois, les porter sur le dos au sommet d’un pré pour tenter de descendre dans la neige poudreuse sans chuter. Pierre Laurent est reconnaissant envers Jean Bottinelli, le secrétaire de mairie de la commune. Lorsqu’il y avait suffisamment de neige, Il emmenait les jeunes du village au refuge du Tinfronce situé au milieu d’un grand pré.
Pour arriver jusque-là, il y avait 400 mètres de dénivelé à gravir à pied, skis sur le dos. Un système de poulies entraînait une corde en chanvre à l’aide d’un moteur, cela permettait de remonter la pente, c’était l’ancêtre du téléski. Une fois le moteur en action, on agrippait la corde, il fallait avoir des gants très solides pour supporter l’abrasion de la corde en chanvre. Pierrot se souvient avec émotion : "On en profitait au maximum, on suivait les conseils de notre moniteur pour entreprendre des virages télémark, une technique adaptée aux skis de l’époque. Avant de repartir on buvait un petit verre de vin chaud, nous descendions au village à la nuit tombante."
Pierre Laurent, mémoire vivante du Lac Blanc
Dix ans plus tard, l’engouement pour le ski se généralise et les premières remontées mécaniques se construisent un peu partout dans le massif vosgien. Pierrot est un skieur confirmé, il se lance corps et âme dans le développement de ce nouveau sport. Il devient moniteur de ski, accompagnateur en montagne et entraîneur. Il ouvre en même temps un commerce de location de ski. "Tout est allé très vite" se souvient Pierre. "J’avais investi au départ dans dix paires de ski et le premier groupe de clients était constitué de 12 personnes. J’ai fini par avoir 400 paires au bout de deux ans."
Durant les années 1980, la station bénéficie de la mise en place d’une école de ski française. Cela permettra d’aller plus loin dans la formation et la compétition.
Avec 13 pistes de ski, un télésiège débrayable utilisable aussi en été pour la descente en VTT, la station du Lac Blanc est à ce jour l’une des plus importantes du massif vosgien. Pierre Laurent a levé le pied mais il est toujours présent pour initier petits et grands au ski alpin, il ne s’en lasse pas : "J’ai appris à skier à des petits de quatre ans, certains sont devenus d’excellents compétiteurs et moniteurs à l’école de ski. C’est pour moi une grande fierté, la suite est assurée."